« Je ne sais pas pourquoi ils m’infligent un nouveau procès, c’est trop dur », déplore Soumia Esshaymi la maman d’Othmane, les yeux humides. Depuis la perte de son fils, elle se bat au quotidien pour avancer. Chaque jour une seule obsession la poursuit, rendre justice à son enfant, faire condamner l’ascensoriste Otis et le bailleur EPIC Mantes en Yvelines Habitat. La mère de famille en est convaincue, si l’ascensoriste et le bailleur avaient répondu à leurs obligations de maintenance et de contrôle « Othmane serait toujours en vie ».


Une pétition a déjà réuni 18 000 personnes pour susciter l’intérêt du Ministère de la justice dans cette affaire. 

Le 10 octobre 2015, en fin de journée le garçonnet emprunte l’ascenseur pour descendre les sept étages et rejoindre son frère aîné dehors dans le quartier du Val-Fourré. Il restera coincé entre le 1er étage et le rez-de-chaussée. La roue de sa trottinette bloquée dans l’entrebâillement anormal des portes, l’engin se redresse, l’enfant se retrouve alors plaqué contre la paroi, le guidon sous le cou, provoquant son asphyxie. C’est l’oncle d’Othmane et des habitants du quartier qui après plus d’une heure de recherche retrouvent le corps de l’enfant.

L’ascenseur était très souvent en panne, une fois alors que j’étais enceinte il est resté bloqué pendant deux mois.

Ce dysfonctionnement au niveau des portes avait pourtant été signalé à maintes reprises du côté des résidents de l’immeuble. Mais le contrôle effectué la veille du drame par un technicien n’en avait pas fait mention. Un long combat judiciaire commence alors pour la famille endeuillée.

Un ascensoriste qui réfute sa culpabilité et un bailleur qui ne peut plus être poursuivi

En première instance fin 2018, Otis est reconnu coupable d’homicide involontaire et condamné à 60 000 euros d’amendes, condamnation confirmée en appel en mai 2020 par le tribunal correctionnel de Versailles.

Le bailleur Epic Mantes Yvelines Habitat est relaxé, mais la mise en liquidation et la dissolution de la société entre temps rendent impossible l’appel et de nouvelles poursuites. Au grand dam de la mère de famille qui y voit « une manoeuvre pour échapper à leur responsabilité. » De son côté l’ascensoriste a fait jouer un vice de procédure pour casser la décision. Otis a obtenu ainsi en décembre 2021, l’annulation de la peine par la cour de Cassation. Une nouvelle épreuve pour la famille.

Des pannes et des dysfonctionnements récurrents

« L’ascenseur était très souvent en panne, une fois alors que j’étais enceinte il est resté bloqué pendant deux mois. Il y avait toujours des problèmes » se rappelle Soumia, qui ne vit plus dans le même immeuble.

Des pannes confirmées par divers témoignages d’habitants lors des audiences. « La procédure a révélé que plus de 50% des portes d’ascenseurs du parc d’ Epic Mantes en Yvelines Habitat étaient concernées par ce dysfonctionnement. Il a fallu qu’il y ait un drame pour que les réparations soient effectuées, déplore la maman. Mais c’est la norme dans les quartiers populaires, ça ne touche pas que le Val Fourré. »

Le 2 décembre dernier, la quarantenaire a lancé une pétition en ligne, qui a déjà récolté plus de 18 000 signatures, afin de sensibiliser sur l’affaire de son fils et réclamer justice. « Aujourd’hui j’attends des condamnations exemplaires. Je le dois à mon fils. Et aussi parce que ce genre d’accidents ne dois plus jamais se reproduire » confie Soumia, qui pourra alors enfin commencer son travail de deuil.

Céline Beaury 

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