"Fugues" en série dans les hôpitaux psychiatriques : pourquoi autant de malades parviennent-ils à s’échapper ?

  • Une chambre de l'hôpital Marchant à Toulouse.
    Une chambre de l'hôpital Marchant à Toulouse. DDM - FREDERIC CHARMEUX
Publié le , mis à jour

l'essentiel Vendredi 28 janvier, un individu dangereux s'est échappé de l'hôpital Marchant. Il s'agit du quatrième qui parvient à déjouer la surveillance d'une unité psychiatrique à Toulouse en une semaine. Comment expliquer ces fugues d'établissements de santé ? La Dépêche vous répond. 

En l'espace d'une semaine, quatre individus considérés comme très dangereux sont parvenus à s'échapper d'hôpitaux psychiatriques publics toulousains. Un homme dangereux s'est ainsi enfui de l'hôpital Marchant vendredi 28 janvier en début d'après-midi. Des fugues en série qui inquiètent les autorités politiques et sanitaires.

"Des sorties sans autorisation, il y en a régulièrement"

Pour tenter de comprendre ces "fugues", il est nécessaire de creuser du côté des difficultés ces établissements de santé mentale et de s'adresser aux soignants qui ont choisi cette spécialité souvent décrite comme le "parent pauvre de la médecine" et que d'autres qualifient même d'"abandonnée par les pouvoirs publics".

"Des sorties sans autorisation - le terme administratif que nous utilisons pour désigner ce que vous appelez plus communément 'des fugues' -, il y en a régulièrement, trois par semaine en moyenne rien que dans l'établissement où je travaille", affirme Delphine Glachant, psychiatre et présidente de l'Union syndicale de la psychiatrie. Il faut savoir qu'un patient qui veut faire le mur, va se débrouiller pour le faire, surtout quand ce patient a été interné contre son gré."

"L’hôpital psychiatrique est un lieu de soin et non de détention"

"Parfois, ils nous volent nos clefs ou nos badges pour sortir, raconte Lison*, interne en psychiatrie. Parfois, ils escaladent juste le muret qui longe le parc de l'hôpital." Car ces patients internés en hôpital psychiatrique ne sont pas enfermés : "La demande qui est faite par la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, c'est que les unités de soin soient ouvertes", argue la représentante syndicale. "Dans les faits, si en tant que professionnel on estime que la personne n’est pas en danger (risque suicidaire) ou n’en présente pas pour les autres, on n’a pas le droit légalement de les enfermer, complète l'interne. On les autorise donc à déambuler dans les couloirs ou à se balader dans le parc qui n’est pas surveillé." 

La psychiatrie est organisée par secteur : les personnes sont internées avec ceux qui se trouvent dans la même zone géographique qu'eux. Dans une même unité, peuvent donc se côtoyer des patients internés après un meurtre, une tentative de meurtre, une demande du préfet ou encore sur leur propre demande. Ne sont envoyés en "unité pour malade difficile" que ceux qui se trouvent dans des phases aiguës de leur maladie. "Ce qu'il faut retenir, c'est que l’hôpital psychiatrique est un lieu de soin et non de détention", assure Delphine Glachant.

Une dualité public-privé

Pour expliquer le nombre important de sorties non autorisées, les deux professionnelles arguent aussi le manque d'effectif "depuis longtemps et encore plus en ce moment". "C'est catastrophique actuellement, affirme la psychiatre diplômée. Tous les personnels sont touchés : infirmiers, aides soignants, praticiens... Il y a le Covid, mais il y a aussi une désaffection pour ces métiers et les gens qui quittent les hôpitaux publics tellement les conditions de travail sont dégradées." Or, c'est dans les hôpitaux publics que sont internés la plupart des patients hospitalisés sous contrainte.

Une dualité public-privé confirmée par sa consœur : "Si j’avais un proche à hospitaliser, je n’hésiterais pas, je le mettrais dans le privé. Là-bas, les pathologies des autres malades sont moins lourdes et les effectifs souvent plus fournis."

Mais surtout, "ces sorties non autorisées font partie de la vie d'un hôpital psychiatrique" : "Dans la réalité, et les chiffres le montrent, ces sorties peuvent être graves pour le patient, mais pas pour autrui. Ces personnes sont plus souvent victimes de violences et moins auteurs, gage Delphine Glachant. Présenter ces personnes comme des criminels, alors qu'elles sont soignées actuellement, c'est très stigmatisant. Il faudrait plutôt s’affoler du fait que c’est de plus en plus difficile de soigner les gens en hôpital psychiatrique du fait du manque de moyens et de mains."

*Le prénom a été modifié
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Les commentaires (23)
Paul Il y a 2 années Le 29/01/2022 à 11:44

les nouvelles à la télé et sur les journaux dans le hall

elchurrocalientedos Il y a 2 années Le 29/01/2022 à 10:40

Qui est responsable de la sécurité ?

trabucaire Il y a 2 années Le 29/01/2022 à 09:57

Et en plus.....il ne doit pas avoir le ""pass vaccinal""......