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Les cartes de la guerre en Ukraine, depuis le début de l’invasion russe, en février 2022

Le Monde
Publié le 28 juillet 2023 à 09h48, modifié le 04 mars 2024 à 10h48 (republication de l’article du 19 mars 2022 à 06h00)

Temps de Lecture 27 min.

Les cartes et infographies réunies dans cet article permettent de voir l’évolution des territoires contrôlés par les Russes en Ukraine depuis le 24 février 2022, ainsi que les enjeux humanitaires, économiques et militaires du conflit.

La carte ci-dessous montre, semaine après semaine, l’évolution des territoires contrôlés par les Russes en Ukraine depuis le début de l’offensive. Elle s’appuie sur les observations de l’Institut pour l’étude de la guerre (Institute for the Study of War, ISW), une organisation non gouvernementale américaine, ainsi que celles de l’Institut australien de politique stratégique (Australian Strategic Policy Institute, ASPI) et de War Mapper. Elle est mise à jour toutes les semaines, le lundi.

Déplacez la glissière pour naviguer dans la chronologie après plusieurs mois de guerre ou utilisez les flèches du clavier.

Pour afficher l'évolution quotidienne du conflit du 24 février au 9 mai 2022, vous pouvez consulter l'ancienne version de cette carte.

Kiev Kiev Kharkiv Kharkiv Lviv Lviv Sébastopol Sébastopol Odessa Odessa Dnipro Dnipro Tchernihiv Tchernihiv Marioupol Marioupol Donetsk Donetsk Louhansk Louhansk Kherson Kherson Vinnytsia Vinnytsia Tcherkassy Tcherkassy Soumy Soumy Zaporijia Zaporijia Mykolaïv Mykolaïv Kryvy Rih Kryvy Rih Izioum Izioum Sievierodonetsk Sievierodonetsk Bakhmout Bakhmout Melitopol Melitopol Avdiïvka Avdiïvka Mer Noire Crimée annexée depuis 2014 Crimée annexée depuis 2014 Biélorussie Russie Roumanie Moldavie Ukraine 100 km
Territoire occupé par la Russie
Zone de combats
Mouvements russes
Contre-offensives ukrainiennes
Ville tenue par les Ukrainiens
Ville conquise par les Russes
Ville au statut disputé
Centrales nucléaires en service

En juillet, Odessa, grande ville portuaire du sud de l’Ukraine, a subi le feu russe : du 19 au 24 juillet, la ville et sa région ont essuyé cinq nuits consécutives de bombardements. Vingt-cinq bâtisses touchées étaient classées au Patrimoine mondial de l’Unesco. Comme à d’autres occasions, la Russie affirme n’avoir visé que des « cibles militaires ». Le chœur de la cathédrale de la Transfiguration a notamment été troué dans la nuit du 22 au 23 juillet. Le port a également été frappé, par stratégie, cette fois, plutôt que par volonté de destruction d’un emblème : l’essentiel des exportations du blé ukrainien transite en effet par la « baie du pain », le surnom d’une installation sur la mer Noire. Les dégâts sont considérables et les travaux de reconstruction pourraient prendre plus d’un an.

Déjà touché par une explosion en octobre, le pont de Crimée a de nouveau été visé dans la nuit du 16 au 17 juillet. Au moins deux personnes ont été tuées, alors que l’ouvrage est largement emprunté par les nombreux touristes en été. L’impact d’une attaque sur ce pont est aussi politique. Pont le plus long d’Europe, il a été construit par une société proche du Kremlin et personnellement inauguré par Vladimir Poutine. Il relie, en outre, la Russie à la Crimée, péninsule ukrainienne annexée par Moscou en 2014. Après l’explosion d’octobre, l’Ukraine n’avait admis qu’indirectement l’attaque, des mois plus tard.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés La Crimée, une péninsule à laquelle la Russie a lié son sort

Après avoir combattu plusieurs mois aux côtés de l’armée russe en Ukraine, le Groupe Wagner, mené par son chef, Evgueni Prigojine, a tenté de se rebeller entre le 23 et le 24 juin. Les paramilitaires ont été aperçus à moins de 400 kilomètres de Moscou, et ont momentanément pris le contrôle du quartier général de l’armée russe à Rostov (Sud-Ouest), centre névralgique des opérations en Ukraine. Evgueni Prigojine a même affirmé s’être approché à quelque 200 kilomètres de la capitale russe, avant que ses troupes ne fassent demi-tour. Le groupe et son chef sont désormais en Biélorussie, et n’interviendront plus sur le terrain ukrainien, a annoncé M. Prigojine.

Lire le portrait : Article réservé à nos abonnés Evgueni Prigojine, chef du Groupe Wagner et dynamiteur de l’Etat russe

L’armée ukrainienne a déclenché une contre-offensive au début de juin, concentrant ses efforts sur le sud et l’est du pays. A la mi-juillet, l’Ukraine affirmait que l’armée avait repris 180 kilomètres carrés dans le Sud et 30 kilomètres carrés dans l’Est, essentiellement autour de Bakhmout, tombée sous le contrôle russe en mai. La contre-offensive s’annonce « assez difficile [et] longue », selon un conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, à l’Agence France-Presse le 19 juillet, notamment du fait des problèmes d’approvisionnement en armes occidentales et des mines posées par les Russes. Selon des responsables du Pentagone cités par le New York Times le 27 juillet, les opérations entrent dans une nouvelle phase avec le déploiement à venir de milliers de renforts entraînés par l’Occident qui étaient jusqu’alors gardés en réserve.

