Tribune 

Un échangeur près d’une école à Saint-Denis : ce scandale caché des jeux Olympiques 2024

Collectif

Afin d’améliorer la desserte du village des athlètes, un échangeur autoroutier est en cours de construction près d’un groupe scolaire de Seine-Saint-Denis. Dans une tribune à « l’Obs », l’association Respire et des parents d’élèves dénoncent un projet qui risque de gravement nuire à la santé des enfants.

Cet article est une tribune, rédigée par un auteur extérieur au journal et dont le point de vue n’engage pas la rédaction.

« Le sport est bon pour la santé. » Souvent entendue, toujours mise en avant, cette phrase est un argument habituel des politiques de santé publique. Pourtant, les jeux Olympiques et paralympiques, emblème international du sport, qui auront lieu à Paris en 2024, cachent une réalité beaucoup plus néfaste pour la santé de 600 enfants de Seine-Saint-Denis.

La Dirif (Direction interdépartementale des Routes d’Ile-de-France) et la Solideo (Société de Livraison des Ouvrages Olympiques) financent et construisent actuellement un échangeur autoroutier aux abords du groupe scolaire Pleyel-Anatole France à Saint-Denis, afin de faciliter l’accès au futur village olympique des athlètes. Prévue en 2023, la mise en service de l’échangeur encerclera le groupe scolaire et sa cour de récréation entre des bretelles d’accès d’autoroute.

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Malgré les alertes et la mobilisation des riverains et parents d’élèves, notamment sur les risques liés à la pollution de l’air, ce projet est mené depuis trois ans sans réelle concertation et sans aucune transparence à leur égard.

En France, 3 enfants sur 4 respirent un air pollué

Ce projet porte pourtant un risque sanitaire intrinsèque. Les enfants sont les premières victimes de la pollution de l’air. D’après l’UNICEF, trois enfants sur quatre respirent un air pollué en France. Ils respirent plus vite que les adultes et leur organisme, en cours de développement, est d’autant plus sensible à la pollution de l’air, notamment celle issue du trafic routier. Construire un imposant échangeur autoroutier à deux pas d’une école est une aberration sanitaire, alors même que le centre scolaire Pleyel est déjà exposé à des concentrations en dioxyde d’azote (NO2) qui dépassent cinq fois la recommandation de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

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Ce projet est un scandale sanitaire et politique. L’aveuglement coupable des politiques et l’absence totale de prise en compte du risque sanitaire sont regrettables et incompréhensibles, tout autant que le sont les « solutions » aujourd’hui proposées pour protéger les enfants. Les méthodes de la Solideo, où siègent notamment l’Etat et des élus des collectivités territoriales (Ville de Paris, métropole du Grand Paris, Région Ile-de-France, conseil départemental de Seine-Saint-Denis, ville de Saint-Denis, etc.) illustrent les manquements et l’insuffisance de la France dans sa politique de lutte contre la pollution de l’air. La récente condamnation de l’Etat en août 2021 à 10 millions d’euros d’amende par le Conseil d’Etat en est le dernier exemple le plus marquant.

Il faut déplacer l’école ou modifier le tracé

Nous ne pouvons que nous demander quand les décideurs publics prendront sérieusement en compte la santé de la population dans l’élaboration des projets urbains. Aujourd’hui, en Seine-Saint-Denis, ils continuent à s’entêter et à s’aveugler pour faire passer les grands projets des jeux Olympiques et paralympiques au seul bénéfice d’une facilité d’accès pour des athlètes. Il est encore temps de faire preuve de courage et de bienveillance en trouvant une solution alternative pour déplacer l’école ou modifier le tracé de l’échangeur autoroutier.

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Il est également essentiel de ne pas retarder la sortie du diesel, prévue en 2024 dans une grande partie de la métropole du Grand Paris, et qui permettra de lutter efficacement contre la pollution au NO2. A défaut, les élus porteront l’immense responsabilité d’avoir livré 600 enfants à notre ennemi commun qu’est la pollution de l’air.

Signataires :

- Tony Renucci, directeur général de Respire

- Pierre Dornier, coordinateur de la Clean Cities Campaign en France

- Anne Pieter, coprésidente FCPE 93

- Isabelle Lacroix, coprésidente FCPE 93

- Hamid Ouidir, administrateur FCPE 93 et référent pollution de l’air

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