EuropeRégression anti-gay en Europe : la Roumanie cible à son tour la "propagande LGBT"

Par Tessa Lanney le 02/05/2022
L'Union européenne peine à protéger les personnes LGBTQI+ persécutées en Hongrie

Dans le sillage de la Russie de Vladimir Poutine, la Roumanie embraye le pas à la Hongrie et à la Pologne sur le chemin de l'homophobie d'État avec un projet de loi d'interdiction de la "propagande" LGBT.

Quand cessera-t-on de nous rebattre les oreilles avec cette soi-disant "propagande LGBT" ? Concept popularisé par la Russie de Vladimir Poutine, qui a fait adopter en 2013 une loi de censure anti-gay au nom de la protection des mineurs, l'offensive anti-LGBT ne cesse de gagner du terrain au sein même de l'Union européenne. Après la Pologne dirigée par les ultra-conservateurs et la Hongrie de Viktor Orbán, c'est à présent la Roumanie qui s'y met. Le Sénat de Bucarest vient d'adopter un projet de loi visant à interdire l'utilisation dans les écoles de matériel considéré comme faisant la promotion de l'homosexualité et du changement de genre.

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Porté par l’Union démocrate magyare de Roumanie (UMDR), parti ethnique représentant les Hongrois de Roumanie et membre à Bruxelles du Parti populaire européen (la droite), et par les nationalistes de l'Alliance pour l'union des Roumains (AUR), le texte prétend, comme ses grands frères russe et hongrois, prévenir la "maltraitance des enfants", rapporte l'agence Reuters. Il doit à présent être étudié par la chambre basse roumaine, qui aura le dernier mot.

Régression des droits LGBT en Europe

"Adopter une législation explicitement homophobe et transphobe en censurant les informations sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre est une honte pour la Roumanie", dénonce auprès de Reuters le groupe ACCEPT de défense des droits LGBTQI+, craignant que la "censure dans le système éducatif de Budapest" (capitale de la Hongrie) soit appliquée à Bucarest et dénonçant une "incitation à la discrimination". MozaiQ, autre groupe roumain de défense des droits LGBTQI+, exhorte les députés à "faire preuve de responsabilité et de décence" en rejetant ce projet de loi, insistant sur le fait que, de par sa parenté avec la loi adoptée à Moscou, "l'adoption d'un tel projet de loi en Roumanie alimenterait la propagande russe et les campagnes de désinformation de Moscou."

"On parle d'interdire tout contenu au sujet de l'homosexualité, dans tous les milieux. On ne pourrait plus en parler même au sein de sa propre famille, ça ne s'arrête pas à l'école", signale Sébastien Tüller, d'Amnesty International France, auprès de têtu·. "Ce type de projets de loi n'a rien à faire dans l'UE", s'insurge le militant, rappelant que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait déjà jugé la loi russe "contraire aux droits de l'homme et incompatible avec les valeurs démocratiques." Quant à la Hongrie, tout comme la Pologne qui mène également des offensives anti-LGBT sur son territoire, les deux États sont sous le coup de procédures de sanction lancées par la Commission européenne. "Il ne s’agit encore que d’un projet de loi mais qui est symbolique de la régression des droits des personnes LGBTQI+ en Europe. Depuis plusieurs années, on voit bien que le harcèlement et les discriminations augmentent", résume Sébastien Tüller.

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La gangrène dépasse d'ailleurs largement l'Europe de l'Est puisque de tels projets de loi essaiment actuellement aux États-Unis dans le sillage de la droite pro-Trump. En France, l'interdiction de la "propagande LGBT à l'école" a les faveurs de Marine Le Pen, qui soutient ouvertement Viktor Orbán, et d'Éric Zemmour qui l'avait incluse dans son programme pour la présidentielle.

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Crédit photo : illustration, Lukasz Kobus/Commission européenne