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Une explosion s’est produite le 5 juin sur une conduite d’ammoniac, près de Massioutovka, village aux mains des forces russes dans la région de Kharkiv (nord-est de l’Ukraine). Le pipeline, qui relie la ville russe de Togliatti, sur les rives de la Volga, à Odessa, le port ukrainien le plus important de la mer Noire, permettait à la Russie d’exporter annuellement plus de 2,5 millions de tonnes d’ammoniac, composant essentiel des engrais minéraux. Moscou et Kiev se sont mutuellement accusés d’avoir saboté l’infrastructure.

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La menace planait depuis sa capture, au début de l’invasion de l’Ukraine déclenchée par Moscou : le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka, dans le sud de l’Ukraine, a été détruit en partie dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 juin. Plusieurs villes et villages ont été inondés en Ukraine, jusqu’à la ville de Kherson. Des dizaines de milliers d’habitants ont été évacués, et au moins 45 personnes sont mortes. La destruction du barrage, imputée aux Russes, a provoqué une importante pollution du fleuve Dniepr, et menaçait d’affecter le refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire de Zaporijia, qui puise son eau dans ce lac artificiel de 18 milliards de mètres cubes.

Barrage de Kakhovka : les zones inondables

Pluie de roquettes, incursions, sabotages, incidents à répétition… nulle part ailleurs en Russie, la guerre n’est aussi tangible que dans la région de Belgorod, limitrophe du nord-est de l’Ukraine. Le 22 mai par exemple, plusieurs dizaines de membres de la légion Liberté de la Russie et du Corps des volontaires russes (RDK), deux mouvements issus de l’opposition à Vladimir Poutine, y ont mené une incursion d’une ampleur inédite. Le ministère de la défense russe assure qu’ils ont été repoussés sans coup férir, mais l’humiliation est d’autant plus cuisante qu’elle est loin d’être la première – et manifestement pas la dernière.

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C’est devenu un enjeu diplomatique de premier ordre au fil des douze mois de la guerre menée par la Russie en Ukraine : les Occidentaux peinent à rallier le soutien de pays dits « du Sud global » qui refusent de choisir leur camp, considérant que ce conflit est avant tout européen. Au fil des votes des Nations unies, la guerre en Ukraine a révélé le fossé qui se creuse entre l’Ouest et les pays du Sud global.

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Dans le secteur de Bakhmout, les forces russes, composées de l’armée régulière, de nouveaux mobilisés et des mercenaires de la milice privée Wagner, sont à l’offensive depuis plusieurs mois. Ici, les combats sont intenses et les pertes humaines importantes, dans les deux camps.

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Soledar, près de Bakhmout, est, en ce début janvier, un objectif prioritaire pour Moscou. La petite ville – 11 000 habitants avant le début de la guerre – ne représente pourtant pas un grand intérêt stratégique. Elle permet cependant aux forces russes, qui revendiquent sa prise le 10 janvier, d’afficher une victoire après plusieurs semaines de déroutes.

C’est une première depuis le début de la guerre : le 5 décembre, deux bases aériennes russes, situées à environ 500 et 600 kilomètres de l’Ukraine, sont la cible d’attaques, tuant trois soldats et endommageant au moins deux bombardiers lourds. Le lendemain, un autre aérodrome militaire russe, situé à Koursk, est attaqué sans provoquer de victimes. Ces attaques marquent la volonté des autorités ukrainiennes d’entraver les frappes menées depuis le début de l’automne par Moscou sur les infrastructures civiles du pays.

Frappes de drone en territoire russe

Un « projectile de fabrication russe » s’est abattu le 15 novembre à 15 h 40 à Przewodow, village polonais situé à 6 kilomètres de la frontière ukrainienne, causant la mort de deux personnes. Aurait-il été tiré par la Russie ? Après plusieurs heures de flottement et de ton alarmiste, la tension retombe : le président polonais juge finalement « hautement probable » que le missile ait été tiré par la défense ukrainienne – une hypothèse également soutenue par Washington et par l’OTAN.

Frappes russes et incident à la frontière polonaise le 15 novembre

Bouter les Russes hors de la rive droite du Dniepr était présenté depuis des mois comme l’un des objectifs majeurs de l’armée ukrainienne. La région de Kherson offre un accès vers Odessa, port de la mer Noire situé plus à l’ouest, par lequel l’essentiel des récoltes de céréales ukrainiennes est exporté. Elle est située à 170 kilomètres de la Transnistrie, enclave moldave aux mains de prorusses. La ville de Kherson est finalement reprise aux forces russes le 11 novembre, après huit mois d’occupation.

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A la fin du mois de septembre, des explosions visent les gazoducs Nord Stream 1 et 2, provoquant de spectaculaires fuites de gaz. Rapidement, la piste du sabotage est privilégiée. Cet épisode vient s’ajouter à de nombreux incidents suspects : des drones espions en Norvège, une coupure d’électricité géante sur l’île danoise de Bornholm, des cyberattaques en Pologne et en Ukraine…

Après la puissante explosion qui a endommagé le pont de Crimée, samedi 8 octobre à l’aube, les autorités russes ont conduit une série de frappes visant le territoire ukrainien.

Zaporijia, que la Russie considère officiellement comme appartenant à son territoire, a été ciblée dès samedi par des frappes qui y ont fait au moins treize morts. Lundi, c’était au tour de Dnipro, Kharkiv, Odessa, Khmelnytsky, Mykolaïv, Rivne, Poltava, Lviv, Jytomyr, Ternopil, Vinnytsia et surtout Kiev d’être ciblées. La capitale ukrainienne, épargnée depuis plusieurs mois, et que les plus radicaux appellent régulièrement à écraser sous les bombes, a reçu plusieurs salves de missiles, y compris en plein centre-ville, sur des objectifs civils plus symboliques que stratégiques.

Alors que les troupes ukrainiennes mènent depuis début septembre une contre-offensive, notamment pour reprendre la région occupée de Kherson (sud), le président Volodymyr Zelensky a affirmé jeudi 8 septembre que ses forces avaient repris à l’armée russe la ville de Balaklia, dans la région de Kharkiv, à l’est du pays.

Entre le mardi 6 et le mercredi 7 septembre, l’armée ukrainienne a percé les lignes de défense russes et progressé d’au moins 15 kilomètres. Des images filmées par les Ukrainiens et des témoignages des deux côtés attestent ce mouvement, survenu dans l’une des zones les moins médiatisées de la ligne de front qui s’étire sur 2 000 kilomètres.

Alors que le conflit entre l’Ukraine et la Russie entre dans son septième mois, l’armée de Kiev continue de résister aux assauts des troupes de Moscou, pourtant dotées d’une puissance de feu très supérieure. Certes, quelque 20 % du territoire ukrainien sont aujourd’hui occupés par les forces russes, à l’est et dans le sud du pays, mais l’ex-Armée rouge n’avance plus depuis le début de l’été, malgré des bombardements quotidiens et d’innombrables tentatives de percée du front, notamment dans le Donbass.

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Reste que Kiev a un besoin crucial d’armes occidentales pour poursuivre sa résistance et lancer une contre-offensive, avant que Moscou ne reconstitue une partie de son armée.

Restée à l’écart des combats depuis le lancement de l’offensive russe en Ukraine, le 24 février, la péninsule de Crimée, annexée par la Russie en 2014, est dans le viseur de l’armée ukrainienne. Après une première attaque, le 9 août, sur l’aérodrome militaire de Saky, situé dans l’ouest de ce territoire, de violentes explosions ont de nouveau secoué, mardi 16 août, une base russe installée dans le district de Djankoï, dans le nord-est de la région.

Des frappent non revendiquées par Kiev mais qui s’inscrivent dans une stratégie ukrainienne de harcèlement. Et qui répondent aussi à un objectif politique : montrer que l’Ukraine n’a pas renoncé à la Crimée, malgré huit ans d’occupation russe.

Les deux belligérants s’accusent mutuellement de bombarder cette centrale située dans le sud de l’Ukraine et tombée début mars aux mains des soldats russes, sans qu’aucune source indépendante ne puisse confirmer qui est à l’origine des tirs.

Le bombardement du site de Zaporijia « par les forces armées ukrainiennes » « pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour une vaste zone, y compris pour le territoire européen », a averti lundi 8 août le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. « Il n’y a pas une seule nation au monde qui puisse se sentir en sécurité lorsqu’un Etat terroriste bombarde une centrale nucléaire », avait affirmé la veille dans sa vidéo quotidienne le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

L’AIEA avait jugé samedi « de plus en plus alarmantes » les informations en provenance de Zaporijia, dont l’un des réacteurs a dû être arrêté après une attaque survenue la veille. Au moment de la prise de la centrale, les militaires russes avaient ouvert le feu sur des bâtiments, au risque d’un accident nucléaire majeur.

Désormais maîtres de la région de Louhansk, les troupes russes s’attaquent à de nouveaux objectifs dans celle de Donetsk, toujours dans l’est de l’Ukraine, confirmant l’entrée de la guerre dans une nouvelle phase plus de quatre mois après son déclenchement.

La prise de la ville de Lyssytchansk dimanche 3 juillet a permis à Moscou de parachever son offensive sur la région de Louhansk, l’une des deux du Donbass, le grand bassin industriel de l’est de l’Ukraine devenu le plus important champ de bataille d’Europe depuis des décennies.

Officiellement, l’armée russe a perdu très peu d’hommes depuis le début du conflit. Son dernier bilan, publié le 25 mars, faisait état de 1 351 soldats tués et 3 825 blessés. Depuis, aucune indication n’a été donnée par Moscou. Selon les analystes, ces pertes seraient en réalité dix fois plus importantes, au minimum.

