Alors que le géant américain du commerce en ligne Amazon fait face depuis presque un an à un conflit social dans deux de ses sites allemands, c'est au tour de son concurrent germanique Zalando d'être publiquement dénoncé pour ses conditions de travail.
Etoile montante de la vente en ligne en Europe, Zalando traverse une tempête en Allemagne après la diffusion lundi 14 avril d'un reportage télévisé dénonçant les conditions de travail dans l'un de ses centres de logistique. Ce documentaire d'une vingtaine de minutes, retransmis par la chaîne RTL, relate l'infiltration incognito d'une journaliste au sein du principal site de traitement logistique de la société allemande, à Erfurt (Centre), où 2 000 salariés empaquettent et envoient quotidiennement des milliers de produits commandés d'un clic sur le Net.
Employée trois mois durant comme magasinière, celle-ci y décrit des journées harassantes, durant lesquelles elle parcourt jusqu'à 27 km à pied en huit heures pour récupérer un à un les articles dans les immenses étalages du site, les temps de repos réduits au minimum, les fouilles du personnel en fin du service ou encore l'intervention quasi quotidienne d'ambulances pour des salariés au bout du rouleau.
« Nous sommes perpétuellement soumis à des contrôles et à une énorme pression de rendement », affirme la journaliste, qui dénonce des atteintes au droit du travail, ajoutant que le fait même de s'assoir est « mal vu » par les chefs d'équipe.
Zalando, jeune pousse fondée en 2008 qui a crû à toute vitesse ces dernières années, vend chaussures, vêtements et meubles dans presque toute l'Europe de l'Ouest, les pays scandinaves et s'est lancée à la conquête de l'Est avec son nouveau site polonais. L'entreprise, qui étudie une introduction en Bourse, a vu son chiffre d'affaires progresser de 50 %, à 1,8 milliard d'euros, l'an passé, sans toutefois parvenir à dégager de bénéfice pour le moment.
La société est montée au créneau dès la diffusion du reportage pour contester ces accusations : « Il y a beaucoup d'émotion, mais il faut aller au-delà », a-t-elle réagi sur sa page Facebook. « De notre point de vue, la présentation des faits ne correspond pas du tout à la culture au sein de l'entreprise et à l'état d'esprit des salariés », a-t-elle encore affirmé sur son site Internet le lendemain, promettant toutefois d'étudier « les points sur lesquels ces critiques sont justifiées et s'il s'agit d'erreurs systématiques ou d'erreurs individuelles ».
Zalando, qui a engagé une procédure en justice contre la journaliste pour rupture du secret professionnel, affirme aussi que dans une enquête interne, effectuée en partenariat avec un institut de sondages indépendant, 88 % de ses salariés disent leur plaisir à travailler. Mais, pour Stefan Najda, porte-parole du syndicat Verdi, « les salariés ont peur, ils sont souvent employés en contrat à durée déterminée, il n'y a aucun comité d'entreprise et ceux qui en parlent sont licenciés ». « Nous n'appelons pas du tout au boycott (…) mais je conseille aux clients de ne pas avoir toujours pour seul critère le prix », ajoute-t-il.
CONFLIT SALARIAL CHEZ AMAZON
Le marchand Amazon est aussi en proie à des difficultés sociales outre-Rhin. Les salariés de deux sites allemands du groupe étaient de nouveau en grève jeudi dans le cadre d'un conflit salarial. Les salariés des centres de logistique de Leipzig (Est) et de Bad Hersfeld (Ouest) ont été appelés à cesser le travail toute la journée par le syndicat des services Verdi. Un porte-parole de Verdi a affirmé que le mouvement était « bien » suivi dans la matinée, mais sans donner de chiffre de participation.
En Allemagne, Amazon emploie 9 000 salariés, dans huit centres logistiques et deux centres de service client. Ils sont actuellement payés selon la grille des salaires du secteur de la logistique, et Verdi réclame qu'ils le soient selon les salaires en vigueur dans la distribution, plus élevés.
Amazon, pour qui l'Allemagne est le plus gros marché hors des Etats-Unis, a accordé pour le moment des primes exceptionnelles, jugées insuffisantes par le syndicat. Le dernier mouvement social remontait à la fin de mars, après plusieurs jours de grève observés en décembre, la semaine avant Noël, traditionnel pic d'activité de l'année. Le centre de Leipzig emploie quelque 2 000 salariés, celui de Bad Hersfeld 3 300 personnes sur deux sites.
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