Les glaciers recèlent moins d’eau qu’estimé, selon une étude

Glaciers fonte des glaces

Fissures sur la paroi du glacier Perito Moreno, dans le parc national Los Glaciares, dans la province de Santa Cruz en Argentine, le 10 mars 2016 © AFP/Archives Walter Diaz

Paris (AFP) – Les glaciers de montagne, qui fondent sous l’effet du réchauffement, contiennent moins de glace que ce que pensaient les scientifiques, selon une étude publiée lundi, qui insiste sur les risques d’accès à l’eau dans certaines régions, comme les Andes.

« La découverte qu’il y a moins de glace est importante et aura des conséquences pour des millions de personnes à travers le monde », qui dépendent des glaciers pendant l’été pour leur approvisionnement en eau, explique dans un communiqué un des auteurs, Mathieu Morlighem, du Darmouth College aux États-Unis.

Loin d’être immobiles, les glaciers sont des masses de glace qui s’écoulent sous l’effet de leur poids. Connaître cette vitesse d’écoulement permet donc de déterminer la masse du glacier. Mais jusqu’à présent, « on ne connaissait pas bien cette vitesse », explique à l’AFP l’auteur principal de l’étude Romain Millan, de l’Institut des Géosciences de l’environnement à Grenoble (France).

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Alors les chercheurs ont passé au crible des centaines de milliers d’images satellite de glaciers, comparant l’avancée dans le temps des crevasses et des rochers pour mesurer cette vitesse d’écoulement et aboutir à un atlas estimant l’épaisseur de 98% des plus de 200.000 glaciers de montagnes de la planète (ce qui exclut les gigantesques glaciers en bordure des calottes glaciaires).

Au niveau mondial, les résultats publiés dans la revue Nature Geoscience montrent que ces glaciers sont moins épais qu’on le pensait.

« Si l’ensemble des glaciers de montagne venaient à fondre, leur contribution à l’élévation du niveau de la mer serait 20% plus faible » qu’estimé auparavant, précise Romain Millan. Soit une contribution potentielle d’environ 26 cm.

Une bonne nouvelle ? Pas vraiment. La fonte des glaciers de montagne est marginale en terme de hausse de niveau de la mer, face au potentiel des calottes du Groenland et de l’Antarctique.

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« Même si les glaciers contiennent assez de glace pour faire augmenter le niveau de la mer de quelque 25 cm, il y a assez de glace dans les calottes glaciaires pour augmenter ce niveau de plus de 60 mètres », note ainsi Martin Siegert, co-directeur du Grantham Institute pour le changement climatique et l’environnement, pas impliqué dans l’étude.

« Disparaître plus tôt »

En revanche, l’impact est potentiellement dévastateur pour les populations qui dépendent des glaciers pour boire, pour l’agriculture ou pour l’énergie hydraulique.

Certes, l’étude montre des différences régionales importantes et certains glaciers sont bien plus volumineux qu’estimé, en particulier ceux de l’Himalaya qui contiennent 37% plus de glace.

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Mais à l’inverse, les réserves en eau des glaciers des Andes sont environ 27% inférieures à ce qui était estimé précédemment.

Conséquence: par exemple, dans le bassin de La Paz en Bolivie, où un tiers des ressources en eau proviennent de la fonte des glaces lors de la saison sèche, « il est inévitable que le réservoir plus réduit de glace aura un impact plus tôt qu’anticipé », écrivent les chercheurs.

Sous l’effet du réchauffement de la planète, les glaciers fondent, de plus en plus vite. Dans un rapport spécial en 2019, le groupe d’experts de l’ONU sur le climat (Giec) estimait que les glaciers de basse altitude comme ceux des Alpes pourraient perdre 80% de leur volume d’ici 2100 et que beaucoup pourraient disparaître totalement.

Mais cette nouvelle étude pourrait changer la donne. « Nous appelons la communauté des glaciologues à utiliser ces nouvelles estimations pour réestimer l’évolution des glaciers », indique Romain Millan.

« Parce qu’il y a moins de glace stockée dans les glaciers qu’escompté, ils vont disparaître plus tôt qu’attendu », commente Andrew Shepherd, directeur du Centre d’observation et de modélisation polaire à l’université de Leeds, qui n’a pas pris part à l’étude.

Alors les communautés qui dépendent de cette eau « vont subir les pires effets du changement climatique plus tôt », poursuit-il.

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Les auteurs de l’étude notent toutefois que les informations sur les glaciers sont toujours partielles et mériteraient d’être confirmées par de la collecte de données sur le terrain, difficile pour des glaciers qui s’étendent sur plusieurs pays, note Romain Millan.

Pour aider en attendant les États à mieux se préparer à l’impact du réchauffement climatique sur les glaciers, les chercheurs travaillent sur des simulations de l’évolution de la ressource en eau dans le temps.

© AFP

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