L'actualité mondiale Un regard humain

Le maintien de la paix, plus important mais plus complexe que jamais, alors que les guerres font rage

Des soldats de la paix tanzaniens servant dans le cadre de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) rencontrent des femmes de la communauté locale.
@MONUSCO
Des soldats de la paix tanzaniens servant dans le cadre de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) rencontrent des femmes de la communauté locale.

Le maintien de la paix, plus important mais plus complexe que jamais, alors que les guerres font rage

Paix et sécurité

Le maintien de la paix est devenu plus important mais aussi plus complexe dans un monde où les conflits prolifèrent et sont de plus en plus « imbriqués », a déclaré mercredi le chef de la politique de l'ONU lors d'une réunion de haut niveau de l'Assemblée générale consacrée au financement de la consolidation de la paix.

Lors de la réunion le Secrétaire général adjoint chargé de la politique au sein du Cabinet du Secrétaire général, Volker Türk, a exposé les « risques multiples et cumulés » qui s'accumulent, de l'invasion de l'Ukraine par la Russie au changement climatique, en passant par les menaces posées par les technologies émergentes.

« Le nombre de conflits violents n'a jamais été aussi élevé depuis 1945, avec des conséquences humaines terribles, comme en témoignent les niveaux records de déplacements forcés et les besoins humanitaires mondiaux», a fait valoir M. Türk. 

La consolidation de la paix est la responsabilité de l'ensemble du système des Nations Unies - comme cela a été reconnu dans les résolutions historiques de 2015 sur l'architecture de consolidation de la paix », a-t-il déclaré aux participants.

Une approche unique

« Notre approche unique vise à jeter les bases de sociétés pacifiques en s'attaquant aux causes profondes et aux moteurs des conflits », a expliqué le haut responsable onusien.

Il a cité des exemples en République centrafricaine, où le Fonds pour la consolidation de la paix du Secrétaire général soutient la mise en œuvre de l'Accord politique pour la paix et la réconciliation de 2019, en améliorant les efforts de prévention de la violence à Bambari, en alliance avec de multiples organisations des Nations Unies et de la société civile.

Aussi, en République démocratique du Congo, dans la vaste et rétive région du Kasaï, où la mission de maintien de la paix de l'ONU, la MONUSCO se réduit, le Fonds a soutenu les efforts de réintégration de près de 500 ex-combattants. 

Depuis 2018, les rapports du Secrétaire général ont présenté de nombreuses et diverses options pour augmenter, restructurer et mieux prioriser les financements dédiés aux activités de consolidation de la paix de l'ONU, et « certains progrès » ont été réalisés, a-t-il souligné.

Les contributions volontaires au Fonds ont augmenté, ce qui lui permettra d'investir 195 millions de dollars en 2021.

Volker Türk, Secrétaire général adjoint chargé  de la politique au sein du Cabinet du Secrétaire général, s'adresse à la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix.
Photo ONU/Manuel Elias
Volker Türk, Secrétaire général adjoint chargé de la politique au sein du Cabinet du Secrétaire général, s'adresse à la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix.

Des investissements « insuffisants »  jusqu'à présent

« Mais les progrès sont insuffisants », a-t-il averti.

Les objectifs d'allocation ont été réduits au cours des trois dernières années en raison d'un manque de financement, et l'ONU est bien loin du « saut quantique » nécessaire, à savoir 500 millions de dollars par an.

« Le Fonds reste également entièrement dépendant des contributions volontaires d'un petit nombre de donateurs. En revanche, les besoins dans les domaines de la prévention et de la consolidation de la paix ne cessent d'augmenter.  La demande de soutien dépasse constamment les ressources ».

Le financement, a-t-il ajouté, est un « catalyseur essentiel » dans la recherche d'une consolidation de la paix plus efficace, « et l'argent est là ».

Les chiffres publiés en début de semaine montrent que les dépenses militaires mondiales ont atteint un niveau record l'année dernière, dépassant les 2.000 milliards de dollars pour la première fois.

