"Ce n'est plus un phénomène marginal" : les services de réanimation face aux faux vaccinés

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"Ce n'est plus un phénomène marginal" : les services de réanimation face aux faux vaccinés

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Un patient en soins intensifs à l'hôpital de Vannes (Morbihan). Image d'illustration.
Un patient en soins intensifs à l'hôpital de Vannes (Morbihan). Image d'illustration.
© AFP - Loïc Venance

Combien de faux vaccinés en soins critiques ? La question se pose après le décès d'une femme de 57 ans dans un hôpital francilien. Elle s'était procurée un faux pass sanitaire auprès d'un médecin. Un cas qui serait loin d'être isolé selon de nombreux chefs de service de réanimation contactés par France Inter.

"Ce n'est plus un phénomène marginal", déplore le professeur Laurent Muller. Comme nombre de chefs de service de réanimation, il a vu ces dernières semaines au CHU de Nîmes plusieurs patients gravement atteints et faussement vaccinés. Un phénomène national estime-t-il : "Je le chiffrerai aux alentours de 5 voir peut-être 10%. Le quantifier est extrêmement compliqué car il y a peut-être des patients qui ne nous l'ont pas dit. En tout cas, tous les médecins qui travaillent dans des unités Covid le savent et en ont vu." 

C'est souvent quand leur état se dégrade que les malades avouent leur faux statut vaccinal, parfois trop tard. Le professeur a ainsi perdu il y a deux semaines un homme de moins de 40 ans. "Il a fini par nous le dire car se voyant dans un état respiratoire très dégradé, il s'est, à juste titre, inquiété. On est vraiment chez des patients qui ne doivent pas, en théorie, mourir de cela".  Un défaut d'information qui met en péril la bonne prise en charge des malades dès leur arrivée à l'hôpital. Mentir sur son statut vaccinal, c'est en effet se priver de l'administration précoce de traitements comme les anticorps monoclonaux

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Un statut vaccinal difficile à vérifier

"On n'a pas de moyens sûrs à 100%, de marqueurs biologiques, qui permettent de savoir si les personnes sont vaccinées ou pas", explique le professeur Olivier Joannes-Boyau, chef du pole anesthésie réanimation au CHU de Bordeaux. Il précise : "Une sérologie peut ne montrer aucun anticorps alors que la personne a été vaccinée, comme elle peut repérer des anticorps pour une personne qui est non vaccinée mais qui a été infectée antérieurement." 

Son service a accueilli deux personnes qui ont avoué être faussement vaccinées. "On est peu touchés par rapport à nos collègues du Sud-Est", concède celui qui est aussi le président du comité réanimation de la Société Française d'Anesthésie-Réanimation. 

Dans le Sud-Est, certains services ont repéré 20 voir 30% de patients qui ont des faux pass en réanimation. 

Se déclarer vacciné alors qu'on ne l'est pas, c'est aussi fausser les données sur l'efficacité des vaccins, souligne le professeur Olivier Joannes-Boyau : "Cela peut avoir des conséquences sur les décisions de santé publique qui peuvent être prises par le gouvernement. Car on pense à tort que le vaccin n'est pas efficace alors qu'une proportion importante de patients se disant vaccinés ne le sont pas." 

Selon les données de la DRESS, l'organisme de statistiques du ministère de la santé, près de la moitié des patients actuellement en réanimation ne sont pas vaccinés. Une proportion qui, selon ces chefs de services de réanimation, pourrait donc être bien supérieure.

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