Logement

Encadrement des loyers : à Paris, plus d’un tiers des annonces dépassent le plafond légal

Dans son premier baromètre sur l’application de l’encadrement des loyers, la Fondation Abbé-Pierre montre que ce sont les Ier, VIIe, IX et XVIe arrondissements qui sont les plus concernés par les tarifs excessifs.
par Margaret Oheneba
publié le 29 novembre 2021 à 12h25

Ce n’est malheureusement pas une surprise : une bonne partie des locations à Paris ne respectent pas l’encadrement des loyers. D’après le premier baromètre de l’Observatoire de l’encadrement des loyers de la Fondation Abbé-Pierre, 35 % des logements parisiens proposés à la location entre le 1er août 2020 et le 1er août 2021 ne sont pas conformes au dispositif. Pour les besoins de son étude dont les résultats ont été rendus publics ce lundi, l’association qui lutte contre le mal-logement et le sans-abrisme a analysé 15 000 annonces.

C’est dans les Ier, VIIe, IXe et XVIe arrondissements que les dépassements de l’encadrement des loyers ont été le plus observés, tandis qu’ils sont moins nombreux dans les XIVe, XIXe et XXe arrondissements. L’étude montre également que les petites surfaces (de 20 mètres carrés à 40 mètres carrés) sont les plus concernées par le non-respect de l’encadrement des loyers. «Cela s’explique par la demande très forte pour ces typologies de biens, recherchées par les étudiants, les célibataires et jeunes couples travaillant dans Paris», explique Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé-Pierre, interrogé par Le Parisien. Cela avait été déjà montré dans une étude de la plateforme d’estimation immobilière Meilleurs Agents en juin.

Rétabli dans la capitale en novembre 2018 avec la loi ELAN pour une expérimentation de cinq ans, l’encadrement des loyers a établi un loyer de référence minoré de 30 % et un loyer de référence majoré de 20 % pour chacun des 80 quartiers de Paris. Les propriétaires ne peuvent en principe pas dépasser le loyer maximum, mais les contours flous de la loi elle-même permettent des dérogations dans son application.

«On ne peut pas affirmer que toutes ces annonces dépassant les plafonds sont illégales, indique Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé-Pierre, La loi autorise les bailleurs à demander un complément de loyer si le logement présente des qualités particulières (comme une vue sur la tour Eiffel ou un toit-terrasse) mais c’est censé être exceptionnel et justifié.» Ce complément de loyer - qui ne peut inclure des caractéristiques comprises dans les charges (ascenseur, etc.) mais que la loi ELAN ne définit pas précisément - peut être appliqué pour justifier un prix supérieur au plafond du loyer de référence majoré.

«Une grosse perte de pouvoir d’achat»

Mais dans les faits, les annonces qui dépassent les plafonds «proposent un loyer moyen hors charges de 1 229 € par mois, qui inclut un dépassement moyen des plafonds de loyer de 196 € par mois». Ce qui représente un manque à gagner «de près de 2 400 euros par an pour les locataires qui les subissent». «C’est une grosse perte de pouvoir d’achat avec de lourdes conséquences pour les locataires, le plus souvent des jeunes et des ménages précaires contraints d’arbitrer et de réduire leur alimentation, leur chauffage et leurs soins pour se loger… Les mêmes qui se tournent vers la distribution alimentaire», regrette Manuel Domergue.

A quelques jours de l’examen de la loi 3DS et s’appuyant sur les résultats de la Fondation Abbé-Pierre, la ville de Paris réitère ses propositions pour renforcer le dispositif, notamment «la création d’une liste précise des caractéristiques donnant la possibilité à un propriétaire d’appliquer un complément de loyer» ou «la possibilité de doubler le plafond des amendes [de 5 000 euros à 10 000 pour les personnes physiques et 15 000 euros à 30 000 pour les personnes morales]».

L’encadrement des loyers est actuellement en vigueur à Paris, Lille, dans les neuf villes de l’intercommunalité Plaine Commune, Lyon et Villeurbanne. A partir de ce mercredi, les neuf villes d’Est Ensemble (Bagnolet, Bobigny, Bondy, Le Pré-Saint-Gervais, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin et Romainville) l’appliqueront. «Le marché locatif sur le territoire d’Est Ensemble est particulièrement tendu avec une augmentation constante des loyers qui engendre d’importantes difficultés d’accès au logement pour les ménages», déclarait l’intercommunalité début novembre après la signature de l’arrêté permettant l’instauration de l’encadrement.

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