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Guerre en Ukraine: des milliers de Russes ont fui leur pays via la Finlande

Arrivée du train Allegro, reliant Saint-Pétersbourg à Helsinki, dans la gare de la capitale finlandaise le 6 mars.

Arrivée du train Allegro, reliant Saint-Pétersbourg à Helsinki, dans la gare de la capitale finlandaise le 6 mars. - Emmi Korhonen

Qu'ils craignent un durcissement du régime de Vladimir Poutine ou les conséquences des sanctions économiques, des milliers de Russes ont déjà fui leur pays vers la Finlande, qui n'est parfois qu'une première étape avant l'Europe de l'Ouest. Mais les difficultés sont grandes autour d'un tel voyage.

Il y a trois jours, 2,5 millions d'Ukrainiens avaient fui leur pays et l'invasion russe selon l'ONU, un total auquel s'ajoutent deux millions de déplacés à l'intérieur même de la nation meurtrie. La diplomatie européenne a de son côté chiffré à cinq millions le nombre d'exilés ukrainiens potentiels à l'issue du conflit. Si la tragédie de l'exode ukrainien était presque attendue après l'agression subie, on découvre désormais un parallèle, certes plus limité statistiquement, plus stupéfiant. Depuis quelques jours, des milliers de Russes ont commencé à fuir leur pays, notamment via la Finlande.

Interrogés par la presse internationale, certains mettent en avant la crainte d'une fuite en avant du Kremlin, leur opposition au régime de Vladimir Poutine en général, ou plus prosaïquement des effets délétères des sanctions à l'encontre de l'économie nationale. Mais les difficultés et les contraintes sont nombreuses autour de cet exil, qui semble réservé à un petit nombre.

La Finlande, passage obligé

La Finlande apparaît comme le port d'attache tout désigné pour ces Russes désireux de fuir leur patrie. Il faut dire que l'espace aérien vers l'Union européenne et l'Amérique du Nord étant dorénavant fermé et les frontières occidentales étant bouclées par la guerre ou l'ombre peu compatissante du Biélorusse Alexandre Loukanchenko, allié de Vladimir Poutine, la Russie n'offre que peu d'issue aux partants.

Les candidats au départ n'ont donc d'autre choix que de prendre la route ou le chemin de fer à travers les 1340 kilomètres de frontière commune entre la Russie et la Finlande.

Première difficulté cependant: la Finlande faisant partie de l'espace Schengen, il faut disposer d'un pass vaccinal en règle et d'un visa pour y pénétrer, ce qui restreint le nombre des éligibles. A fortiori lorsqu'on quitte un pays aussi peu vacciné que la Russie et qui a employé le Spoutnik-V, un produit non-reconnu en Europe.

Des raisons politiques

Et la Finlande n'est parfois qu'une étape, avant un passage vers l'Europe de l'Ouest ou les Pays baltes. Le témoignage imagé recueilli par le correspondant du Figaro auprès de l'un des passagers de l'Allegro, ce train reliant Saint-Pétersbourg à Helsinki et désormais pris d'assaut par les ressortissants russes et finlandais, le montre: "Poutine, c’est de la merde! On va en Lettonie".

En-dehors de la question de la destination finale, c'est donc celle de l'adhésion ou plutôt de la rupture avec le pouvoir de Vladimir Poutine qui se pose ici et motive la fuite de nombreux Russes. La BBC a d'ailleurs mis en lumière le second critère politique derrière cette tendance: la peur devant une fuite en avant du Kremlin, et l'introduction de la loi martiale dans le pays.

Cette Russe, réfugiée en Finlande, l'a confirmé à l'audiovisuel public britannique: c'est la nature du régime qui l'accule au départ.

"Je ne reviendrai pas tant que ce gouvernement effroyable sera en place", a-t-elle lâché, déplorant encore: "Les gens d'Ukraine, ce sont notre famille, on ne devrait pas être en train de les tuer".

"La situation en Russie est très mauvaise: nous avons des criminels de guerre au pouvoir", a également regretté un ressortissant russe en instance de passage en Finlande auprès de France Info dans un reportage diffusé ce lundi. Lui compte s'installer à Rome avec sa famille au moins pour quelques semaines.

Peur économique

Il faut donc des moyens pour accomplir cette odyssée et bien souvent mettre la main à la poche. Le même homme, qui se définit comme un industriel, a ainsi raconté à la radio publique avoir "acheté des passeports dorés coûtant plusieurs centaines de milliers d'euros à Malte" pour lui et les siens.

Le troisième motif de départ hors de Russie est d'ailleurs d'ordre financier. On redoute le contrecoup des sanctions économiques décrétées par la communauté internationale à l'encontre de la Russie ; d'une guerre dont chaque journée chiffre à plus de 20 milliards de dollars ; et l'incertitude entourant l'avenir matériel.

"Je ne sais pas ce que le gouvernement va décider. Il pourrait maintenant geler tous les dépôts d'argent en banque, en euros et en dollars. Je dois partir", a conclu le témoin de France Info.

Le nombre de ces émigrés russes est toutefois difficile à quantifier pour le moment. Le Figaro avance le chiffre de 3600 transfuges quotidiens vers la Finlande. Une réalité déjà tangible donc, mais loin des dimensions du drame ukrainien.

Robin Verner
Robin Verner Journaliste BFMTV