Publicité

Coup d'Etat au Soudan: le premier ministre ramené chez lui

Le bureau d'Abdallah Hamdok rappelle que «plusieurs ministres et dirigeants politiques sont toujours en état d'arrestation dans des endroits inconnus» depuis le coup d'Etat mené par le chef de l'armée

Des Soudanais dans les rues de Khartoum, mardi 26 octobre 2021. — © EPA /MOHAMMED ABU OBAID
Des Soudanais dans les rues de Khartoum, mardi 26 octobre 2021. — © EPA /MOHAMMED ABU OBAID

Le premier ministre soudanais Abdallah Hamdok a été ramené chez lui mardi soir et reste «sous surveillance renforcée» au lendemain d'un coup d'Etat mené par le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, et contesté par des manifestants qui ont de nouveau essuyé des tirs de grenades lacrymogènes.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, s'est entretenu par téléphone mardi avec Abdallah Hamdok. «Le secrétaire d'Etat se réjouit de la libération du premier ministre et renouvelle son appel aux forces militaires soudanaises pour qu'elles libèrent tous les dirigeants civils en détention et garantissent leur sécurité», selon un communiqué du département d'Etat.

Lire aussi:  Nuit de protestations contre le coup d'Etat militaire au Soudan

Le général Burhane avait bien tenté de rassurer mardi en assurant que le chef du gouvernement était à son propre domicile. Mais face aux appels incessants venus de nombreuses capitales, il a semblé céder en soirée.

Mais alors qu'Abdallah Hamdok était tout juste revenu avec son épouse à son domicile, son bureau rappelait que «plusieurs ministres et dirigeants politiques sont toujours en état d'arrestation dans des endroits inconnus».

Les Soudanais dans la rue

Les opposants soudanais au coup d'Etat, qui réclament l'aide de la communauté internationale, sont sortis en masse pour tenter de relancer une transition post-dictature brutalement interrompue lundi matin. Mardi, des témoins ont rapporté à l'AFP que les forces de sécurité tiraient des grenades lacrymogènes sur des manifestants.

Les manifestants veulent que l'ensemble des autorités civiles de transition soient réinstituées. Ils continuent donc de bloquer par milliers les principaux axes de Khartoum sous une nuée de drapeaux soudanais et aux cris de «Non au pouvoir militaire!».

En face, les forces de l'ordre, selon des militants, ont arrêté plusieurs dirigeants de partis politiques, attaqué des étudiants sur le campus de l'Université de Khartoum et tiré des grenades lacrymogènes pour disperser des manifestants dans le remuant quartier de Bourri, dans l'est de la capitale.

Alors que le scénario du pire est dans tous les esprits, deux ans après la révolte contre l'autocrate Omar el-Béchir qui s'est soldée par plus de 250 morts, «un usage de la force n'entraînerait pas seulement un bain de sang», prévient International Crisis Group, «il pourrait aussi mener à un face-à-face prolongé qui fermerait la porte à la résolution de la crise». Lundi déjà, quatre manifestants avaient été tués par des tirs de l'armée, selon un syndicat de médecins pro-démocratie, et plus de 80 blessés.

Le Conseil de sécurité de l'ONU renonce à dénoncer le putsch

Lors d'une conférence de presse à Khartoum mardi, le général Burhane a défendu son coup de force, affirmant avoir agi car «certains attaquaient l'armée», «composante essentielle de la transition». Dans ce contexte explosif, les vols vers et depuis l'aéroport de Khartoum ont été suspendus jusqu'à samedi.

Englué depuis deux ans dans une transition tuée dans l'oeuf, le Soudan est désormais plongé dans l'inconnu, alors que la chute du régime Béchir et la signature d'accords avec les rebelles avaient fait croire à une issue après des décennies de crises.

Lire encore:  Soudan: pour les voisins, un putsch pas si malvenu

Le Conseil de sécurité de l'ONU a renoncé à dénoncer le putsch «dans les termes les plus forts», a assuré un diplomate à l'AFP. Mardi, les ambassadeurs soudanais à Paris, Bruxelles et Genève (Suisse) ont dénoncé le coup d'Etat et proclamé leurs ambassades comme celles du «peuple et de sa révolution».

Pour manifestants et experts, la possibilité d'un retour au règne sans partage des militaires est plus réaliste que jamais.