Dernier hiver pour les terrasses chauffées, un "non-sens écologique"

Publicité

Dernier hiver pour les terrasses chauffées, un "non-sens écologique"

Par
La terrasse chauffée d'une brasserie à Paris en 2019.
La terrasse chauffée d'une brasserie à Paris en 2019.
© Maxppp - Philippe Lavieille

Après un report d’un an, l’interdiction des terrasses chauffées sera mise en place au printemps prochain dans tout le pays. La mesure est déjà en vigueur dans certaines villes comme à Rennes. D'un point de vue écologique, une terrasse chauffée pendant une journée, c'est l’équivalent de 350 km en voiture.

Fini l’été : les températures ont baissé, et donc ils fleurissent de nouveau sur les terrasses. Les braseros, radiants électriques, parasols chauffants ont repris leur quartier pour permettre aux clients de bars et de restaurants d’être dehors tout en restant au chaud. Mais c’est bientôt terminé. Si la mesure a obtenu un sursis d’un an en raison de la pandémie de Covid-19, les terrasses chauffées seront interdites après le 31 mars 2022 partout en France

Au moment du vote de la loi, Emmanuel Wargon était secrétaire d’État à la Transition écologique. "Il me semble qu'en terme écologique, chauffer l'extérieur reste un non-sens absolu", avait-elle déclaré. Et pour l’actuelle ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, "on ne peut pas non plus chauffer à plein régime des terrasses en plein hiver pour le simple plaisir de boire son café en terrasse en ayant chaud". Emmanuel Wargon précise "qu’un demi-million de tonnes de CO2" ne seront ainsi plus émises chaque année, "ce n'est pas anecdotique".

Publicité

"Trois fois le tour du globe terrestre"

Plusieurs études ont jusqu'ici mesuré "la gabegie énergétique" des terrasses chauffées, comme l’écrivait début 2020, le co-fondateur de l’association négaWatt Thierry Salomon. Dans un article publié sur LinkedIn, il estime qu’une terrasse chauffée avec des braseros peut consommer jusqu’à "50.400 kWh par hiver" et émettre "13,7 tonnes de gaz carbonique" dans l’atmosphère. C’est "l’équivalent des émissions d’une berline neuve qui roulerait 122.000 km, soit trois fois le tour du globe terrestre". 

Dans son billet, Thierry Salomon compare également le chauffage des terrasses disposant d’un radiateur électrique :

"En supposant que la moitié des 22.000 terrasses de Paris soient pareillement chauffées, leur consommation électrique hivernale totale est égale à celle de tous les habitants de deux arrondissements de la capitale pendant un an."

En France, Rennes n’a pas attendu pour mettre en place cette mesure, comme c’est le cas depuis 2012 à Thonon-les-Bains en Haute-Savoie. Dans la capitale bretonne, la réglementation est entrée dans les mœurs, vite acceptée et sans trop de frondes. Dans le centre, Maxime Samson, le gérant du bar Le P’tit vélo à Rennes ne peut plus mettre de braseros depuis le 1er janvier 2020. Il avait été le dernier bar à ne pas installer de chauffage sur la place, et remarqué qu’il était celui qui avait le moins de clients. "On a eu un hiver assez doux, c'était juste avant l’épidémie de Covid-19" se souvient le jeune patron. "On a même mieux travaillé que l’hiver précédent." Il reconnaît que ces chauffages dehors "sont un non-sens", et n’a pas l’impression d’avoir perdu de la clientèle, notamment car "il ne fait pas non plus très froid chez nous".

Pour les bars, cette interdiction sera une source d’économie. Selon les estimations, équiper sa terrasse de chauffage peut coûter de 10 000 à 15 000 euros, entre l’acquisition du matériel et l’installation. À l’étranger, et notamment en Allemagne, des grandes villes ont adopté la mesure, comme à Berlin, Cologne et Munich. Un bon plaid, un gros pull, une écharpe et un blouson sont devenus la solution alternative.

pixel