Drogue du violeur : qu’est-ce que la soumission chimique ?

Certains agresseurs versent des stupéfiants ou des médicaments dans la boisson ou dans la nourriture de leur victime dans le but d'abuser d'elle. Une toxicologue répond à nos questions.

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Drogue du violeur : qu’est-ce que la soumission chimique ?
©Alexander Mogilevets

L'affaire est sordide. Depuis 2013, un homme, originaire du sud de la France, droguait sa femme puis offrait son corps à des inconnus rencontrés sur des sites. Dans cette affaire, une cinquantaine d'hommes seraient impliqués. 

Le sexagénaire dissimulait des tranquillisants à base de benzodiazépine dans les repas de sa femme. Une fois assoupie, son mari la livrait à des hommes. Lors de la perquisition, des vidéos de ces scènes de viol ont été retrouvées. 

Plus de 660 cas recensés en 2019

Ce mode de procédé est loin d’être unique. Il porte un nom : la soumission chimique. 

En 2019, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a recensé plus de 660 cas relevés par des structures de dépistage. Les faits se produisent en grande majorité dans des contextes festifs, comme des soirées, d’après Françoise Brié, directrice générale de la Fondation Nationale Solidarité Femmes (FNSF).

"C’est une stratégie de certains agresseurs d’utiliser des produits tranquillisants pour avoir des rapports sexuels non consentis", explique la directrice de la FNSF. C’est tout simplement un viol ."

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Quelles substances sont utilisées ?

Contrairement au cliché, l’utilisation de GHB dans le cadre de la soumission chimique est relativement rare en France. Souvent, ce sont des médicaments qui sont utilisés, en particulier les benzodiazépines comme le Lexomil, qui ont des propriétés hypnotiques ou qui font dormir.

"C’est très facile de s’en procurer, avertit la toxicologue. Ces médicaments sont beaucoup prescrits, c’est aussi facile d'en avoir sur les marchés parallèles."

Que faire si on s’aperçoit qu’on a été drogué ?

Le cas le plus fréquent selon Oliva-Labadie, est celui d’une jeune femme qui se réveille en n'ayant que très peu de souvenirs de sa soirée et qui s’aperçoit qu’elle a peut-être été droguée. 

"Dans ce cas, il faut se rendre dans un service d’urgence le plus vite possible afin de vérifier si on peut retrouver des traces de substances hypnotiques et des signes d’agression sexuelle, explique la toxicologue. En général, quand les femmes s’en rendent compte, elles ont honte et ne signalent pas la situation", regrette-t-elle.

Comment identifier la soumission chimique ?

Les médecins peuvent retrouver des traces de ces substances dans le sang, dans la salive ou dans les urines de la victime. Mais cela n'est possible que si elle se signale suffisamment rapidement, explique Oliva-Labadie. Le GHB est détectable pendant 6 à 12 heures après sa consommation.

Après quelques jours, il est toujours possible de retrouver des traces de drogues ou de médicaments mais plutôt dans les cheveux de la personne, précise la toxicologue. 

Le risque d’opposition du tribunal

Porter plainte n'est pas toujours évident. Les agressions ont souvent lieu dans un cadre festif, et il arrive que les victimes aient consommé de l'alcool. Cela suffit parfois à remettre leur parole en cause. "Dans certaines affaires, cela a posé des difficultés ensuite pour aller porter plainte et pour les suites judiciaires", regrette Françoise Brié. 

"Si une victime indique avoir subi des violences sexuelles dans un cadre festif après avoir bu de l’alcool , cela ne doit pas empêcher les suites judiciaires, revendique Françoise Brié. Il ne faut jamais donner d’excuse à l’agresseur. Rien ne justifie un viol ou une agression !"

Une initiative pour se protéger

En attendant des mesures de fond, comment faire pour se protéger ? Certains bars distribuent des couvercles à placer au dessus de son verre, fabriqués par des marques comme My Cup Condom, Drinkwatch ou Drivecase.