Son nom fait loi. Olimpia Coral Melo a 30 ans et a fait trois tentatives de suicide depuis que les images de son corps d’amante sont devenues virales sur les réseaux sociaux. Elle a été filmée en pleins ébats avec un petit ami qui l’a trahie et l’a rendue célèbre malgré elle.

Enfermée dans son garage – Apple n’est pas la seule chose qui soit née dans un garage – elle a rédigé ce que le Mexique a appelé la “loi Olimpia” [entrée en vigueur en juin], qui punit ceux qui enregistrent et diffusent des images à caractère sexuel sans le consentement des personnes concernées.

Plusieurs individus ont déjà été mis derrière les barreaux grâce à cette loi. Le visage d’Olimpia, qu’elle avait un jour souhaité effacer du paysage, fait aujourd’hui partie de ceux des 100 personnes les plus influentes du monde [en 2021], selon le magazine Time. “Il faut que tout le monde l’entende dans toutes les langues : le corps d’une femme n’est pas un objet, ni hors ligne ni en ligne, déclare-t-elle. Les agissements personnels sont le plus gros problème à cause des algorithmes, qui sont extrêmement sexistes et patriarcaux.”

C’est arrivé quand elle avait 18 ans, à Huauchinango, une ville d’environ 100 000 habitants perchée dans les montagnes, à trois heures de la capitale de l’État, Puebla, au centre du pays. Elle décrit :

Une ville où on vous demande encore de quelle famille vous venez. Une ville très conservatrice, où le dimanche on va à l’église et au parc avec les enfants.”

Les images de son corps nu ont inondé Internet, en 2012. Elle a voulu “disparaître, ne jamais être née”. Elle a été sauvée par sa mère et par quelques bonnes leçons de féminisme qui, aujourd’hui, coulent à flots de sa bouche. C’est une activiste, qui donne des conférences et organise des ateliers : “Je parle aux gens de l’Internet patriarcal”, dit-elle.

Quand avez-vous rencontré le féminisme ?

Ce n’est pas une chose qu’on vous apprend à l’école. On ne vous apprend pas à être libre, à vous battre, seulement à vous taire et à serrer les cuisses : ne ris pas comme ça, ne te comporte pas comme ça, ne provoque pas les hommes. J’ai rencontré le féminisme lorsque ma mère, au lieu de me gifler, m’a apporté son soutien.

Elle était ferme, déterminée, même si elle pleurait. Elle a soulevé mon menton et m’a dit : “Je mourrais de honte si ma fille était une voleuse, une meurtrière ou même si elle avait maltraité un chien. Mais il n’y a pas à avoir honte d’un corps nu.” Puis elle a désigné une par une toutes les cousines qui se trouvaient dans la pièce : “Elle baise, elle aussi, moi aussi, le président aussi, ce n’est pas un crime. Tu n’as rien fait de mal et tu n’es coupable de rien.” Ça m’a permis de relever la tête.

Comment met-on fin à une telle épreuve ?

Avec le féminisme. Le féminisme m’a sauvé la vie. Si j’avais su tout ce que je sais aujourd’hui, je n’aurais peut-être pas tenté de me suicider. Je n’aurais pas souffert comme j’ai souffert. Je ne me serais pas rejetée moi-même. Je n’aurais pas été dégoûtée par mon propre visage et ma propre peau. Je ne voulais même pas m’appeler Olimpia.

Pourquoi vous a-t-on donné ce prénom ?

C’était celui de mon arrière-grand-mère, que ma mère adorait. Elle me l’a dit il y a deux ans, dans un avion. On parlait déjà au Mexique de la “loi Olimpia”, et je ne savais pas pourquoi je portais ce prénom.

Avez-vous encore peur du téléphone portable ?

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Carmen Morán Breña
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