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Eric Trappier (Dassault Aviation): "L'Allemagne va acheter des avions américains"

Invité sur BFM Business, le patron de Dassault Aviation assure qu'il soutiendra l'Europe de la Défense, mais pas au détriment de son entreprise.

L'Europe de la Défense sera-t-elle une industrie européenne de la Défense? Alors la plupart des pays de l'UE ont fait part ses dernières semaines de leur volonté de se réarmer face à la menace russe, les armes choisies par les Etats pourraient être fournies par les Américains.

C'est ce que redoute Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation qui produit l'avion de chasse Rafale. Le patron de l'industriel se félicite du réarmement de l'Allemagne mais regrette le choix du pays en matière d'avion de chasse.

"C'est une bonne nouvelle [que l'Allemagne se réarme], l'Otan appelle depuis bien longtemps l'Allemagne à se positionner pour avoir le 2% du PIB dans la Défense, c'est simplement un rattrapage de ce qu'ils auraient du faire il y a bien longtemps", estime Eric Trappier.

Mais concernant l'armement, "ils l'ont écrit, il l'ont redit, une des premières décisions de cette coalition ce sera d'acheter un avion de combat américain, selon mon bon principe qu'en Europe il y a une préférence américaine", déplore le patron de Dassault Aviation.

Si Eric Trappier n'est guère optimiste pour les ventes de Rafale en Europe, il ne l'est pas davantage concernant son successeur. Pressés par les Etats français, allemand et espagnol pour mettre au point le SCAF (le système de combat du futur) qui doit remplacer les Rafale français et Eurofighter allemands et espagnols à horizon 2040, Dassault et Airbus n'ont toujours pas réussi à se mettre d'accord.

"L'Europe de la Défense va se faire, mais elle doit se faire sur la base d'une efficacité et des compétences, appelle Eric Trappier. Les trois pays travaillent à ces hypothèses-là, nous avons apporté notre savoir-faire, nous avons négocié depuis plusieurs années avec notre partenaire, il est temps de signer le contrat et non pas de discuter en permanence pour remettre en cause la légitimité d'architecte et de maître d'oeuvre de Dassault."

Dassault "le meilleur au monde"

L'architecte du Rafale qui estime être "parmi les meilleurs au monde, si ce n'est le meilleur en termes de commandes de vol" ne comptent pas abandonner sa "souveraineté" en matière de conception.

"Il faudrait qu'ils acceptent les hypothèses telles qu'on les a négociées depuis bien longtemps, il y a un maître d'oeuvre qui fait les commandes de vol et on ne duplique pas tout pour essayer d'avoir un échange de savoir-faire", prévient le patron de Dassault Aviation.

Eric Trappier reconnaît qu'il y a une divergence d'intérêt et que si "sa société défend les intérêts tricolores, elle défend aussi les intérêts de Dassault Aviation et de son savoir-faire en avions de combat depuis la 2ème guerre mondiale."

Et si Airbus et Dassault ne réussissent pas à se mettre d'accord, l'avionneur assure qu'il a déjà un prévu une voie de sortie.

"Il y aura des plans B si la situation ne se dénoue pas, assure-t-il. Le plan B vous le verrez le jour où on l'annoncera, il y a toujours un plan B dans une industrie responsable, si vous n'arrivez pas à passer par un côté, vous assez par un autre côté. Que ce soit avec un autre partenaire ou tout seul."

De son côté le patron d'Airbus tient à relativiser le désaccord. Guillaume Faury reconnaît ainsi que les "discussions (prennent) plus de temps que prévu, mais ce n'est pas rare dans ce genre de négociations".

"Nous essayons de faire tout notre possible pour (...) trouver un accord et aller de l'avant", a-t-il ajouté en février lors de la présentation des résultats d'Airbus.
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco