Partager
Santé

Covid-19 : première transmission avérée du cerf vers l’humain

Les autorités canadiennes ont mis en évidence que le coronavirus peut infecter les cervidés pour ensuite y évoluer et être retransmis à l’humain.

réagir
Le coronavirus aurait auccumulé des dizaines de mutations chez les cerfs.

Le coronavirus aurait auccumulé des dizaines de mutations chez les cerfs.

Ilyas Gun / ANADOLU AGENCY / Anadolu Agency via AFP

Les cerfs pourraient-ils devenir la source du prochain variant du coronavirus ? De nombreux mammifères peuvent être infectés par le virus responsable du Covid-19, des hôtes chez qui le virus peut évoluer et développer des variants qui peuvent ensuite réinfecter l’humain. Mais pour le moment, la transmission de retour vers l’humain avait été observée uniquement chez un petit nombre de ces animaux, dont les visons et les hamsters, ce qui a entrainé des abattages massifs pour éviter ces transmissions. Mais un nouveau groupe de mammifères pourrait s’ajouter à ces sources potentielles de nouveaux variants, les cervidés.

Le virus a accumulé plusieurs dizaines de mutations chez le cerf

En août 2021, les autorités américaines avaient mis en évidence que près de la moitié des cerfs d’Amérique du Nord pourraient avoir attrapé le Covid, ce qui constituait la première détection d’une exposition massive au coronavirus chez des animaux sauvages. Ce haut taux d’infection montrait que le coronavirus semble très transmissible parmi les cerfs (qui ne développent pas de maladie grave suite à l’infection), mais il n'était pas encore sûr que les cerfs puissent retransmettre le virus vers l’humain ensuite. Cette incertitude a été levée le 25 février 2022, dans un preprint (article scientifique pas encore revu par les pairs) publié par le Centre canadien des maladies animales. Selon cette étude, le coronavirus serait déjà passé du cerf vers l’humain au moins une fois.

Les chercheurs canadiens ont analysé des échantillons de 300 cerfs de Virginie (Odocoileus virginianus) dans la province canadienne d’Ontario durant la saison de chasse, entre novembre et décembre 2021. Parmi ces cervidés, la présence du coronavirus a été confirmée dans 21 échantillons (6 % du total des cerfs de l’étude). Grâce à ces échantillons, les chercheurs ont pu reconstruire cinq génomes entiers du virus ainsi que deux partiels. Avant cette étude, toutes les séquences du virus trouvées chez les cervidés étaient très proches de celles présentes chez les humains au même moment, montrant que le virus n’avait pas eu le temps d’évoluer dans ses nouveaux hôtes. Mais ces cinq génomes, très similaires les uns des autres, étaient très distincts du reste de variants actuellement en circulation chez l’humain, avec 76 mutations par rapport à la séquence de la souche originale du coronavirus.

Au moins une transmission vers l’humain

Leur analyse a aussi identifié une séquence génomique du virus très proche de celle trouvée chez les cervidés (partageant la grande majorité de ces mutations) chez une personne vivant dans l’Ontario. Cette personne a été infectée à l’automne 2021 et avait été en contact direct avec des cerfs peu avant l’infection.

Mais aucun autre échantillon provenant des humains ne présentait ces mutations, et la séquence génomique la plus proche avait été détectée une année auparavant au Michigan (Etat américain frontalier avec le Canada), avec moins de la moitié de ces variations génétiques. Il est donc probable que ce nouveau variant vienne d’un coronavirus ayant été transmis aux cerfs il y a un an en Amérique du Nord, où il aurait évolué pendant une année, accumulant 49 mutations, avant d'être de retour chez l’humain.

Mais ces mutations ne semblent pas représenter un danger pour l’humain

Neuf des 76 mutations détectées chez les cervidés et la personne infectée dans l’Ontario, se trouvent dans la protéine Spike du coronavirus, dont six entraînent le changement d’au moins un acide aminé. Ce qui a fait craindre que ce nouveau variant puisse échapper aux anticorps qui reconnaissent cette protéine. Heureusement, une analyse avec du plasma de personnes vaccinées a montré que leurs anticorps n’ont aucun problème à reconnaître et neutraliser ce variant. Ces mutations n’ont donc aucun impact sur l’efficacité des vaccins actuels.

En effet, les chercheurs ont trouvé que le ratio de mutations non synonymes (qui modifient un acide aminé) sur mutations synonymes est très bas, ce qui suggère qu’il ne semble pas y avoir eu de pression de sélection pour le coronavirus chez les cervidés. Ces mutations sont donc probablement neutres, c’est-à-dire qu’elles ne représentent pas un avantage pour le virus. Ce manque de pression de sélection pourrait s’expliquer par une immunité acquise faible (voire non existante) aux autres coronavirus chez les cervidés, qui ne sont pas pour autant très malades après l’infection, permettant ainsi de transmettre sans difficulté le virus, qui accumule les mutations neutres entre chaque passage d’un cerf à un autre.

Cependant, les auteurs préviennent que si jamais un variant dangereux émergeait chez des animaux sauvages comme les cerfs, il serait beaucoup plus difficile à contrôler que chez des espèces en élevage, comme les hamsters et les visons. Toutefois, il n’y a pas encore d’autres évidences de transmission du cerf vers l’humain, ni d’humain vers l’humain d’un variant du coronavirus venant du cerf. Donc pour le moment, il semble peu probable que le prochain variant préoccupant vienne de ces animaux, mais il faudra tout de même rester vigilants.

Commenter Commenter
à la une cette semaine

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite recevoir toutes les alertes infos de la rédaction de Sciences et Avenir

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Santé
Nature
Archéo
Espace
Animaux
Je ne souhaite plus recevoir de notifications