Personnes âgées "rationnées", abandonnées dans leurs excréments... Ce que l'on sait sur l'affaire des Ehpad Orpea

La parution d'un livre-enquête dénonçant l'obsession de la rentabilité au sein du groupe privé de maisons de retraite Orpea a entraîné lundi 24 janvier une chute brutale de son cours à la Bourse de Paris. Voici ce qu'il faut savoir sur cette affaire.

La rédaction avec AFP Publié le 25/01/2022 à 10:10, mis à jour le 25/01/2022 à 10:34
Dans une clinique Orpea, dans le Var. Illustration. Photo archives Frank Muller

1. Le livre-enquête d'un journaliste

Dans "Les Fossoyeurs", à paraître mercredi chez Fayard et dont Le Monde a publié lundi les "bonnes feuilles", le journaliste indépendant Victor Castanet décrit un système où les soins d'hygiène, la prise en charge médicale, voire les repas des résidents sont "rationnés" pour améliorer la rentabilité du groupe d'Ehpad privés Orpea.

Et ce alors que les séjours sont facturés au prix fort, près de 6.500 euros par mois pour une chambre d'"entrée de gamme" à la résidence "Les Bords de Seine" de Neuilly, pointe ainsi l'auteur.

Or les maisons de retraite, même privées, bénéficient d'importants financements publics, de la part de l'Etat et des conseils départementaux, souligne le journaliste, pour qui "au moins de manière indirecte, une partie de cet argent public ne va pas au bénéfice des personnes âgées".

"J'ai obtenu des témoignages selon lesquels ces dysfonctionnements trouvaient leur origine dans une politique de réduction des coûts mise en place à un haut niveau" de l'entreprise, a résumé Victor Castanet auprès de l'AFP.

Une auxiliaire de vie, dont l'auteur a recueilli le témoignage, raconte par exemple à quel point elle devait "se battre pour obtenir des protections" pour les résidents.

"Nous étions rationnés: c'était trois couches par jour maximum. (...) Peu importe que le résident soit malade, qu'il ait une gastro, qu'il y ait une épidémie", raconte cette femme, Saïda Boulahyane.

Le livre revient également sur les conditions de la mort de l'écrivaine et comédienne Françoise Dorin début 2018, des suites d'une escarre mal soignée, moins de trois mois après son entrée dans un des établissements du groupe Orpea.

2. La chute en Bourse

Après la publication de ces accusations dans Le Monde, le titre Orpea à la Bourse de Paris a dévissé de plus de 16%, avant que sa cotation ne soit suspendue, à la demande du groupe.

D'autres gestionnaires privés de maisons de retraite ont également fait les frais de cette polémique. Au cours de la séance, le titre Korian a perdu plus de 14% et celui de LNA santé plus de 5%, dans un marché globalement en très forte baisse de près de 4%.

3. La réponse d'Orpea

"Nous contestons formellement l'ensemble de ces accusations que nous considérons comme mensongères, outrageantes et préjudiciables", a réagi dans un communiqué la direction d'Orpea, fustigeant des "dérives sensationnalistes" et une "volonté manifeste de nuire". 

Le groupe indique avoir saisi ses avocats pour donner "toutes les suites, y compris sur le plan judiciaire", à la publication du livre, afin "de rétablir la vérité des faits".

"Nous avons toujours placé la qualité avant le financier", s'est défendu lors d'un point-presse le directeur général du groupe, Yves Le Masne.

Selon lui, les témoignages à charge recensés dans le livre émanent d'une minorité d'anciens collaborateurs de l'entreprise qui ont nourri une "rancœur" à son encontre après l'avoir quittée.

Le directeur général pour la France, Jean-Christophe Romersi, a formellement démenti les accusations portant sur de supposés rationnements, notamment des protections hygiéniques des résidents.

"Nous n'avons jamais demandé le moindre rationnement. Il n'a jamais été question de sacrifier la moindre prise en charge, ça ne correspond ni à nos directives, ni à nos valeurs", a-t-il insisté.

4. Les accusations de Mediapart

La direction a également dû répondre à d'autres accusations publiées lundi, cette fois par Mediapart.

Selon le média d'investigation en ligne, le groupe a commis de fréquentes irrégularités dans le recrutement de ses salariés en CDD, en mentionnant sur leur contrat, comme motif d'embauche, le remplacement de collaborateurs en CDI, qui, dans les faits, "n'existeraient pas".

"C'est faux, il n'y a jamais eu de faux contrats de travail", a répondu lundi Yves Le Masne, pour qui l'entreprise n'a aucun intérêt à privilégier les embauches en CDD.

Dans un contexte récurrent de pénurie de personnel, ce sont souvent les salariés eux-mêmes qui refusent un CDI pour garder leur liberté, selon lui.

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Nice-Matin

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