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Des enfants jouent au football dans un espace ami des enfants soutenu par l'UNICEF au Burkina Faso.

Afrique de l’Ouest et du Centre : l’UNICEF dresse un bilan effrayant des violations contre les enfants

©UNICEF/UN0533600/Rooftop Productions
Des enfants jouent au football dans un espace ami des enfants soutenu par l'UNICEF au Burkina Faso.

Afrique de l’Ouest et du Centre : l’UNICEF dresse un bilan effrayant des violations contre les enfants

Droit et prévention du crime

Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) s’est préoccupé, mardi, du nombre effarant de violations commises à l’encontre des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre, notamment le recrutement, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, les viols ainsi que les enlèvements d’enfants.

Selon l’agence onusienne, cette partie du continent africain a enregistré le plus grand nombre d’enfants recrutés et utilisés par des forces armées et des groupes armés. 

« Cela représente plus de 42.000 violations entre 2005 et 2020 », a affirmé la Cheffe de la protection de l’enfance au Bureau régional de l’UNICEF en Afrique de l’Ouest et du Centre, Karin Heissler, lors d’un point de presse à Genève.

Sur cette même période, la région se classe également au premier rang - et au pire - en ce qui concerne le nombre de viols et d’autres formes de violence sexuelle commis contre des enfants. L’UNICEF décompte plus de 8.000 violations.

Marie, 17 ans, a été enlevée par un groupe armé non étatique, mais elle a réussi à s'échapper. Elle s'est inscrite dans un centre de réinsertion soutenu par l'UNICEF, où elle a reçu un soutien psychosocial et étudié la couture.
©UNICEF/UN0533597/Rooftop Prod
Marie, 17 ans, a été enlevée par un groupe armé non étatique, mais elle a réussi à s'échapper. Elle s'est inscrite dans un centre de réinsertion soutenu par l'UNICEF, où elle a reçu un soutien psychosocial et étudié la couture.

4.800 cas d’enlèvements

L’Afrique de l’Ouest et du Centre arrive également en deuxième position en termes d’enlèvements, avec 4.800 cas.  

« Ce sont des classements dont nous préférerions ne pas faire partie », a ajouté Mme Heissler, relevant que tous ces chiffres ne sont que des cas que l’ONU a pu vérifier, soulignant que le nombre réel de violations graves est bien plus élevé, car beaucoup ne sont pas signalées.

Aussi selon l’UNICEF, les tendances sont encore plus inquiétantes. Entre 2016 et 2020, il y a eu une hausse de 50 % du nombre total de violations graves vérifiées. 

« Il y a une accélération tristement exponentielle entre 2019 et 2020, du nombre de violations graves à l’encontre des enfants, avec une augmentation de 35 % en un an », a-t-elle fait valoir.

Cette année, un pourcentage « stupéfiant » de 10 % de ces enfants vivant dans des situations de conflit qui figurent dans le rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les enfants et les conflits armés ont besoin d’une aide humanitaire.

Meurtres, viols et recrutement d’enfants par les groupes armés

La situation au Cameroun, en République centrafricaine et en République démocratique du Congo, ainsi que les urgences multi-pays, notamment les crises dans les régions du Sahel central et du bassin du lac Tchad, ont des conséquences dévastatrices sur les enfants.

Selon l’UNICEF, ces chiffres ahurissants interviennent dans « une région de jeunes » : la moitié de la population de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, soit 282 millions de personnes, sont des enfants. 

« Ces filles et ces garçons sont nos prochains dirigeants et artisans du changement », a fait remarquer la responsable de l’UNICEF.

D’une manière générale, outre le recrutement et l’utilisation des enfants par les groupes armés, les autres violations graves portent sur les meurtres et les mutilations, les viols et autres formes de violence sexuelle ou les enlèvements. 

L’UNICEF s’inquiète aussi des attaques contre les écoles et des hôpitaux, ainsi que le refus de l’accès humanitaire.

Khady transporte de l'eau dans son village au Nigeria. Après avoir été enlevée et maltraitée par Boko Haram, elle a reçu l'aide de programmes de réintégration soutenus par l'UNICEF et entame le lent parcours qui lui permettra de rejoindre sa communauté.
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Khady transporte de l'eau dans son village au Nigeria. Après avoir été enlevée et maltraitée par Boko Haram, elle a reçu l'aide de programmes de réintégration soutenus par l'UNICEF et entame le lent parcours qui lui permettra de rejoindre sa communauté.

Le parcours de Khady, une Nigériane enlevée qui a réussi à s’enfuir à sa 3ème tentative

Lors de la présentation du rapport, la Cheffe de la protection de l’enfance au Bureau régional de l’UNICEF en Afrique de l’Ouest et du Centre a partagé l’histoire de Khady, une jeune fille nigériane de 18 ans, qui voulait devenir médecin.

Ses parents ont travaillé dur pour l’envoyer à l’école avec sa sœur. Après l’enlèvement de sa sœur par un groupe armé, Khady a abandonné l’école par crainte de vivre la même chose.

Malheureusement, sa sœur et ses enfants n’ont toujours pas été libérés

La jeune nigériane a ensuite épousé quelqu’un à l’âge de 15 ans et a donné naissance à des jumeaux. Son mari a été tué par un groupe armé.  

L’UNICEF explique que Khady a été ensuite enlevée par un groupe armé, violée et mariée contre son gré. Elle a réussi à s’enfuir après sa troisième tentative. Malheureusement, sa sœur et ses enfants n’ont toujours pas été libérés.

« Telle a été son enfance. Elle se reflète de manière effrayante dans toute la région », a détaillé Mme Heissler, ajoutant que Khady participe maintenant à un programme de soutien psychosocial et de formation professionnelle, ou elle devient couturière.

Le soutien de la communauté est essentiel pour aider les jeunes filles comme Marie, 17 ans, à se réinsérer dans leur communauté après avoir vécu le pire. Avec l'aide de sa famille d'accueil, Marie a réappris à faire confiance, et c'est à elle qu'elle doit
© UNICEF/UN0538109/Rooftop Productions
Le soutien de la communauté est essentiel pour aider les jeunes filles comme Marie, 17 ans, à se réinsérer dans leur communauté après avoir vécu le pire. Avec l'aide de sa famille d'accueil, Marie a réappris à faire confiance, et c'est à elle qu'elle doit l'amour et l'attention dont elle avait besoin pour reconstruire sa vie.

L’histoire de Khady se répète de manière effrayante dans la région

L’histoire de Khady est la même que celle de tant d’autres enfants, en particulier des filles, dans cette région. 

Pour les enfants comme Khady, l’UNICEF demande à toutes les parties au conflit à mettre fin aux violations graves contre les enfants. 

Il s’agit aussi d’intensifier la documentation des abus graves contre les enfants, qui vont servir lors d’un processus de reddition des comptes.

Pour les enfants recrutés et utilisés, l’UNICEF veut le transfert rapide des enfants des forces armées aux autorités civiles et aux acteurs de la protection de l’enfance afin qu’ils reçoivent une aide appropriée, en tant qu’enfants et en tant que victimes. 

De plus, des ressources financières et humaines sont nécessaires pour soutenir les filles et les femmes, y compris les survivantes de violences sexuelles et sexistes.