Environ 1 000 migrants évacués d’un campement à Grande-Synthe

Face à la tension croissante avec l’Angleterre et les associations de défense des exilés, l’Etat a répondu par sa méthode habituelle : un important campement de migrants a été démantelé sur le littoral du Nord, à Grande-Synthe, ce mardi.

A Grand Synthe, en mars 2021, les tentes et les couvertures du camp étaient déjà détruites par la police et confiées à une entreprise de nettoyage.

A Grand Synthe, en mars 2021, les tentes et les couvertures du camp étaient déjà détruites par la police et confiées à une entreprise de nettoyage. GABRIELLE CEZARD/SIPA

Les forces de l’ordre ont entamé ce mardi 16 novembre le démantèlement d’un campement d’environ un millier de migrants à Grande-Synthe (Nord), sur fond de tension entre Paris et Londres autour de la question migratoire et de contestation du traitement réservé aux exilés sur le littoral français.

« Sur mon instruction, les forces de l’ordre procèdent à l’évacuation du campement illicite de migrants à Grande-Synthe ce matin », a twitté le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. « Merci aux policiers et aux gendarmes mobilisés, ainsi qu’aux agents de la préfecture du Nord qui assurent leur mise à l’abri », a-t-il ajouté.

Publicité

Selon la préfecture du Nord, le camp évacué est « le principal » de Grande-Synthe et il abrite « environ un millier de personnes ». Les migrants doivent être conduits dans des centres « ou des places d’hébergements ont été identifiées dans le Nord et d’autres régions ».

A lire aussi

Près de 1 500 personnes, en majorité des Kurdes, vivent dans le camp démantelé, situé sur une ancienne friche industrielle, d’après le cabinet du maire socialiste de Grande-Synthe, Martial Beyaert. « Il faut trouver une solution pour ces gens-là d’autant que nous allons arriver en hiver. L’Etat les empêche de prendre la mer et l’Etat les empêche de rester ici c’est un cercle vicieux », a-t-il plaidé.

« Pas de leçons à recevoir des Britanniques »

Selon le Royaume-Uni, 22 000 migrants ont réussi à rallier l’Angleterre à bord de petites embarcations depuis le début de l’année. Le bilan humain s’élève à trois morts et quatre disparus.

Cette opération est menée à un moment de tensions diplomatiques entre Paris et Londres sur la question migratoire. Gérald Darmanin s’est d’ailleurs entretenu lundi avec son homologue britannique Priti Patel, mais selon son entourage, ce démantèlement était « prévu à cette date indépendamment » de ces échanges. « C’était antérieur », insiste-t-on.

Publicité

A lire aussi

Les tensions entre l’Angleterre et la France sur la question existent depuis plusieurs mois mais elles se sont accrues vendredi dernier, après que le nombre de traversées illégales a atteint un record la veille avec 1 185 migrants ayant réussi à atteindre le sol du Royaume-Uni, qui a qualifié la situation d’« inacceptable ».

Gérald Darmanin a répondu lundi que la France n’avait « pas de leçons à recevoir des Britanniques ». Ils « doivent arrêter de nous prendre pour des punching-balls de politique intérieure », a-t-il déclaré sur CNews. « Nous ne sommes ni leurs collaborateurs, ni leurs supplétifs. »

Depuis des années, des migrants affluent sur le littoral des Hauts-de-France dans l’espoir de se rendre au Royaume-Uni, où ils pensent pouvoir trouver du travail, sans en être dissuadés par les démantèlements successifs et quasi quotidiens de leurs campements.

« Maltraitance d’Etat »

Un traitement sans cesse dénoncé par les associations qui leur viennent en aide, ainsi que par des élus. « L’Etat s’attaque à des personnes qui n’ont rien, sans jamais travailler sur les causes », a pour sa part regretté Anna, coordinatrice à Grande-Synthe de l’association Utopia 56.

Publicité

A lire aussi

Une commission d’enquête parlementaire sur les migrations a présenté ce mardi un rapport, dans lequel elle conclut que « la France est dans une maltraitance d’État » envers les migrants sur son sol, selon son président, le député Sébastien Nadot, du groupe Libertés et Territoires [rassemblant des élus du centre gauche et du centre droit, NDLR].

A Calais, deux militants associatifs poursuivent une grève de la faim depuis le 11 octobre pour dénoncer le traitement « inhumain » réservés aux migrants et réclamer un moratoire sur les démantèlements. Dans une lettre ouverte adressée au président de la République le 5 novembre, le couple de trentenaires en appelait à « l’humanité » et au « pouvoir de décision » du chef de l’Etat en demandant une nouvelle fois l’arrêt des évacuations pendant la trêve hivernale. « Notre vie est entre vos mains », ont-ils interpellé le président.

Le gouvernement a dépêché un médiateur sur place mercredi 26 octobre pour tenter, sans succès, d’apaiser la situation. A la suite de sa visite, l’Etat s’était notamment engagé à prévenir les migrants vingt-quatre heures avant les évacuations. Ce matin, le photographe Louis Witter était sur place et il affirme le contraire dans un tweet : « Les personnes n’ont pas été mises au courant de l’expulsion, ce qui était pourtant l’un des engagements de l’Etat. »

A lire aussi

Le maire de Grande-Synthe avait d’ailleurs écrit début novembre à Gérald Darmanin pour lui demander de nommer « de toute urgence » un médiateur pour sa commune. Mais il n’a pas reçu de réponse.

Sur le sujet Monde

Sujets associés à l'article

Annuler