« Les pays qui peuvent se permettre des investissements records dans les armes peuvent se permettre d'augmenter leurs investissements dans la prévention et la résolution des conflits et la construction de la paix », a soutenu M. Türk.

Les coûts des conflits sont insoutenables, a-t-il ajouté, appelant de nouveaux investissements, comme le souligne le rapport présenté à la réunion de haut niveau.

Aujourd'hui, a-t-il dit, c'est « l'occasion de prendre au sérieux le travail essentiel et ciblé de construction de la paix ».

Tweet URL

Un sous-financement « épouvantable » 

Le président de l'Assemblée générale, Abdullah Shahid, a noté que seule une petite partie des ressources mondiales consacrées à la sécurité et au développement était investie dans la consolidation de la paix.

« La consolidation de la paix reste malheureusement insuffisamment financée et dotée de ressources suffisantes. Pour être clair, l'objectif d'investir 500 millions de dollars par an dans le Fonds pour la consolidation de la paix n'est pas encore atteint », a-t-il indiqué

« Ce déficit financier affaiblit la consolidation de la paix ; le financement est trop imprévisible et inadéquat pour des programmes qui sont censés s'inscrire dans le long terme... Non seulement cela va à l'encontre de nos intentions, mais c'est également un manque de vision sur le plan fiscal. Investir dans la consolidation de la paix pourrait aboutir à des économies nettes de 5 à 70 milliards », a-t-il déclaré.

Il a encouragé tous les États membres à proposer des solutions et à prendre des engagements pour combler le déficit financier en matière de prévention des conflits et de mise en place des institutions nécessaires à une paix durable.

« Je rappelle aux États membres que la consolidation de la paix est avant tout un défi et une responsabilité nationale », a-t-il déclaré. « L'appropriation nationale est essentielle pour atteindre le succès et la durabilité. À cet égard, le développement des capacités nationales doit être au cœur de tous les efforts internationaux de consolidation de la paix, y compris en ce qui concerne l'allocation des fonds destinés à la consolidation de la paix ».

« Faisons preuve d'une plus grande volonté politique pour garantir un financement adéquat, durable et prévisible de la consolidation de la paix et du maintien de la paix ».

L'Ambassadrice Rabab Fatima du Bangladesh s'adresse à la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix.
Photo ONU/Manuel Elias
L'Ambassadrice Rabab Fatima du Bangladesh s'adresse à la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix.

Un défi crucial

La présidente de l'organe consultatif intergouvernemental des Nations Unies, la Commission d’organisation de la consolidation de la paix, Rabab Fatima, a déclaré que l'organe élu par l'Assemblée générale pour aider les nations touchées par les conflits, reconnaissait que « le financement adéquat, prévisible et durable reste un défi critique ».

La présidente, qui est également ambassadrice du Bangladesh auprès de l'ONU, a déclaré que la Commission de consolidation de la paix était préoccupée par le fait que les flux financiers vers les pays touchés par les conflits « ont été gravement mis à mal », notamment en ce qui concerne l'aide publique au développement consacrée à la consolidation de la paix.

« Le défi est particulièrement aigu pour les pays en transition », a-t-elle dit, dans le contexte de la Covid-19 et des contraintes de dépenses publiques.

« Compte tenu des répercussions socio-économiques de la pandémie, notamment sur les pays touchés par des conflits, la Commission réaffirme la nécessité de veiller à ce que les efforts de redressement et de développement durable tiennent compte des conflits et favorisent la consolidation de la paix, notamment en se concentrant davantage sur la prévention et la réduction des inégalités », a-t-elle indiqué.

Elle a demandé que davantage d'efforts soient déployés pour soutenir l'agenda des femmes, de la paix et de la sécurité et l'agenda des jeunes, de la paix et de la sécurité et l'importance d'un « bon financement de la consolidation de la paix », qui devrait inclure des partenariats plus solides avec les organisations régionales et sous-régionales, ainsi qu'avec les institutions financières internationales.