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Justice Pédocriminalité dans l'Eglise: jusqu'à 60 000 euros pour chaque victime

Un barème des réparations financières a été établi pas les commissions chargées de la reconnaissance et de la réparation des victimes de pédocriminalité dans l'Eglise.
Avec AFP - 14 avr. 2022 à 06:50 - Temps de lecture :
Un barème de réparations financières a été décidé pour les victimes de pédocriminalité dans l'Eglise, en France. Photo Julio Pelaez
Un barème de réparations financières a été décidé pour les victimes de pédocriminalité dans l'Eglise, en France. Photo Julio Pelaez

Le travail des commissions chargées de la reconnaissance et de la réparation des victimes de pédocriminalité dans l'Eglise catholique prend forme, petit à petit, même s'il ne va pas assez vite aux yeux des victimes. Un pas a été franchi avec l'établissement d'un barème. Comment cela va-t-il fonctionner ?

Qu'est-ce qui a été décidé ?

La Commission reconnaissance et réparation (CRR), qui propose depuis janvier une médiation entre victimes de pédocriminalité au sein des instituts religieux catholiques et ces derniers, a établi un barème de réparations financières s'échelonnant sur sept niveaux, allant de 5 000 euros minimum à 60 000 euros, seuil plafond.

Cette grille, envoyée aux instituts fin mars, est la référence de travail lors des échanges entre victimes, congrégations et la CRR, dans le but d'aboutir à un accord entre les deux premières.

Sur quelles bases se décident les niveaux ?

La méthode de calcul croise deux évaluations : une des violences, faite par un membre de la commission ; et une autre, réalisée par la victime, qui mesure le degré d'impact des agressions subies sur sa vie personnelle, affective, familiale, sociale, professionnelle et spirituelle.

Ce plafond est « le plus élevé des régimes de réparation déjà mis en oeuvre en Europe continentale » par les autorités ecclésiales, selon la CRR. Il est de 50 000 euros en Allemagne ou de 18 000 euros en Suisse, dit-elle.

Combien de victimes ont fait une demande de réparation ?

Selon la CRR, depuis sa mise en place en janvier, plus de 300 demandes lui sont parvenues, dont certaines ne comportent pas de volet financier. Deux dossiers ont abouti, réglés par la conciliation entre les parties.

Cette commission se fixe d'avoir réglé le maximum de demandes « d'ici à juin 2023 », selon son président Antoine Garapon qui, en ce moment, « s'organise, en recrutant », pour étoffer son équipe.

Comment cela va-t-il fonctionner pour les autres victimes ?

Les victimes de prêtres ou de laïcs dans les lieux d'Eglise autres que les congrégations - paroisse, catéchisme, camps scouts, établissements scolaires - sont dirigées vers l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr).

Elle n'a, à ce stade, pas donné d'indication sur un éventuel barème, mais la semaine dernière, sa présidente a déclaré y travailler, en lien avec la CRR. Elle doit communiquer ultérieurement.

« Ce serait difficile pour des personnes victimes de ne pas avoir accès aux même types de reconnaissance et de réparation, au moins dans les grands principes », a cependant souligné Marie Derain de Vaucresson.

Après toute une procédure lors de laquelle la demande est instruite et une décision est prise, le versement de la réparation financière à proprement parler sera réalisé par un fonds ad hoc, le Fonds de secours et de lutte contre les abus sur mineurs (Selam).

La semaine dernière, l'Inirr avait indiqué que 526 personnes avaient pris contact avec elle depuis janvier. Selon elle, sur ces 526 dossiers, « 57% des personnes parlent d'une réparation, notamment financière », 19% n'en « souhaitent pas » et 24% n'ont pas d'attente sur ce thème.

Comment réagissent les victimes ?

« Si l'Inirr adopte la même grille, je serai satisfaite, a déclaré Mireille Babassud, membre du collectif De la paroles aux actes. Ce serait une réponse équitable pour les victimes. » Selon elle, « on voit mal comment des réparations pourraient être différentes d'une commission à l'autre ».

En revanche, une autre victime, qui a requis l'anonymat, a estimé que « 60 000 euros pour une vie gâchée, c'est pas très cher payé ».

« On est au-delà des sommes prévues par la Belgique et la Suisse. C'est raisonnable », a affirmé Olivier Savignac, du collectif Parler et revivre. Toutefois, « il faut que la réparation financière soit systématique, même si la personne ne le demande pas, martèle-t-il. Le rapport Sauvé l'a bien indiqué : l'Eglise a une dette et elle doit la régler, financièrement. »