Zone de frictions entre les sphères d’influence russe et européenne, la petite république moldave du Dniestr (« Transnistrie ») est une anomalie géopolitique, à l’origine d’un conflit « gelé » qui menace de s’embraser depuis l’invasion russe en Ukraine.

Les forces russes contrôlent actuellement « environ 20 % » du territoire ukrainien, soit près de 125 000 kilomètres carrés, a déclaré jeudi 2 juin le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans une adresse au Parlement luxembourgeois.

Dans l’Est, l’armée russe est entrée dans Sievierodonetsk et pilonne la ville voisine de Lyssytchansk. Au nord, Sloviansk et Kramatorsk craignent, après la chute de Lyman, d’être les prochaines cibles. De la résistance ou non de ces quatre villes dépend le sort du Donbass.

« Les prochaines semaines de guerre seront difficiles », a prévenu lundi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans son allocution télévisée quotidienne. Après avoir éloigné les forces russes des deux plus grandes villes du pays, la capitale Kiev fin mars et début avril puis Kharkiv en mai, les Ukrainiens reconnaissent depuis quelques jours des « difficultés » dans le Donbass, formé par les oblasts de Lougansk et Donetsk.

C’est la chute d’un symbole. Moscou a annoncé, vendredi 20 mai, au 86e jour de guerre, avoir achevé la conquête de Marioupol. La ville portuaire stratégique sur la mer d’Azov est devenue l’incarnation à la fois du martyre et de la résistance de l’Ukraine. Pour les forces russes, après l’échec dans le nord du pays, des assauts contre Kiev, la capitale, puis contre Kharkiv, la deuxième ville du pays, la prise de contrôle total de Marioupol est le premier succès militaire majeur du conflit déclenché le 24 février. Kiev estime que 20 000 personnes ont été tuées à Marioupol et que 80 % de ceux qui ont survécu ont fui la cité portuaire. La force d’occupation russe règne ainsi sur un champ de ruines, parmi des survivants meurtris.

L’Ukraine se prend à rêver d’une libération complète de son territoire, non seulement des zones occupées depuis le 24 février, mais aussi du Donbass « séparatiste » et de la Crimée annexée en 2014. L’afflux d’aide militaire occidentale pourrait favoriser ou accélérer un basculement du rapport de force en faveur des forces ukrainiennes. Mais mener une grande offensive dans le Sud sera difficile. La reconquête de la région de Kherson impose de traverser la frontière naturelle constituée par le Dniepr et de combattre sur la steppe, qui n’offre guère de moyens de se dissimuler. L’hypothèse d’un enlisement débouchant sur une guerre de position paraît probable.

Enchâssé entre Pologne et Lituanie, l’oblast de Kaliningrad est une enclave russe au cœur de l’OTAN. Annexée par Staline à l’issue de la seconde guerre mondiale, cette région stratégique s’est muée en forteresse militaire consacrée à la défense de l’URSS durant la guerre froide, puis de la Russie après 1991.

Alors que Vladimir Poutine s’évertue depuis des années à développer sa flotte du Nord, c’est à Kaliningrad, siège de la flotte de la Baltique, qu’il envoie des avions MiG-31K, équipés de missiles hypersoniques Kinjal – capables de porter des ogives nucléaires et présentés comme l’une des six armes de nouvelle génération de la Russie, renforçant ainsi son arsenal en plein territoire otanien, deux semaines avant l’invasion de l’Ukraine, le 24 février.

Pour aller plus loin : Article réservé à nos abonnés Kaliningrad, une épine dans le pied de l’OTAN

En dix ans, l’Ukraine est devenue l’un des principaux exportateurs mondiaux de céréales. Une formidable logistique agricole grippée par l’invasion russe déclenchée le 24 février. Le blocus de la mer Noire menace la sécurité alimentaire de nombreux pays qui se fournissent auprès de Kiev en blé, maïs, colza, tournesol, orge…

Dans une série en trois épisodes, « Le Monde » revient sur l’histoire des liens entre les deux pays et sur la manière dont des mémoires antagonistes s’affrontent.

1918-1920 : la République populaire d’Ukraine ou l’histoire d’un effacement

Mer Noire
Mer Baltique
Mer Caspienne
Rus’
de Kiev
Frontières
actuelles
Principale
voie commerciale
Moscou
Hambourg
Kiev
Birka
Lübeck
Venise
Constantinople
Prague
Novgorod
Hetmanat
cosaque
en 1654
Empire
d’Autriche
Moldavie
Balachie
Khanat
de
Crimée
Empire ottoman
Tsarat
de Russie
République
des
Deux Nations
Mer Noire
Lviv
Sébastopol
Odessa
Kharkiv
Kiev
Marioupol
Zaporijia
Prusse
Empire ottoman
Empire
de Russie
Empire
d’Autriche
Empire
allemand
Empire
austro-
hongrois
Empire
de Russie
Royaume
de Roumanie

882-1240

La Rus’ de Kiev, premier Etat des Slaves orientaux christianisés

A partir du VIIIe siècle, l’expansion vers l’est des Vikings scandinaves, les Varègues, permet d’ouvrir une voie commerciale fluviale reliant la mer Noire à la Baltique. Kiev devient alors un carrefour commercial et un centre de pouvoir rassemblant des peuples slaves sous sa principauté. Après la conversion au christianisme du prince Vladimir (988), la Rus’ s’étend vers Novgorod et Moscou, puis se morcelle et disparaît au XIIIe après l’invasion mongole.

