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«On peut me qualifier de fasciste» : Dans la tête de Payton Gendron, le terroriste de Buffalo

Payton Gendron est accusé d'avoir tué 10 Afro-Américains samedi à Buffalo.
Payton Gendron est accusé d'avoir tué 10 Afro-Américains samedi à Buffalo. © Mark Mulville/AP/SIPA
La Rédaction , Mis à jour le

Des écrits publiés en ligne par Payton Gendron, qui a tué 10 Afro-Américains samedi dans un supermarché de Buffalo ont été dévoilés par plusieurs médias américains. Attention, certains détails peuvent choquer.

Mardi, Joe Biden a qualifié la fusillade survenue samedi à Buffalo «d’acte terroriste» , dénonçant le «poison» du suprémacisme blanc. La tuerie commise par un suspect de seulement 18 ans, radicalisé, a fait dix morts, tous Afro-Américains. Depuis le drame, le profil dangereux de ce garçon se dessine . Rapidement, il a été révélé qu’il aurait publié en ligne un manifeste de 180 pages, antisémite et raciste dans lequel il aurait évoqué la théorie du grand remplacement. D’après lui, seuls les blancs devaient avoir le droit de rester aux Etats-Unis, les autres devant partir soit par la force, soit par la terreur. Mardi, Buzzfeed News et le «New York Post » ont donné de nouvelles informations sur le tireur présumé, qui aurait commencé à se radicaliser en ligne durant la pandémie de covid-19. Selon le tabloïd new-yorkais, Payton Gendron aurait mis des mois à préparer son attaque. Dans ses écrits, il aurait expliqué avoir découvert pour la première fois la fameuse théorie du grand remplacement sur le réseau social 4Chan, souvent associé aux thèses complotistes et d’extrême-droite. «Mes opinions actuelles ont débuté lorsque j’ai commencé à utiliser 4Chan quelques mois après le début du covid-19», aurait-il écrit dans son journal en ligne, publié sur le réseau Discord. «A chaque fois que je me dis que je ne devrais pas commettre cette attaque, je prends 5 minutes sur le serveur politique et ma motivation est de retour», aurait-il ajouté, en référence à l’un des forums qu’il fréquentait, connu pour son contenu haineux.

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Buzzfeed News indique de son côté que le terroriste présumé se présentait comme un «national-socialiste éco-fasciste» qui était persuadé que les médias étaient à la solde de «l’ennemi juif», précisant n’appartenir à aucun des deux partis politiques américains. D’après Buzzfeed, Payton Gendron, plutôt qu’un militant politique, serait en réalité «une créature de l’Internet, né des "memes" et des publications en ligne». Parmi les centaines de messages qu’il aurait postés dans le passé se trouvent des captures d’écran, des fils de discussions et des images. Dans un message partagé sur Discord cinq mois avant l’attaque, il aurait indiqué que la fusillade qu’il allait commettre n’était qu’une extension de son activité en ligne. «Il est temps d’arrêter de troller en ligne, et de faire un effort pour que ce troll devienne réalité. Je vais mener une attaque contre ceux qui veulent nous remplacer», aurait-il lancé. Le manifeste extrémiste écrit par l’attaquant serait par ailleurs selon Buzzfeed composé en grande partie de publications volées et de plagiat venus de sites antisémites et racistes, dont des pages intitulées «La vérité sur les nègres» ou «Les juifs exposés». Le document serait aussi consacré à plusieurs suprémacistes blancs ayant commis des actes terroristes ces dernières années, dont Brenton Tarrant, le tueur de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, qui a tué 51 personnes dans deux mosquées en 2019.

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La décapitation d'un chat

Le «New York Post» évoque également un message publié le 25 mars, toujours sur Discord, dans lequel l’adolescent aurait admis avoir décapité un chat errant qui aurait attaqué son propre chat. «Quand je suis rentré à la maison, je mangeais une pizza quand ma chatte Paige a crié depuis le garage. J’y suis allé rapidement et ce chat gris l’attaquait. J’ai passé l’heure suivante à lui courir après dans le garage et à le poignarder avec mon couteau». Il aurait ensuite livré des détails glaçants sur la façon dont il a continué à le découper pour que sa tête se détache de son corps. Il aurait ajouté n’avoir ressenti aucune émotion ni empathie pour ce chat et aurait publié un selfie de lui, sur lequel son visage est couvert de gouttes de sang du chat. «Je pensais que j'allais souffrir, mais je me sens littéralement vide», aurait-il écrit. «Enfin bref, ma chatte Paige est en sécurité maintenant, protégée de ce chat diabolique».

