POLITIQUE - Comment les banlieues françaises s’apprêtent-elles à voter à la prochaine présidentielle? Selon une étude de l’Ifop parue ce vendredi 21 janvier, comme dans le reste du pays, la droite et l’extrême droite semblent en pole position pour arriver en tête. Seule exception, les quartiers prioritaires de la ville -les plus pauvres de France- où Jean-Luc Mélenchon est leader.
L’enquête pour ”Écran de Veille” interroge le vote des “banlieues pauvres”, définies comme “les communes situées en périphérie d’une agglomération qui affichent un niveau de vie médian annuel par habitant qui les classe parmi les 10% des banlieues les plus pauvres de France.”
La gauche plafonne à 36% avec Mélenchon en tête
Elle a été réalisée entre le 13 et le 16 décembre, soit avant la candidature de Christiane Taubira et le retrait d’Arnaud Montebourg. Mais elle prend en compte tous les autres candidats déclarés pour 2022, de Nathalie Arthaud à Nicolas Dupont-Aignan, ainsi qu’Emmanuel Macron, bien qu’il ne soit toujours pas officiellement dans la course.
Le résultat est net: les gauches, toutes confondues, obtiennent à peine plus d’un tiers (36%) des voix, loin derrière leur socle de 2012 quand elles séduisaient plus de la moitié (54%) des électeurs. Mécaniquement, la droite dans son ensemble recueille, elle, 49% des intentions de vote contre 40% en 2012, soit dix points de plus qu’il y a vingt ans.
Même l’extrême droite de Nicolas Dupont-Aignan, Éric Zemmour et Marine Le Pen s’offre une percée. Ils récoltent à eux trois 35% des intentions de vote (contre 28,4% en 2017, sans Éric Zemmour). “Dans ces territoires marqués par des niveaux élevés de chômage et de pauvreté, mais aussi d’insécurité et déficit des services publics, les sirènes des candidats aux discours identitaires ou sécuritaires portent de manière notable, empêchant les ‘gauches’ d’y retrouver l’attrait qui fut le leur pendant longtemps”, notent les auteurs de l’enquête.
L’exception des quartiers “très pauvres”
Si l’on prend seulement les QPV, quartiers prioritaires de la ville, décrits dans cette enquête comme des “villes périphériques très pauvres”, la gauche, en revanche, arrive en tête avec 56% des intentions de vote. Jean-Luc Mélenchon capte encore une grande partie de cet électorat avec 37% (contre 11% dans les autres quartiers). Loin derrière, Anne Hidalgo avec 6%, Fabien Roussel (5%) et Yannick Jadot qui enregistre le moins bon score avec 3% des intentions de vote (contre 7,5% au niveau national).
Le rapport de force s’inverse dans les quartiers non classés “QPV” où l’extrême droite domine (42%), avec une large préférence pour Marine Le Pen (26%) face à Éric Zemmour (15%). À droite, la candidate LR Valérie Pécresse gagne quelques points par rapport à son prédécesseur François Fillon (14%), mais reste loin derrière les candidats d’extrême droite. Après le quinquennat Macron, le centre recule et perd 5 points d’intentions de vote dans les banlieues populaires.
Le pouvoir d’achat et l’insécurité en priorités
Parmi les préoccupations des Français dans ces quartiers testées par l’Ifop, la question du pouvoir d’achat arrive sans surprise parmi les premières avec 76%, juste derrière la santé (80%). Les questions d’insécurité et de terrorisme sont aussi très importantes pour les électeurs, comme dans le reste du pays avec respectivement 74% et 70% des sondés qui se disent préoccupés par ces sujets.
Viennent ensuite l’éducation (68%), la lutte contre le chômage (62%) et la précarité (60%). La sauvegarde des services publics est aussi réclamée par 51% de la population.
En 2012, l’ensemble des candidats de gauche (Nathalie Arthaud, Philippe Poutou, Jean-Luc Mélenchon, François Hollande, Éva Joly) avaient su séduire 54% des votants des banlieues populaires, avec un fort avantage pour François Hollande. Mais 2017 a marqué une rupture. Les gauches, toutes sensibilités confondues, n’ont réussi à séduire que 38% de l’électorat, malgré la forte progression des partis plus radicaux (+13 points), particulièrement la France Insoumise.
La perte de vitesse de la gauche dans les banlieues n’est guère différente à l’échelle nationale. À ce jour, aucune enquête d’opinion ne laisse penser que l’un des candidats de gauche puisse accéder au second tour. Il reste moins de trois mois pour tenter d’inverser la tendance.
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