XVIIe siècle

L’Ukraine partagée entre Russie et Pologne

Les Cosaques, issus de populations semi-nomades ayant agrégé des paysans fuyant le servage, rayonnent sur la steppe aux confins – en russe oukraïna, à l’origine du toponyme « Ukraine » – de différents royaumes. En 1654, ils s’allient au tsar de Russie. Mais, en 1667, la Russie s’entend avec la République des Deux Nations (Pologne et Lituanie) pour se partager la région. Le territoire est alors divisé : à l’ouest du fleuve Dniepr, les Polonais, et à l’est, Moscou, qui règne sur la Malorossia, la « Petite Russie » . Au sud, les rives de la mer Noire restent sous contrôle ottoman et tatar.

XVIIIe siècle

L’expansion russe

Catherine II étend l’Empire russe aux steppes et aux rives de la mer Noire. Entre 1772 et 1795, à la faveur des partages de la Pologne, devenue protectorat russe, elle reconquiert les terres de l’ancienne Rus’ à l’ouest du Dniepr, tandis que l’Empire austro-hongrois acquiert la région de Lviv. Au sud, elle défait les Ottomans en 1774 et 1783. Elle contrôle alors la Novorossia (« Nouvelle Russie ») qui court de l’embouchure du Dniestr à celle du Don, en passant par la péninsule de Crimée, lui offrant un accès à la mer Noire.

1917-1921

La période révolutionnaire

En 1917, la révolution de février disloque l’Empire russe. Un Parlement ukrainien, la Rada, se constitue à Kiev et revendique l’indépendance de la République populaire d’Ukraine. Un an plus tard, celle-ci signe avec les empires centraux une paix séparée à Brest-Litovsk, parallèlement à la nouvelle République soviétique russe. La République soviétique ukrainienne, proclamée à Kharkiv en 1918, dispute le pouvoir à Kiev et gagne la guerre civile qui s’ensuit, avant de participer à la création de l’URSS en 1922.


Frontière accordée à la république ukrainienne par les puissances centrales, lors du traité de Brest-Litvosk en 1918
Frontière revendiquée par la République populaire d’Ukraine en 1919, couvrant les territoires peuplés d’Ukrainiens
Frontière revendiquée par la République socialiste soviétique d’Ukraine, à la création de l’URSS en 1922

Infographie Le Monde : Francesca Fattori, Xemartin Laborde, Delphine Papin et Lucie Rubrice

Sources : F. de Jabrun, Atlas de l’Ukraine, Diploweb.com, 2010 ; C. Grataloup, P. Boucheron, Atlas historique mondial, L’Histoire-Les Arènes, 2019 ; Encyclopédie Britannica ; Limes ; T. Chopard

Cartes réalisées avec l'aide de Thomas Chopard, chercheur au Centre de recherches Europes-Eurasie de l'Inalco et directeur-adjoint du Centre d'études franco-russe

En Ukraine, la grande famine de 1933, une tragédie étouffée

La relecture de la seconde guerre mondiale, autre front entre la Russie et l’Ukraine

La Moldavie, petit pays neutre d’Europe orientale, peuplé de 2,6 millions d’habitants, subit de plein fouet les conséquences de la guerre qui se déroule chez son voisin ukrainien et qui a conduit plus de 400 000 personnes à se réfugier sur son sol. Mais Chisinau (la capitale) redoute surtout que le conflit gagne ses frontières. Au cœur de ses préoccupations : la région séparatiste prorusse de Transnistrie.

Des tirs ont été entendus mercredi 27 avril près d’un dépôt de munitions russes situé sur ce territoire, laissant craindre que la Moldavie devienne à son tour une cible du Kremlin.

La Russie a déclaré mardi 19 avril avoir mené une dizaine de frappes dans l’est de l’Ukraine, au lendemain de l’annonce par Kiev d’une nouvelle offensive de l’armée russe dans cette région. A l’aide de « missiles de haute précision », les forces aériennes russes ont « neutralisé 13 places fortes » de l’armée ukrainienne, a affirmé le ministère de la défense russe, en appelant à la reddition de « tous les militaires ukrainiens ». Les autorités locales ont de leur côté appelé les habitants à fuir cet « enfer », malgré l’absence de couloirs humanitaires.

Alors que certaines sources prédisent la chute imminente de la ville de Marioupol, position stratégique dans le sud du Donbass, Kiev a plusieurs fois appelé la population des deux régions de Donetsk et Louhansk à fuir au plus vite et se prépare depuis plusieurs jours à une attaque imminente. Quelles formes pourrait prendre cette offensive ? Quelles sont les options militaires de la Russie ? Quelle résistance les Ukrainiens sont-ils capables d’opposer ? Les différents scénarios militaires possibles, réalisés avec Vincent Tourret, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique, et l’historien militaire Michel Goya.