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Mais dans son journal, il semblait aussi parfois hésiter à passer à l’acte, expliquant même «attendre un signe» lui prouvant qu’il ne devait pas commettre sa fusillade. «Je ne suis pas fier de devoir tuer ces gens», aurait-il indiqué tout en disant devoir «sauver la race blanche». «Je ne peux pas dire à quel point je ne souhaite pas perpétrer cette attaque mais mon seul autre choix est le suicide. Je me demande si je suis mentalement malade et si c’est la raison pour laquelle je veux passer à l’acte. Les sept dernières années ont été si difficiles, je crois que je suis prêt à tout abandonner», aurait-il posté.

"Je pense qu’on peut me qualifier de fasciste"

Entre deux publications haineuses ou photo d’arme à feu , il expliquait également être effrayé par le covid-19 et se sentir «malheureux» de voir que les gens autour de lui ne portaient pas de masque. Après une visite chez son cousin, lors de laquelle il était le seul à porter un masque, il aurait écrit : «C'était trop à supporter et j'ai dû partir tôt et rentrer à pied à travers les bois, je me suis alors barricadé au sous-sol pendant quelques jours». Mais ses moments de vulnérabilité auraient à chaque fois été rapidement effacés par ses théories racistes et la préparation de son attaque. L’endroit aurait ainsi été spécifiquement choisi. Alors que le tireur vit à Conklin où la population est blanche à 95%, il se serait rendu à Buffalo, à 320 kilomètres de chez lui, choisissant un quartier habité par une majorité d’Afro-Américains. En plus de son fusil d’assaut, il avait en outre dans sa voiture deux autres armes prêtes à servir. Dans ses messages, Payton Gendron accordait une large place à l’équipement qu’il allait utiliser, notamment un casque militaire qu’il comptait acheter en ligne sur eBay ou Amazon, ainsi qu'un certain type de vêtements qu'il prévoyait de porter lors de la fusillade, y compris un modèle spécifique de chaussettes. Il aurait aussi décrit la façon dont il parvenait à trouver de l’argent pour organiser son attentat, en vendant des vêtements et revendant des pièces en argent. «Mes parents savent peu de choses sur moi, ils ne savent rien des centaines d'onces d'argent que j'ai eues, ni des centaines de dollars que j'ai dépensés en munitions. Ils ne savent pas que j'ai dépensé près de 1 000 dollars pour des conneries militaires. Ils ne savent même pas que je possède un fusil de chasse ou un AR-15, ou des magazines illégaux», aurait-il noté en février dernier.

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Tout comme le terroriste de Christchurch qu’il surnommait «Saint Tarrant», Payton Gendron a lui aussi filmé sa fusillade en direct et l’a diffusé sur Twitch. «Je lui ai volé plein d’infos parce qu’il en parle mieux que moi», aurait-il souligné, ajoutant : «Je pense qu’on peut me qualifier de fasciste. Le fascisme est l’une des seules idéologies politiques qui va unir les blancs contre les remplaçants. Le conservatisme est mort». Selon l’enquête, la veille de l’attaque terroriste, Payton Gendron serait venu reconnaitre les lieux. Il aurait déjà fait de même dès le 8 mars dernier. «C’était clairement un crime raciste motivé par la haine. Cette personne est diabolique», a commenté le shérif du comté d’Erie, John Garcia. «Honnêtement, tout ça est un immense meme. Je suis juste en train de préparer un troll de grande qualité», aurait-il écrit l’adolescent le 5 mai, neuf jours avant le massacre. Pour l’instant, Payton Gendron a été inculpé pour assassinat et a plaidé non coupable. De nouvelles charges pour crime de haine et terrorisme pourraient être prochainement ajoutées.

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