Mobilité professionnelle : les navetteurs profitent du nouvel effet TGV

Le développement du travail à distance a multiplié les « navetteurs », dont le bureau devient presque une annexe des gares TGV, y compris dans des villes moyennes bien reliées.

La formule de réduction concoctée par la SNCF pour les télétravailleurs longue distance d'adresse à ceux qui voyagent deux à trois fois par semaine avec les TGV Inoui et les trains intercités.
La formule de réduction concoctée par la SNCF pour les télétravailleurs longue distance d'adresse à ceux qui voyagent deux à trois fois par semaine avec les TGV Inoui et les trains intercités.

    Il y a 40 ans était inauguré le premier trajet en TGV entre Paris et Lyon. Depuis, les lignes à grande vitesse n’ont cessé de constituer un levier essentiel dans l’aménagement du territoire et renforcé la capacité de séduction des villes desservies. La mobilité bouleversée par la pandémie, la SNCF a même récemment créé « Mon Forfait Annuel Télétravail » : « Il marche déjà avec les voyageurs fréquents entre Paris, Lille, Tours, Le Mans ou Reims, détaille Alain Krakovitch, directeur de Voyages SNCF. Mais nous visons aussi Rennes, Nantes, Lyon, Bordeaux et Marseille. »

    Autant de métropoles bénéficiant de l’impact du TGV sur leur attractivité, qui grandit encore avec l’essor du télétravail. « L’avantage du train par rapport à l’avion, c’est que l’on peut arriver au dernier moment », souligne Alain Krakovitch. De plus, la gestion des réservations est souple et ce sont, en général, des liaisons de centre à centre-ville. Les néonomades gagnent donc du temps et peuvent avancer leurs dossiers à bord des rames. « Au Mans, une entreprise décompte même le trajet en train comme temps de travail, note Alain Krakovitch. Il est par ailleurs indispensable que nous proposions des places de coworking à nos clients dans les gares. »

    Conséquence de l’effet TGV, celles-ci occupent des positions stratégiques. Ainsi Start Way, fondé en 2008 et qui a très tôt misé sur l’implantation en région, a ouvert un tiers de ses 35 sites de bureaux partagés à proximité de stations ferroviaires. « Par exemple à Dijon ou Lille, cela permet au siège de sa société de venir à soi, dans un contexte de décentralisation du salariat », constate Grégory Ortiz, cofondateur et directeur général de Start Way. Dans cette PME d’une quarantaine d’employés, seul le comptable a un bureau fixe. « Je gère mes équipes à distance, poursuit le DG. Je vais à leur rencontre dans nos espaces près des gares, c’est très pratique. »

    Reims à moins d’une heure de Paris

    Le développement du travail à distance et l’apparition de résidences semi-principales pourraient relancer certaines gares TGV installées en rase campagne. Comme celle de Haute Picardie, à l’intersection des axes Amiens-Saint-Quentin et Arras-Compiègne, longtemps surnommée « gare des betteraves ». La nouvelle vague d’effet TGV, dans le sillage de celle qui a porté les grandes capitales régionales, profite à des villes de dimension intermédiaire : Angers, Le Mans, Angoulême, Valence, Tours… Longtemps dans l’ombre de leurs imposantes voisines, comme Nantes, Bordeaux ou Lyon, elles plaisent de plus en plus parce qu’elles sont à taille humaine et combinent secteurs économiques porteurs, qualité de vie et accessibilité.

    C’est aussi le cas de Reims, à la double desserte TGV : celle du centre-ville et, à 5 km, l’autre baptisée Champagne-Ardenne, toutes deux reliées à la capitale en moins d’une heure. « Proches de Paris, loin de ses prix ! s’enthousiasme Jean-Yves Heyer, directeur général de l’agence de développement économique Invest in Reims. Notre ville connaît un regain d’attractivité car les entreprises cherchent à faire des économies tout en étant bien connectées aux centres de décisions. Le TGV les rassure, même s’il n’est pas la panacée : c’est une condition nécessaire mais pas suffisante. Le dynamisme du territoire, la solidité de l’écosystème économique et le bassin d’emploi sont incontournables. Va-t-on pouvoir recruter sur place ? est la première question posée. » Aux déplacements à grande vitesse, il faut associer un travail de longue haleine pour trouver le succès…

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    La SNCF soigne les télétravailleurs

    Pour capter le « potentiel nomade » des adeptes du télétravail, de plus en plus nombreux depuis le début de la pandémie, la SNCF a lancé, en septembre, une offre dédiée à ces nouveaux « navetteurs », entre domicile éloigné et bureau occasionnel. « Mon forfait annuel télétravail » s’adresse à ceux qui voyagent deux à trois fois par semaine avec les TGV Inoui et les trains Intercités.

    L’abonnement inclut 250 billets par an, valables du lundi au jeudi. « En effet, nous avons remarqué que le vendredi est un jour souvent télétravaillé et que, par conséquent, beaucoup de trains sont complets dès le jeudi soir, et non plus à partir du vendredi soir ou du samedi matin, explique Alain Krakovitch, directeur de l’entité Voyages SNCF. Le tarif proposé est intéressant puisqu’il coûte 40 % moins cher que notre forfait annuel classique. »

    Le montant dépend bien sûr de la classe choisie et des distances parcourues mais, selon les estimations données en exemple par la SNCF, pour des trajets en seconde classe entre Nantes et Paris, la mensualité est de 333 euros contre 555 euros avec l’abonnement classique ou de 343 euros entre Lyon et Paris contre 572 euros. « Des accords de télétravail en entreprise peuvent comporter un remboursement partiel de cet abonnement », précise Alain Krakovitch.

    Pour plus de flexibilité, compte tenu des nouveaux usages et modes de vie, il est possible d’échanger les billets gratuitement, même sur des trains complets, et d’anticiper jusqu’à deux mois de réservations.