Vendredi 15 avril, 4 796 245 réfugiés ukrainiens étaient enregistrés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

Durant la première phase de l’invasion par la Russie, les missiles antichars, antiaériens et les drones de combat employés par les troupes ukrainiennes ont été parmi les armements les plus visibles et les plus efficaces. La raison principale du succès de ces armes est liée à l’échec du plan initial russe d’une guerre éclair, liée notamment à une maîtrise imparfaite du ciel, qui a cédé la place à des combats urbains et à une bataille de convois.

Sur mer, la guerre navale a été marquée par la perte hautement symbolique, côté russe, du croiseur Moskva, un type de navire très imposant (plus de 13 000 tonnes), long de 186 mètres, capable de coordonner des opérations et de commander plusieurs autres navires en même temps.

Un missile a touché vendredi 8 avril la gare de Kramatorsk, dans l’est de l’Ukraine, causant la mort d’au moins 52 personnes, dont cinq enfants.

Un « mal sans limite », selon le président ukrainien, Volodymyr Zelensky ; une « horrible atrocité » commise par Moscou pour le président des Etats-Unis, Joe Biden ; un « crime contre l’humanité », selon la diplomatie française : ce massacre a suscité une vague de condamnations occidentales, mais Moscou a nié toute responsabilité.

Le point sur la situation à Kramatorsk le 8 avril 2022.

Une course contre la montre s’est engagée entre les armées russe et ukrainienne pour se redéployer dans l’est du pays, dans ce qui sera probablement le principal théâtre d’affrontement entre les deux pays. L’armée russe amorce une manœuvre classique consistant à prendre en tenaille le corps d’armée ukrainien défendant le Donbass.

Les résultats de cette offensive restent, pour l’instant, incertains. L’isolement des forces du Donbass serait désastreux pour l’Ukraine. Si elle réussissait, l’opération permettrait à Moscou de mettre à terme la main sur les régions administratives de Donetsk et de Louhansk. C’est désormais l’objectif militaire principal affiché par le ministère de la défense russe. Pour l’heure, l’état-major, à Moscou, ne donne aucune information sur la tentative d’encerclement des troupes ukrainiennes.

Infographie - La tenaille russe dans le Donbass. 6 avril 2022.

L’Ukraine a annoncé samedi 2 avril que toute la région de Kiev était « libérée », après le retrait fulgurant des forces russes – Moscou a annoncé le 25 mars son intention de se concentrer désormais sur la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine.

A mesure que les troupes russes se sont repliées des régions de Kiev et de Tchernihiv, les forces ukrainiennes ont pu reprendre des dizaines de localités, dévastées par les combats : « Irpine, Boutcha, Hostomel et toute la région de Kiev ont été libérées de l’envahisseur », a affirmé la vice-ministre de la défense ukrainienne, Hanna Maliar.

Dans ces villes, à Boutcha notamment, des centaines de cadavres de civils ukrainiens ont été découverts après le départ des soldats russes, des images qui ont scandalisé le monde entier.

Jeudi 31 mars, Moscou a dit accepter la mise en place, vendredi 1er avril, d’un « couloir humanitaire » pour permettre aux habitants de la ville martyre de Marioupol de fuir la cité, assiégée, isolée et bombardée sans relâche depuis plus d’un mois. Les autorités ukrainiennes ont décidé de dépêcher sur place un convoi de quarante-cinq bus, afin d’évacuer la population dès que possible vers Zaporijia. Mais côté occidental, beaucoup doutaient que l’opération puisse être menée à bien. D’après un bilan de la mairie établi lundi, au moins 5 000 personnes ont été tuées à Marioupol depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine, le 24 février.

Les progrès annoncés sur le plan diplomatique font écho à certains succès ukrainiens sur le plan opérationnel. L’Ukraine a ainsi affirmé lundi avoir « libéré » la ville d’Irpine, près de Kiev, où de violents combats ont eu lieu. Le petit village de Mala Rohan, à 4 kilomètres à l’est de Kharkiv, a, lui aussi, été reconquis, de même que la ville de Trostianets, au nord-est du pays. Dans le Sud, le responsable militaire de Kryvy Rih, où a grandi Volodymyr Zelensky, a, quant à lui, affirmé que les forces russes avaient « été repoussées à 40-60 kilomètres de la ville ».

Mais la situation demeure aussi très volatile. « Le rapport de force entre les deux camps est très variable d’un front à un autre », résume une source militaire. Au sud et à l’est du pays, les forces russes restent à l’offensive. Sur le front méridional, malgré quelques revers très localisés, ces troupes semblent en passe d’établir une continuité territoriale qui leur permettrait de tenir entièrement le littoral de la mer d’Azov. Marioupol, où 160 000 civils sont assiégés et pilonnés par l’armée russe, est la dernière poche de résistance ukrainienne dans cette zone.

Contre-offensive à Mykolaïv.

