Lycéennes enlevées au Nigeria: un silence coupable
INTERNATIONAL - Dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 avril 2014, un commando islamiste du groupe Boko Haram enlevait 129 lycéennes dans le nord du Nigeria. Les médias et les politiques acceptent pourtant de passer sous silence un événement inadmissible.
Dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 avril 2014, un commando islamiste du groupe Boko Haram enlevait 129 lycéennes dans le nord du Nigeria. Depuis? Rien ou si peu dans les médias occidentaux qui semblent se résigner à passer sous silence cet enlèvement d'une barbarie inédite et le sort de ces adolescentes, dont le seul tort aura été de se rendre à l'école.
Il faut suivre de près les affaires internationales pour glaner ici et là quelques informations sur le calvaire de la centaine de lycéennes enlevée en début de semaine à Chibok. Malgré les informations contradictoires distillées au compte-gouttes par le gouvernement nigérian, il semblerait que 14 jeunes filles seulement aient été libérées. Le sort des 115 autres reste un mystère. Et glace le sang quand on connait les méthodes de Boko Haram.
Un sort qui ne semble guère intéresser les médias occidentaux. Trop loin le Nigeria? Insignifiant l'enlèvement d'une école entière de jeunes filles? Ou est-ce au contraire l'énormité du drame qui se joue devant nous qui tétanise les rédactions? La monstruosité de ce rapt qui ne vise rien de moins qu'à faire comprendre aux petites filles nigérianes que leur place n'est pas sur un banc d'école?
Il est pourtant urgent de réagir pour assurer de notre solidarité les lycéennes enlevées (et au-delà toutes les écolières qu'on cherche à entraver), montrer aux fous de Boko Haram le dégoût qu'ils inspirent au monde, et rappeler aux autorités d'Abuja que la planète entière scrute leur réponse face à cette barbarie sans nom.
Pourquoi ces lycéennes ont été enlevées par les fanatiques de Boko Haram? Car elles étaient coupables d'avoir cherché à s'éduquer et à sortir des carcans d'un fondamentalisme religieux qu'ils veulent imposer à tout le Nigeria. Ces adolescentes méritent notre soutien et notre aide.
Même s'il est toujours difficile de comparer les drames, il y a quelque chose de dérangeant à voir comment le monde entier s'est passionné pendant deux semaines pour les recherches autour du Boeing de la Malaysia Airlines (pour lequel personne ne pouvait hélas quoi que ce soit) et d'être témoin aujourd'hui du silence généralisé qui recouvre cette barbarie sans précédent.
Médias, politiques, chacun d'entre nous, simples citoyens, nous pouvons aider ces lycéennes en prenant la parole. Les intégristes de tous poils doivent comprendre qu'on ne peut pas impunément violer le sanctuaire de l'école et s'en prendre à des enfants. Le président nigérian, Goodluck Jonathan, doit intervenir avec infiniment plus de vigueur pour stopper les exactions de Boko Haram.
Surtout, ces jeunes filles livrées en pâture à la folie meurtrière d'un groupuscule d'enragés doivent savoir que le cœur du monde bat au rythme de leur calvaire. Et toutes les petites filles de la planète comprendre qu'on ne les empêchera pas de s'instruire à cause de leur sexe.
Ne restons pas impuissant face à la barbarie. Ne donnons pas raison aux criminels qui croient en leur impunité parce qu'ils s'attaquent à des enfants loin des grands centres urbains (et donc des caméras). Chacune de nos filles pourrait être une lycéenne de Chibok.
"Les signataires par le sang" de Mokhtar Belmokhtar - Il était l'un des chefs historiques d'Aqmi, avant d'entrer en dissidence en octobre dernier pour créer sa propre katiba (unité combattante), les "Signataires par le sang", proche du Mujao. Selon les experts, les hommes de la katiba de Belmokhtar, si aucun chiffre fiable n'existe, se comptent en dizaine plutôt qu'en centaines, avec une forte proportion de Maliens et de Mauritaniens. Surnommé "le borgne" (il a perdu un oeil en Afghanistan en 1991), l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, alias Khaled Aboul Abbas, est à l'origine de l'attaque contre un site gazier dans son pays suivie d'une prise d'otages. Vétéran de la rébellion islamiste dans le Sahara algérien, il a de multiples surnoms : le "borgne", l'"insaisissable", "Mister Marlboro". Comme autant de témoins de la place qu'il occupe dans l'histoire du djihad algérien. Il n'a même pas vingt ans lorsqu'il part s'entraîner dans les camps d'entraînements afghans, qui n'étaient pas encore devenu Al-Qaïda. De retour en Algérie pour la guerre civile en 1993, il rejoint le Groupe islamiste armé algérien, avant de participer en dissidence, cinq ans plus tard, à la fondation du Groupe salafiste qui deviendra Aqmi en 2007. Il règne alors en maître sur les routes clandestines du grand sud saharien et jongle entre les actes terroristes, les opérations de brigandage et la contrebande. Pour financer ses activités il devient spécialiste du rapt d'Occidentaux. Il est d'ailleurs présumé responsable de la mort de quatre Français en Mauritanie en décembre 2007.