La blogueuse russe Veronika Belotserkovskaya risque la prison pour avoir dénoncé la guerre

Publié le Mardi 22 Mars 2022
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
La blogueuse culinaire russe Veronika Belotserkovskaya soutient l'Ukraine
La blogueuse culinaire russe Veronika Belotserkovskaya soutient l'Ukraine
La blogueuse culinaire russe Veronika Belotserkovskaya, suivie par près d'un million de fans, se retrouvera-t-elle bientôt en prison ? La question se pose après la publication de propos critiques sur sa page Instagram concernant l'invasion de l'Ukraine.
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"Découvrir que j'étais la première personne à être inculpée au nom de la loi sur les fake news de Vladimir Poutine était à la fois amusant et choquant". Voilà ce qu'a déclaré Veronika Belotserkovskaya, blogueuse culinaire russe suivie par près d'un million de followers sur Instagram. L'influenceuse fait l'objet d'une affaire pénale en vertu d'une nouvelle loi imposée par le gouvernement russe. Actuellement établie sur la Côte d'Azur comme le note Nice Matin, elle risque aujourd'hui jusqu'à quinze ans de prison si elle rentre en Russie.

La loi dite des "fausses informations" vise avant tout à réprimer la dissidence anti-guerre en Ukraine. Et Veronika Belotserkovskaya aurait ainsi été ciblée suite à la publication de messages sur sa page Instagram qui "contenaient sciemment de fausses informations sur l'utilisation des forces armées russes", rapporte le Guardian. Informations "fausses", selon le Kremlin bien sûr.

Très critique envers l'invasion des forces armées en Ukraine, l'influenceuse russe dénonce cette oppression : "Vladimir Poutine veut traiter les gens comme moi comme des traîtres".

"Le monde entier est devenu l'Ukraine"

"Je mène une belle vie, je poste de jolies photos de plats en ligne. Mais les autorités russes veulent maintenant me dépeindre comme le visage de 'l'Occident décadent'", ironise la blogueuse, qui vit dans le Sud de la France, où elle dirige notamment une école de cuisine.

Les termes de la cheffe se réfèrent précisément à un discours récent de Poutine, dans lequel celui-ci en appelait à une "auto-épuration nécessaire de la société russe". "Le peuple russe sera toujours capable de distinguer les vrais patriotes des traîtres et de les recracher simplement comme une mouche qui a accidentellement volé dans sa bouche. Je suis convaincu qu'une telle auto-épuration naturelle et nécessaire de la société ne fera que renforcer notre pays, notre solidarité, notre cohésion et notre capacité à répondre à tous les défis", avait alors déclaré Vladimir Poutine. No comment.

Veronika Belotserkovskaya confie au Guardian : "Je ne suis pas une personne politique, je m'exprime en tant que mère de trois fils. Des enfants ukrainiens meurent, il n'est pas possible de se taire. Je suis aussi une personne sensée. Je ne prévois certainement pas de retourner en Russie tant que ces charges pénales seront d'actualité. Même si en me visant, ils visent à punir une partie beaucoup plus large de la société russe", a déclaré .

"Je ne pourrais probablement plus jamais rentrer chez moi"

L'influenceuse russe tient à alerter quant à l'état d'un pays où il est désormais question de "traîtres" et "d'ennemis d'Etat". "Beaucoup de mes amis en Russie sont d'accord avec moi, mais ont peur de dire quoi que ce soit. Je comprends tout à fait cela", conclut-elle auprès du média en ligne britannique. Une inquiétude que la blogueuse n'hésite pas à partager régulièrement sur Instagram.

Récemment encore, elle déclarait : "Je me suis réveillée pour la première fois aujourd'hui avec le sentiment que je ne pourrais probablement plus jamais rentrer chez moi. Hier, j'ai essayé de comprendre ce que Poutine avait dans la tête. Avec un objectif très simple - peut-il vraiment appuyer sur le bouton "éteindre l'humanité". J'ai regardé beaucoup d'interviews de lui. Les dernières sont vraiment effrayantes. Mais il ne comprend pas qu'il est impossible de détruire l'Ukraine. Car aujourd'hui, c'est le monde entier qui est devenu l'Ukraine".

Sur la photographie qui accompagne ce message fort, l'influenceuse pose devant un mur aux couleurs jaune et bleu - celles du drapeau ukrainien.