Boris Cyrulnik : "Les Occidentaux croient qu’on peut raisonner Poutine ; je crains que ça ne marche point"

Boris Cyrulnik le 3 novembre 2021 ©Getty - Eric Fougere - Corbis
Boris Cyrulnik le 3 novembre 2021 ©Getty - Eric Fougere - Corbis
Boris Cyrulnik le 3 novembre 2021 ©Getty - Eric Fougere - Corbis
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Neuropsychiatre et écrivain, Boris Cyrulnik sonde depuis 40 ans les profondeurs de notre esprit et nous aide à mieux comprendre les forces qui nous animent et à renaître, aussi, de nos blessures. Il est ce matin l'invité de "Boomerang".

Avec

Son nouveau livre, "Le laboureur et les mangeurs de vent", vient de paraître. C'est une réflexion passionnante sur notre société, et sur la difficulté qu'il y a à penser par soi-même dans un contexte plus insécurisant que jamais.

Extraits de l'entretien avec le neuropsychiatre

"Les mangeurs de vent sont ceux qui gobent tous les discours et les grands récits sans les remettre en question. Or, il faut savoir douter."

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"Comment vivre en société si on ne s’interdit pas des choses ? La société, c’est la renonciation à une part d’épanouissement de soi, pour laisser les autres s’épanouir. En société, on doit s’amputer, se restreindre, s’empêcher."

"Il existe un désir d’être sécurisé. La démocratie mène au débat, d’ailleurs certains aiment le désaccord. Mais quand le débat devient conflictuel, il en devient désagréable et émerge alors le désir de "sauveur"."

"Les mots sont des organismes vivants. Ils naissent, ils dérivent et peuvent se vider de leur sens, et on finit par les employer à tort : "collabo" pendant la pandémie".

"Il y a une érotisation de la violence et de la peur. Être violent donne l’impression d’être vivant et fait plaisir. Quand la vie est une vie d'eau tiède, on ne se sent pas vivre, et on est parfois complice de la souffrance qu'on vit".

"La tentation du bien est dangereuse : Hitler voulait amener 1000 ans de bonheur, les régimes totalitaires œuvraient, selon eux, pour le bien… Pour autant, faire le bien demeure possible : ça réside dans l’empathie"

"Le traumatisme construit l’identité. Qu'on le surpasse ou non, il nous bâtit. La mémoire, elle, est intentionnelle : les souvenirs sont toujours dans l’intention".

"Hitler n’était point accessible au raisonnement, et Poutine ne l’est pas non plus. En guerre, on détruit l’un pour ne pas être détruit par l'autre... Les Occidentaux croient qu’on peut raisonner Poutine, mais je crains que ça ne marche point".

"Le complot n’est pas un doute, mais une certitude, un soupçon. Délirer, c’est couper la réalité sensible : à partir d’un postulat, on tisse des récits coupés de la réalité, cohérents mais irréels".

Carte blanche

Boris Cyrulnik a choisi, pour sa carte blanche, de lire un texte inédit.

Programmation musicale

  • Bob Dylan

    I shall be released

    Album More bob Dylan greatest hits

    Label COLUMBIA

  • Gaetan Roussel

    Sans sommeil en duo avec Alain Souchon

    Album Est-ce que tu sais ? (2021)

    Label CLAP HANDS PRODUCTIONS

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