Trois mois et demi après la prise de Kaboul, les nouveaux maîtres de l’Afghanistan peinent à gouverner le pays. Crise sanitaire, financière, économique, mais aussi de confiance, l’émirat est déjà proche de l’effondrement. Et les femmes sont les premières à payer l’addition.
« Cela va faire quatre mois que l’on n’a pas été payés. Depuis l’arrivée au pouvoir des talibans, les conditions de travail sont très difficiles. » Gulalay Nasri, infirmière-chef depuis quinze ans à la maternité Malalai, est lasse. La soignante de 53 ans, blouse blanche et charlotte lilas, s’accorde une courte pause sur un des bancs des urgences. Chaque jour, une soixantaine de femmes accouchent dans l’atmosphère âcre de cet hôpital de Kaboul. Dans une chambre ensoleillée, trois patientes se remettent péniblement de leur césarienne. Assise sur son lit, Alima, 52 ans, tente d’allaiter son petit garçon sans nom – seul le père de cette famille de province a le droit de nommer l’enfant. L’homme est parti chercher 500 afghanis dans leur village (environ 4,60 €) pour que sa femme puisse manger. Au menu de l’hôpital, il n’y a rien pour les mères, ni lait en poudre pour les nouveau-nés. Un produit que les parents du nourrisson, trop pauvres, ne peuvent acheter. Si Alima ne reprend pas des forces, l’enfant risque la sous-nutrition.