Lozère Il avait laissé mourir ses chèvres et brebis : un jeune éleveur en détresse condamné

Un jeune agriculteur, d'une quarantaine d'années, a été condamné lundi à des heures de travaux d'intérêt général pour avoir laissé tomber son exploitation agricole, en Lozère, après une « descente aux enfers » pendant l'hiver 2020-2021. En grande détresse professionnelle et psychologique, il avait abandonné son cheptel. Plus de 300 ovins et caprins avaient été retrouvés morts en état de décomposition.
La rédaction avec AFP - 29 mars 2022 à 06:43 | mis à jour le 29 mars 2022 à 07:53 - Temps de lecture :
Photo Sébastien SALOM-GOMIS/SIPA
Photo Sébastien SALOM-GOMIS/SIPA

Un jeune éleveur vivant dans une grande solitude a été condamné lundi à 105 heures de travaux d'intérêt général par le tribunal correctionnel de Mende pour avoir laissé mourir ses chèvres et brebis dans une ferme isolée du Causse Méjean, en Lozère.

Adversité, solitude, isolement

A défaut d'exécuter sa peine dans les 18 mois, il devra effectuer deux mois de prison ferme, a précisé le tribunal, qui ne lui a pas infligé d'amende.

Âgé d'une quarantaine d'années, de taille moyenne et le visage ceint d'une barbe soigneusement taillée, des lunettes rondes lui donnant des allures d’instituteur, le prévenu a décrit à l'audience sa « descente aux enfers » pendant ce rude hiver 2020-2021 où son « rêve » s'est effondré face à l'adversité, la solitude, l'isolement croissant et les rapports de plus en plus conflictuels avec ses voisins agriculteurs ou son syndicat agricole.

J'étais débordé

« Je n'ai pas su faire, j'étais débordé, rien ne fonctionnait », a expliqué d'une voix posée cet homme mince qui s'était installé une dizaine d'années plus tôt dans une ferme isolée au-dessus des gorges du Tarn, au lieu-dit « La Maxanne », au cœur de la commune nouvelle de Massegros-Causses-Gorges.

Lui qui avait été un « excellent éleveur » a totalement perdu pied : il « ne mangeait plus, ne se lavait plus, ne sortait plus de son mobile-home », a expliqué son avocate, Isabelle Gaye, évoquant sa détresse. « C'est un monde où l'on est seul, tout seul », a-t-elle souligné en plaidant la relaxe.

Cadavres en putréfaction de plus de 300 ovins et caprins

C'est un ami de l'éleveur, sentant la précarité de sa santé mentale, qui avait prévenu les gendarmes. Lorsqu'ils sont arrivés à la ferme, ils ont découverts les cadavres en putréfaction de plus de 300 ovins et caprins (« 9 tonnes », a souligné le procureur). Chèvres et brebis avaient été privées de nourriture et d'eau alors qu'il restait du fourrage en quantité suffisante, a-t-il ajouté. Certaines bêtes, mourantes, ont dû être euthanasiées. Sur l'ensemble du troupeau, 71 ont survécu. L'éleveur avait quant à lui quitté les lieux quelques jours plus tôt.

Il a « fait une croix sur l'élevage »

Le procureur a réclamé une reconnaissance de culpabilité, pour le principe, ainsi qu'une peine de travaux d'intérêt général car, a-t-il souligné, « quand on est éleveur, on n'a pas que la responsabilité de soi, mais aussi celle du cheptel ».

Le prévenu, qui vit actuellement en Corrèze avec sa compagne, a expliqué avoir « fait une croix sur l'élevage ». Sans ressources, il envisage désormais de se tourner vers l'enseignement agricole ou de devenir cultivateur.