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Les atrocités commises en Ukraine au centre d’une réunion du Conseil des droits de l'homme à Genève

Un homme passe devant des bâtiments détruits à Kharkiv, en Ukraine.
© UNICEF/Ashley Gilbertson
Un homme passe devant des bâtiments détruits à Kharkiv, en Ukraine.

Les atrocités commises en Ukraine au centre d’une réunion du Conseil des droits de l'homme à Genève

Droits de l'homme

Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU s'est réuni en session extraordinaire jeudi à Genève, en raison de l'inquiétude croissante suscitée par les atrocités commises contre des civils à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février.

Lors de cette session, le Conseil a voté pour renforcer l’examen approfondi de la « détérioration de la situation des droits de l’homme en Ukraine à la suite de l’agression russe », compte tenu des événements à Marioupol et dans plusieurs autres villes. La résolution a été adoptée par 33 votes en faveur, 2 votes contre et 12 absentions, sur les 47 membres que compte le Conseil des droits de l’homme.

Par ce texte, le Conseil demande à la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine de mener une enquête sur les événements survenus dans les régions de Kyïv, Tchernigov, Kharkiv et Soumy à la fin de février et en mars 2022, afin que les responsables soient amenés à rendre compte de leurs actes. 

Alors qu’un nombre croissant de rapports et de témoignages pointent vers d'éventuels crimes de guerre en Ukraine, en particulier dans les zones contrôlées jusqu'à récemment par les forces russes, la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, a déclaré que la tendance des abus continuait d'être causée « par l'utilisation d'armes explosives » à long rayon d’action dans les zones peuplées, tels que les tirs d’artillerie lourde, y compris les systèmes de lance-roquettes multiples, et les frappes aériennes et de missiles ».

Les forces russes sont probablement responsables de la plupart des pertes civiles, mais aussi les troupes ukrainiennes - quoique dans une bien moindre mesure - , a déclaré la cheffe des droits de l’homme de l'ONU, dans un message vidéo.

Des enfants attendent un train pour être évacués vers la Pologne début avril 2022.
© UNICEF/Siegfried Modola
Des enfants attendent un train pour être évacués vers la Pologne début avril 2022.

Vivre dans la peur

Soulignant les dernières découvertes déchirantes des enquêteurs de l'ONU dans les régions de Kyïv et de Tcherniviv, Mme Bachelet a déclaré que 1.000 corps civils avaient été retrouvés dans la seule région de Kyïv. Certains avaient été tués au cours des hostilités, mais d'autres semblaient avoir été sommairement exécutés.

« Ces meurtres de civils semblaient souvent être intentionnels, perpétrés par des tireurs d'élite et des soldats. Des civils ont été tués en traversant la route ou en quittant leurs abris pour chercher de la nourriture et de l'eau. D'autres ont été tués alors qu'ils fuyaient dans leurs véhicules », a dit Mme Bachelet.

« Dans le village de Katiuzhanka, dans la région de Kyïv, un jeune couple, leur fille de 14 ans et un grand-père ont été abattus par des soldats russes alors qu'ils tentaient de se rendre chez eux en voiture. Les parents ont été tués, tandis que l'enfant a reçu deux blessures par balle », a-t-elle ajouté.

D'autres encore sont morts en raison du stress causé à leur santé par les hostilités et le manque d'aide médicale, a poursuivi la Haute-Commissaire, décrivant comment des personnes avaient été forcées de passer des semaines dans des sous-sols parce qu'elles étaient menacées par des soldats russes « d'abus ou de mort » s'ils essayaient de partir.

Traitement discriminatoire de personnes d'ascendance africaine

Depuis le début de la guerre en Ukraine, des experts indépendants des droits de l'homme nommés par l'ONU ont mis en évidence de profondes préoccupations concernant les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, y compris la Charte des Nations Unies.

Cela inclut notamment une alerte sur les mauvais traitements apparents de certains des centaines de milliers de travailleurs migrants et de ressortissants étrangers en Ukraine.

« Des collègues ont également noté avec une profonde inquiétude des informations selon lesquelles des personnes d'ascendance africaine et des minorités raciales et ethniques seraient soumises à un traitement discriminatoire alors qu'elles fuient l'Ukraine », a déclaré le président du Comité de coordination des procédures spéciales, Victor Madrigal-Borloz, insistant sur le fait que « les vies de tous les habitants de l'Ukraine sont en danger, y compris les minorités ethniques, nationales, linguistiques et religieuses ».

Des journalistes en danger

Le conflit touche des régions où différents groupes ethniques ont vécu ensemble pendant des années, a poursuivi l'expert des droits humains, avant de lancer une nouvelle alerte sur les dangers qui pèsent sur les journalistes qui couvrent le conflit.

« Mes collègues ont fait référence à de nombreux rapports selon lesquels des journalistes sont pris pour cible, torturés, kidnappés, attaqués et tués, ou se voient refuser un passage sûr depuis les villes et les régions assiégées », a-t-il dit.

La session extraordinaire – la 34e du Conseil depuis le début de ses travaux en 2006 – a également entendu une première mise à jour de l'enquête sur les abus en Ukraine qui a été mise en place en mars, à la demande d'une majorité des États membres du Conseil.

« Bien qu'il ne s'agisse pas d'une instance strictement judiciaire, l'une des tâches de la Commission est d'identifier, dans la mesure du possible, les individus et entités responsables de violations ou d'abus des droits de l'homme ou du droit international humanitaire, ou d'autres crimes connexes », a déclaré Erik Mose, président de la Commission d'enquête internationale indépendante sur l'Ukraine.

Parmi les pays solidaires de l'Ukraine, l'ambassadeur de France Jérôme Bonnafont a réitéré la condamnation de son pays concernant l'invasion russe de son voisin.

« Nous l'avons déjà dit et nous le répétons : il y a un agresseur dans cette guerre, c'est la Russie ; ce n'est pas l'OTAN, ni l'Europe, ni l'Ukraine. Démontrons aujourd'hui la solidarité de la communauté internationale avec le peuple ukrainien et avec tous ceux qui sont touchés par les conséquences de l'agression russe », a-t-il dit.