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Le président Kaïs Saïed dissout le parlement tunisien

Les députés ont bravé, mercredi, la suspension du parlement en organisant une séance virtuelle, au cours de laquelle ils ont voté pour annuler les mesures exceptionnelles décidées par le président

Kaïs Saïed à Bruxelles (Belgique), le 18 février 2022. — © JOHANNA GERON / REUTERS
Kaïs Saïed à Bruxelles (Belgique), le 18 février 2022. — © JOHANNA GERON / REUTERS

Huit mois après l’avoir suspendu pour s’arroger les pleins pouvoirs en juillet 2021, le président tunisien Kaïs Saïed a annoncé, mercredi lors d’une réunion du «Conseil de sécurité nationale» qu’il a présidée, la dissolution du parlement.

«J’annonce aujourd’hui en ce moment historique la dissolution de l’Assemblée des représentants du peuple pour préserver l’Etat et ses institutions et pour préserver le peuple tunisien», a déclaré Kaïs Saïed dans une vidéo diffusée par la présidence.

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Après des mois de blocage politique, Kaïs Saïed, élu fin 2019, s’est arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet en limogeant le premier ministre et en suspendant le parlement dominé par le parti d’inspiration islamiste Ennahdha, sa bête noire. Le 22 septembre, le chef de l’Etat a officialisé ses pleins pouvoirs par des «mesures exceptionnelles» qui prolongent la suspension du parlement. Elles lui permettent aussi de légiférer par décret, de présider le Conseil des ministres et d’amender les lois.

Des élections réclamées par les députés

A l’appel du Bureau de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), une instance qui regroupe la présidence du parlement et des représentants des partis y siégeant, cent vingt députés tunisiens (sur un total de 217) ont bravé, mercredi, la suspension du parlement en organisant une séance virtuelle au cours de laquelle ils ont voté pour annuler les mesures exceptionnelles décidées par Kaïs Saïed depuis le 25 juillet. Le président de l’ARP, Rached Ghannouchi, également chef du parti Ennahdha, n’a pas participé à cette plénière.

Cent seize députés ont voté en faveur d’un projet de loi visant à annuler les mesures exceptionnelles prises par Kaïs Saïed, qui bloquent, selon eux, le processus démocratique et instaurent le pouvoir d’un seul homme dans le pays berceau du Printemps arabe.

Les députés, dont des élus d’Ennahdha et des indépendants, ont appelé en outre à l’organisation d’élections législatives et présidentielle anticipées pour sortir de la crise politique et socio-économique.

Les députés accusés de «comploter contre la sécurité de l’Etat»

Dans son allocution annonçant la dissolution du parlement, Kaïs Saïed a qualifié la réunion des députés de «tentative de coup d’Etat, qui a échoué».

Il a accusé les participants de «comploter contre la sécurité de l’Etat» et demandé à la ministre d’engager des poursuites à leur encontre. «Nos forces de sécurité militaires et civiles feront face selon la loi à tout recours à la violence», a-t-il averti.

Après avoir suspendu le parlement et limogé le gouvernement, Kaïs Saïed a dissous en février le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), une mesure qualifiée de nouvelle dérive autoritaire par ses détracteurs et qui a suscité des inquiétudes pour l’indépendance de la justice.

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Kaïs Saïed a dévoilé une feuille de route pour sortir le pays de la crise avec des élections prévues en juillet ainsi qu’un référendum sur des amendements constitutionnels, mais une consultation populaire en ligne qu’il a lancée pour recueillir des propositions a largement été boudée par les Tunisiens.