La relation nouée entre les présidents Vladimir Poutine et Xi Jinping est si forte que les deux hommes se sont déjà rencontrés à trente-huit reprises. Les deux anciens pays « frères » communistes, longtemps brouillés après la déstalinisation de l’URSS, ont renoué avec une amitié « sans limites », marquée notamment, sur le plan énergétique, par un accord prévoyant l’exportation annuelle vers Pékin de 38 milliards de mètres cubes de gaz naturel russe, acheminés par un nouveau gazoduc long de près de 4 000 kilomètres, à travers la Sibérie orientale. Mais la Chine est écartelée entre son partenariat stratégique avec la Russie et ses impératifs économiques menacés par les conséquences de l’invasion de l’Ukraine.

Sur le terrain, les combats continuent mais l’étau semblait se desserrer dans certaines villes assiégées, comme à Mykolaïv, ville verrou sur la route d’Odessa, plus grand port d’Ukraine, pilonnée depuis des jours par l’artillerie russe. Le front a même sensiblement reculé, avec une contre-offensive ukrainienne sur Kherson, à quelque 80 km au sud-est, seule ville d’importance dont l’armée russe ait revendiqué la prise totale depuis le début de son invasion de l’Ukraine le 24 février.

Le ministère de la défense russe a annoncé, vendredi 25 mars, que ses forces se concentreraient désormais sur une « libération » complète du Donbass – région ukrainienne située dans l’est du pays, à la frontière avec la Russie. L’armée russe contrôle 93 % du territoire de la « république populaire de Louhansk » et 54 % du territoire de la « république populaire de Donetsk », a précisé le ministère de la défense.

L’annonce de ce recentrage apparent des objectifs militaires de Moscou survient alors que les lignes de front n’ont plus bougé depuis des jours à proximité des grandes villes assiégées par l’armée russe, dont Kharkiv, Tchernihiv et Mykolaïv, et alors que les forces ukrainiennes semblent même avoir repris l’ascendant à l’est de Kiev.

Dimanche 20 mars, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a dénoncé le bombardement de l’école d’art de Marioupol, détruite par des frappes russes alors que 400 personnes – femmes, enfants et personnes âgées – y étaient réfugiées selon les autorités locales. « Le bilan du nombre de victimes est en train d’être clarifié », a souligné la municipalité.

Infliger « une chose pareille à une ville pacifique (…), c’est un acte de terreur dont on se souviendra même au siècle prochain », a asséné M. Zelensky, dénonçant un nouveau « crime de guerre ».

Assiégée, privée de couloirs humanitaires durables et bombardée sans cesse depuis seize jours, Marioupol, le grand port du sud de l’Ukraine, a subi des destructions inimaginables pour ses habitants. Ils seraient encore 300 000 à survivre dans des conditions terribles.

Mercredi 16 mars, un bombardement a dévasté le Théâtre dramatique, dans le centre-ville. Le bâtiment a été détruit mais l’abri antibombes, dans lequel « plus d’un millier » de civils s’étaient réfugiés, est intact, selon deux députés ukrainiens. Sur sa page Facebook, Sergiy Taruta annonce que « les gens [en] sortent vivants », sans pouvoir donner de chiffres précis.

La Russie nie avoir bombardé le lieu et accuse le régiment Azov, formation d’extrême droite ukrainienne, sur qui il avait déjà rejeté la responsabilité de l’attaque d’une maternité. L’ONG Human Rights Watch a expliqué, mercredi, qu’elle ne pouvait pas « exclure la possibilité d’une cible militaire ukrainienne dans la zone du théâtre ». « Mais nous savons que le théâtre abritait au moins cinq cents civils. »

Plusieurs fortes explosions ont été entendues mardi à l’aube dans le raïon (quartier administratif) Chevtchenkivsky, où un bâtiment de douze étages a été endommagé. La presse n’est pas autorisée à circuler dans la ville en raison du couvre-feu, le deuxième depuis le début de la guerre. De violents combats ont lieu à la périphérie nord-ouest, dans et autour des villes d’Irpine, d’Hostomel et de Boutcha.

Stratégie voulue ou subie ? Pour un responsable du département de la défense des Etats-Unis, cité par Associated Press, les troupes russes tirent à l’artillerie lourde sur le centre-ville de Kiev précisément parce qu’elles ne peuvent plus avancer. Elles se trouveraient à une quinzaine de kilomètres de la capitale depuis plusieurs jours.

Au douzième jour de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Moscou poursuit son offensive tous azimuts, bombardant notamment la deuxième ville du pays, Kharkiv (dans l’est du pays), et tentant d’encercler Kiev (dans le Nord).

