L’infertilité est-elle encore un tabou ?

Couple face au résultat d'un test de grossesse. ©Getty - d3sign
Couple face au résultat d'un test de grossesse. ©Getty - d3sign
Couple face au résultat d'un test de grossesse. ©Getty - d3sign
Publicité

Un rapport sur l'infertilité en France est remis lundi 21 février 2021 au ministre de la santé Olivier Véran. Dans un contexte où le recours à l'assistance médicale à la procréation augmente, que sait-on aujourd'hui de l'infertilité et de ses causes ? Le sujet reste-t-il encore tabou ?

Avec

Lundi 21 février 2022, Olivier Véran, ministre de la santé et Adrien Taquet, Secrétaire d'État chargé de l'Enfance et des Familles, se verront remettre un rapport sur l’infertilité. En France, un couple sur sept est confronté à l’infertilité. Dans un contexte où le recours aux techniques d’Assistance Médicale à la Procréation est élargi et augmente, le tabou de l’infertilité est-il en train de tomber ?

Guillaume Erner reçoit Salomé Berlioux, co-auteure avec le professeur de médecine Samir Hamamah, du "Rapport sur les causes d’infertilité. Vers une stratégie nationale de lutte contre l’infertilité", remis lundi 21 février 2022 au ministre de la santé Olivier Véran et au Secrétaire d'État chargé de l'Enfance et des Familles, Adrien Taquet.

Publicité

Salomé Berlioux est aussi l'auteure de La peau des pêches (ed. Stock), fondatrice et directrice générale de l’association " Chemins d’avenir", qui informe, accompagne et promeut les collégiens, lycéens et étudiants de la France périphérique (zones rurales, petites et moyennes villes et certaines franges du périurbain).

Vous pouvez écouter l'interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

Du tabou au sujet de santé publique

Pourquoi fallait-il un rapport ?

Il y’a d’abord une raison quantitative. Aujourd’hui en France, 3,3 millions de français et de françaises sont directement touchés par l’infertilité. 1 couple sur 4 en désir d’enfant ne parvient pas à concevoir au-delà de douze mois.

Une deuxième raison est que les ministres ont souhaité que ce sujet qui, jusqu’à présent restait dans la sphère privée et relevait de l’intime, puisse être mis sur la place publique.  Il s’agit aussi d’un sujet de société et de santé publique majeur qui a des conséquences certes individuelles, mais aussi collectives, économiques, sociales, démographiques, etc… Ce rapport est le premier qui traite de l’infertilité en France.

La peau des pêches revient aussi sur le sujet de l’infertilité.

En écrivant "La peau des pêches" qui est un récit littéraire qui raconte l’histoire d’amour d’Aurélien et de Diane qui se rencontrent, veulent avoir un enfant et se heurtent à l’impossibilité de fonder une famille, je souhaitais, en me basant sur une expérience personnelle mais aussi sur des milliers de témoignages que j’ai reçus avant et après le livre, vraiment appuyer sur l’importance de ce sujet.

Les facteurs croisés de l’infertilité

A partir de quand considère-t-on qu’un couple est infertile ?

Un couple infertile est un couple qui ne peut pas concevoir sans avoir recourt à l’aide médicale à la procréation. Il ne faut pas confondre avec la stérilité.

L’objectif des travaux que nous avons menés avec le professeur Samir Hamamah, avec un comité d’experts composé à la fois de médecins et de représentants de la société civile, et à travers plus de 130 auditions que nous avons faites depuis octobre dernier (octobre 2021), était vraiment de travailler sur les causes de cette infertilité. Nous avons mis en avant ces grandes causes qui sont de trois ordres, à la fois médicales, environnementales et sociétales et qui sont très souvent imbriquées aujourd’hui.

Comment expliquer le recours croissant aux techniques d’Assistance Médicale à la Procréation ?

C’est l’accumulation de différentes facteurs croisés. (…) D’après une étude de 2017 que nous citons dans le rapport, entre 1973 et 2011, la concentration spermatique a chuté de plus de 50% et c’est une tendance qui continue sur la même ligne. Il y’a une vraie baisse de la fertilité masculine dans un contexte sociétal où, pour le dire de manière très factuelle, les femmes et les hommes décident d’avoir des enfants plus tard. La fertilité des femmes baissant à partir de 30 ans et a fortiori à partir de 35 ans, tout ça fait qu’il y a énormément de couples contraints à recourir à l’Aide Médicale à la Procréation.

Quelles sont les causes environnementales ?

Cela fait partie des causes qu’on a très largement creusées dans le rapport, du fait des perturbateurs endocriniens par exemple.

Un rapport préventif sur les causes de l’infertilité

Nous cherchons à travailler à la fois sur l’accès à l’information, de façon à ce que le sujet de l’infertilité soit abordé frontalement et ne reste pas une espèce de tabou, sur la question de la formation et de la recherche, et sur celle de la coordination, de l’impulsion nécessaire en matière d’infertilité.

Quels sont les principaux obstacles dans un parcours d’Assistance Médicale à la Procréation ?

Très souvent l’AMP dure trois ans, quatre ans, cinq ans. En France, chaque tentative a des chances de succès de l’ordre de 20%. C’est donc loin d’être mécanique. Le temps dans un parcours d’AMP n’est pas un allié. Plus les mois passent, pus les années passent, plus de fait la fertilité va décroître, et moins les chances de succès seront grandes.

C’est tout le sens de notre travail avec Samir Hamamah que de travailler en amont, de manière préventive et pas uniquement de manière curative de façon à ce que les couples qui n’arrivent pas à concevoir puissent ensuite le faire dans les bonnes conditions et rapidement.

Des pistes pour lutter contre l’infertilité

Quelles sont les pistes pour lutter contre l’infertilité ?

Travailler sur l’accès à l’information. Aujourd’hui, dans la scolarité, y compris chez des jeunes qui peuvent se poser légitimement la question, on va aborder la problématique des maladies sexuellement transmissibles, on abordera la question de la contraception. Il faut ajouter tout un pan sur la question de la fertilité.

La nécessité est aussi d’avoir une impulsion et une coordination nationale qui ne soit pas uniquement médicale, mais qui suppose une approche transdisciplinaire de façon à traiter le problème de l’infertilité dans son ensemble.

La Question du jour
9 min
L'Invité des Matins d'été (1ère partie)
20 min
L'Invité des Matins d'été
11 min

L'équipe