“Créer un monde plus sûr.” Telle est la mission d’Interpol qui, aujourd’hui, regroupe 194 pays. Pourtant, se demande Le Temps dans une enquête publiée le 19 novembre, “œuvre-t-elle seulement” à cette mission ? Ne serait-elle pas de plus en plus à la solde des régimes autoritaires qui cherchent à traquer leurs opposants ?

Voilà trois ans, la “disparition” de son président chinois Meng Hongwei avait fait beaucoup de bruit. Quelques jours plus tard, Pékin avait reconnu qu’il faisait l’objet d’une enquête. Début 2020, il avait été condamné à une lourde peine de prison.

Une dérive dangereuse

Aujourd’hui, c’est la candidature à la présidence de l’institution du général émirati Ahmed Naser Al-Raisi, actuel inspecteur général au ministère de l’Intérieur, qui effraie les organisations de défense des droits de l’homme, rapporte le journal de Genève. Car celui que “tous les pronostics donnent gagnant” fait l’objet de plaintes déposées en France, “l’accusant notamment de complicité de torture”. Et, ajoute Le Temps, “des parlementaires français et britanniques, parmi d’autres, se sont alarmés de son ‘rôle direct dans de nombreuses violations des droits de l’homme, dans des cas très bien documentés’”.

Avec son élection, beaucoup craignent qu’une dérive à l’œuvre depuis plusieurs années ne s’étende. À savoir “l’utilisation abusive d’Interpol par des pays autoritaires afin de cibler leurs opposants”, souligne le quotidien.

Un problème qui touche aujourd’hui le cœur de l’organisation.”

Une profusion de “notices rouges”

Jamais autant de “notices rouges” n’ont été émises, note Le Temps. Ces demandes d’arrestation ou d’extradition s’élevaient autour de 1 200 chaque année dans les années 2000. “Leur chiffre est proche des 14 000 à présent.” Et qui en abuse ? En tête de classement, on trouve l’Azerbaïdjan, le Nicaragua, la Russie, l’Arabie saoudite, la Chine, le Mexique et… les Émirats Arabes Unis.

“Mais il y a plus”, reprend le journal. Les Émirats se sont montrés extrêmement généreux vis-à-vis d’Interpol, cherchant certainement à procurer un avantage à leur candidat.

Alors que le pays doit assurer 0,425 % du budget de l’organisation, soit un peu plus de 240000 euros, il s’est ainsi distingué par un don volontaire supplémentaire sans précédent de 50 millions d’euros.”

Une somme qui, “coïncidence”, correspond au budget nécessaire pour l’agrandissement du siège d’Interpol à Lyon. Selon Le Temps, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin vient de demander aux autorités locales de mettre la main à la poche. “Faute de quoi, a prévenu le ministre, le siège d’Interpol pourrait quitter Lyon pour… les Émirats Arabes Unis.”