Le groupe Orpea a utilisé les revenus provenant de ses maisons de retraite pour se constituer un vaste patrimoine immobilier en partie géré depuis des paradis fiscaux, et se livre à la "spéculation" pour enrichir ses actionnaires au détriment des soins aux résidents, accusent la CGT et la CFDT dans un rapport publié jeudi 24 février. L'entreprise génère des "revenus pour ses actionnaires grâce à la spéculation immobilière sur les terrains et constructions de ses propres maisons de retraite", affirme ce rapport rédigé à la demande des deux syndicats par le Centre pour la recherche et la responsabilité fiscale des entreprises (Cictar), un cabinet d'étude basé en Australie, spécialisé dans l'"information sur les arrangements fiscaux des multinationales".

Ce travail a été entamé début 2021, mais sa finalisation a été accélérée après la publication fin janvier du livre-enquête "les Fossoyeurs" de Victor Castanet, a expliqué à l'AFP Loïc Le Noc, de la CFDT Santé Sociaux. Une "partie significative" des revenus ayant permis cette "ingénierie financière" provient de fonds publics, affirment les experts du Cictar, puisque Orpea perçoit des dotations publiques au titre des soins et de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées. "Est-il normal que des fonds publics servent à financer l'expansion du parc immobilier d'une société privée?", interrogent les auteurs du rapport, soulignant toutefois n'avoir relevé aucun montage illégal de la part d'Orpea.

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L'ensemble des actifs immobiliers de l'entreprise, situés dans plusieurs pays d'Europe, et que le Cictar évalue à 7,4 milliards d'euros, "a été acquis puis cédé via des montages complexes impliquant notamment des sociétés situées au Luxembourg et aux îles Vierges britanniques, dont la plupart n'ont jamais été divulguées à ses actionnaires et au public", affirme le rapport.

"Orpea commence à présent à céder ce portefeuille à des investisseurs immobiliers", si bien que "les maisons de retraite, déjà surendettées, voient désormais leurs charges alourdies pour de nombreuses années à venir par des loyers", ce qui limite "à la fois les salaires des travailleurs et le niveau des effectifs", pointent encore les auteurs. Autrement dit, les revenus des Ehpad sont "utilisés pour compenser le gonflement des charges financières", plutôt que pour "offrir à nos personnes âgées une dignité et un respect essentiel", selon eux. Le gouvernement français doit réagir en conditionnant à l'avenir tout financement public à une communication financière plus transparente, demandent la CGT et la CFDT.