Détournement de fonds et outrage à magistrat : 9 ans de prison pour Alexeï Navalny

Alexeï Navalny a été déclaré coupable, ce mardi, de détournement de fonds et d'outrage à magistrat , accusé d'avoir lancé des «Oh mon dieu», «Ce dossier est monté de toutes pièces» et «Vous avez dénaturé la loi», selon son entourage. «En insultant le juge, Navalny a commis un outrage à magistrat», a assuré la juge Margarita Kotova, dont les proches d'Alexeï Navalny ont publié les factures téléphoniques démontrant que le chef des relations publiques du Kremlin l'avait contactée à plusieurs reprises durant le procès. L'opposant russe a été condamné à 9 ans de prison -13 avaient été requis par la procureure la semaine dernière , en plus de «deux ans de limitation de liberté» et d'une amende de 1,2 million de roubles (environ 10 500 euros à l’heure actuelle).

L'activiste de 45 ans a rapidement réagi, avec un message publié sur son compte Twitter : «9 ans. Et bien, comme disent les personnages de ma série préférée "The Wire" : "Tu ne fais que deux jours. Celui où tu arrives et celui où tu ressors." J'avais même un tshirt avec cette citation, mais les autorités pénitentiaires me l'ont confisqué, considérant le motif comme extrémiste.»

Alexeï Navalny a été déclaré coupable d'avoir détourné 2,7 millions de roubles (environ 18 700 euros) -contrairement aux 4,7 millions de dollars avancés durant l'enquête. Lundi, à la veille du verdict, sa porte-parole Kira Yarmysh avait mis en garde : «Si Navalny est déclaré coupable, il deviendra à un "récidiviste". Cela permettra son transfèrement vers une colonie de haute sécurité avec des conditions d'accès encore plus strictes depuis Moscou. Il sera pratiquement impossible d'avoir accès ou de garder le contact avec Alexeï. Sans protection publique, Alexeï sera face à ceux qui ont déjà essayé de le tuer et rien ne les empêchera d'essayer à nouveau. Donc maintenant, nous ne parlons pas seulement de la liberté d'Alexeï, mais aussi de sa vie.»

"Vous allez alourdir ma peine indéfiniment"

Le procès avait lieu dans un tribunal improvisé au sein de la colonie pénitentiaire de Pokrov, où Alexeï Navalny purge déjà une peine de deux ans et demi de prison, du sursis auquel il avait été condamné en 2014 et que la justice russe estimait enfreint lorsqu’il a été transporté, en urgence et inconscient, en Allemagne pour être soigné après l’empoisonnement dont il a été victime à l’été 2020. «Vous allez alourdir ma peine indéfiniment», avait lancé Alexeï Navalny à l’ouverture de son procès. «Mais qu'est-ce qu'on peut y faire ? Ce que font les gens est plus important que le destin d'une seule personne. Je n'ai pas peur», avait-il poursuivi.

En janvier dernier, pour marquer l'anniversaire de son interpellation à l'aéroport de Moscou en revenant de sa convalescence en Allemagne, Alexeï Navalny avait dit «ne pas regretter une seconde» d'être rentré en Russie. «Après un an de prison, je vous dis ce que j'ai crié devant le tribunal : n'ayez pas peur», avait-il écrit dans un texte transmis depuis la prison. «J'ai récemment lu que des employés du ministère de l'Intérieur sont renvoyés pour avoir aimé un de mes messages. Ainsi, en Russie en 2022, même un like peut être une manifestation de courage.»

Lors d'une audience récente, il s’était prononcé contre la guerre en Ukraine : «Je pense que cette guerre est conçue pour détourner l’attention des problèmes de la Russie, et cela ne mènera qu’à un appauvrissement plus grand. Je considère que ceux qui ont déclenché cette guerre sont des bandits et des voleurs. Je me suis engagé en politique pour combattre ce régime criminel de voleurs», avait-il déclaré. «Cette guerre fera un grand nombre de victimes, gâchera des vies et poursuit la politique d’appauvrissement des citoyens russes».