Le président allemand Frank-Walter Steinmeier a été contraint d’annuler son voyage à Kiev, les autorités ukrainiennes ayant déclaré, mardi 12 avril, qu’il n’était pas le bienvenu en raison de ses liens étroits présumés avec le Kremlin.
M. Steinmeier avait prévu de se rendre mercredi à Kiev aux côtés de ses homologues polonais, estoniens, lettons et lituaniens pour manifester la solidarité de l’Allemagne avec l’Ukraine. Cependant, l’Ukraine lui a opposé un refus et a déclaré qu’il n’était pas le bienvenu.
« J’étais prêt à le faire, mais apparemment, et je dois le reconnaître, ce n’était pas souhaité par Kiev », a déclaré M. Steinmeier aux journalistes après sa rencontre avec le président polonais Andrzej Duda, mardi 12 avril.
M. Steinmeier a fait pression pour un rapprochement avec la Russie lorsqu’il était ministre des Affaires étrangères entre 2013 et 2017 et a établi la dite Formule Steinmeier. Après des années d’impasse dans la mise en œuvre de l’accord de Minsk, le principal dispositif de résolution du conflit ukrainien après la crise de 2014, M. Steinmeier a adopté une position plus conciliante envers la Russie.
La Formule Steinmeier prévoyait l’organisation d’élections dans les régions séparatistes du Donbass qui aboutiraient à un statut spécial d’autonomie pour ces territoires.
Bien que ces accords soient désormais obsolètes en raison de l’invasion russe de l’Ukraine, qui a annulé les accords de Minsk, de nombreux politiciens et diplomates ukrainiens lui reprochent toujours son approche prétendument conciliante envers la Russie.
« Nous connaissons tous ici les relations étroites de Steinmeier avec la Russie, qui étaient également caractérisées par la Formule Steinmeier », a déclaré le diplomate à die Bild, ajoutant que M. Steinmeier ne serait « pas le bienvenu » pour le moment.
L’ambassadeur ukrainien à Berlin, Andrij Melnyk, avait déjà fortement critiqué M. Steinmeier début avril. « Pour M. Steinmeier, la relation avec la Russie était et reste quelque chose de fondamental, voire de sacré, quoi qu’il arrive, même la guerre d’agression ne joue pas un rôle majeur à cet égard », a déclaré M. Melnyk au Tagesspiegel.
À la suite de ces critiques, M. Steinmeier a fait volte-face dans son évaluation de la Russie. Dans une interview accordée à la chaîne ZDF le 4 avril, il a reconnu pour la première fois ses erreurs durant son mandat de ministre des Affaires étrangères, déclarant qu’il avait « mal jugé » Moscou.
« Nous nous sommes accrochés à des ponts auxquels la Russie ne croyait plus et contre lesquels nos partenaires nous avaient mis en garde », a déclaré M. Steinmeier.
« Nous avons échoué dans la construction d’une Maison commune européenne dans laquelle la Russie serait incluse », a-t-il ajouté.
Toutefois, si Kiev a rejeté une visite d’État de M. Steinmeier pour l’instant, elle n’a pas exclu que ce dernier soit le bienvenu à l’avenir. « Il n’est pas le bienvenu à Kiev pour le moment. Nous verrons si cela peut changer à nouveau », a déclaré un diplomate ukrainien à die Bild.