La Russie a annoncé, lundi 7 mars, l’ouverture de plusieurs corridors humanitaires et l’instauration de cessez-le-feu locaux pour évacuer des civils de Kiev, de Kharkiv, du port assiégé de Marioupol (dans le Sud-Est), de Tchernihiv (dans le Nord) et de Soumy (dans le Nord également, proche de la frontière russe). En réalité, les deux tiers de ces couloirs humanitaires devaient permettre de rejoindre la Russie ou la Biélorussie, son alliée. Résultat : les autorités ukrainiennes ont refusé l’évacuation de leurs ressortissants par le biais de ces corridors, placés de fait sous contrôle russe. « Il y a eu un accord sur les couloirs humanitaires. Est-ce que ça a fonctionné ? A la place, ce sont les chars russes qui ont fonctionné, les lance-roquettes russes, les mines russes », a confirmé, en fin de journée, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

Les multiples violations russes du cessez-le-feu ont empêché les civils de quitter la grande ville portuaire de Marioupol (dans le Sud-Est), en état de siège. L’évacuation de cette ville de 450 000 habitants, qui devait commencer samedi 5 mars en fin de matinée, « est reportée pour des raisons de sécurité » car les forces russes « continuent de bombarder Marioupol et ses environs », a déclaré la municipalité sur le réseau social Telegram. Contrairement aux affirmations de la Russie, le corridor humanitaire entre Marioupol et Zaporijia, à 220 kilomètres au nord-ouest – et sous contrôle ukrainien –, ne fonctionne pas. La situation est similaire à Volnovakha, une localité située à une soixantaine de kilomètres au nord de Marioupol et elle aussi encerclée.

L’Ukraine dispose de quinze réacteurs nucléaires en service répartis sur quatre sites. Le pays est le septième producteur mondial d’énergie nucléaire, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

La centrale de Zaporijia (dans le Sud-Est), dont la Russie s’est emparée vendredi 4 mars, est la plus importante d’Europe. C’est un site stratégique : mettre la main dessus revient à maîtriser environ 20 % de la production électrique du pays.

Zaporijia, qui compte six réacteurs, a été touchée, dans la nuit du 3 au 4 mars, par des attaques russes. Un bâtiment a pris feu, faisant craindre une immense catastrophe nucléaire. Après plusieurs heures d’incertitude, les lieux ont été sécurisés et les réacteurs ont été « arrêtés en toute sécurité », selon des responsables américains, en lien avec Kiev.

Le site de Rivne, dans l’Ouest, possède quatre réacteurs nucléaires. Deux de ces réacteurs n’ont pas d’enceinte de confinement, dont la mission est de contenir d’éventuels produits radioactifs qui seraient relâchés et de protéger le réacteur d’impacts extérieurs. La centrale de Khmelnytsky, dans l’Ouest, compte deux réacteurs, et le site de l’Ukraine du Sud en a trois.

L’alimentation électrique du site de Tchernobyl a été « complètement coupée », mercredi 6 mars, « en raison des actions militaires de l’occupant russe », selon l’AIEA, qui a précisé que cela n’avait « pas d’impact majeur sur la sécurité ». La centrale – à l’origine de la plus grave catastrophe nucléaire civile dans le monde, en 1986, et qui n’est plus en activité depuis – est située dans le nord de l’Ukraine, près de la frontière biélorusse. Le personnel qui intervient sur les installations n’a pas pu sortir depuis la prise de contrôle du site par les Russes, le 24 février.

Des responsables ukrainiens ont confirmé, dans la nuit du mercredi 2 au jeudi 3 mars, la présence de l’armée russe à Kherson, grande ville du sud du pays que Moscou avait annoncé avoir conquise dans la matinée, après des combats acharnés. Il s’agit de la plus grande ville prise par les forces russes depuis le début de l’invasion, le 24 février. Cette ville portuaire, située non loin de la péninsule de Crimée, annexée en 2014 par Moscou, a subi d’intenses bombardements.

Kharkiv, la deuxième ville d’Ukraine (Nord-Est), proche de la frontière avec la Russie, est la cible d’intenses bombardements depuis plusieurs jours. Le 2 mars, l’armée ukrainienne a annoncé que « des troupes aéroportées russes [avaient] débarqué à Kharkiv » pendant la nuit. « Un combat est en cours entre les envahisseurs et les Ukrainiens », a ajouté l’armée ukrainienne.

A Kiev, de fortes explosions ont été entendues pendant la nuit. Des milliers de femmes et d’enfants dorment depuis plusieurs nuits dans le métro, transformé en abri antiaérien.

Le 3 mars, le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, a assuré à la télévision russe que l’« opération militaire » en Ukraine se déroulait « strictement selon le calendrier, selon le plan ». Il a répété que l’objectif était de « combattre des néonazis » pour sauver Russes et Ukrainiens, qui ne sont, selon lui, « qu’un seul peuple ».

Kharkiv, proche de la frontière avec la Russie, a été visée par d’intenses bombardements, mardi 1er mars, qui ont fait au moins vingt et un morts, selon le gouverneur régional. Mercredi 2 mars, l’armée ukrainienne a annoncé sur Telegram que « des troupes aéroportées russes [avaient] débarqué à Kharkiv » dans la nuit, et qu’« un combat [était] en cours ». Des frappes ont touché le centre de la police, l’université ou encore la mairie de cette ville de 1,4 million d’habitants. Les services d’urgence ont recensé au moins quatre morts.

Mercredi 2 mars, l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies (ONU) a adopté, à une écrasante majorité, une résolution qui « exige que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l’Ukraine ». En outre, le texte « condamne » la décision de Moscou d’« accentuer la mise en alerte de ses forces nucléaires ». Pilotée par l’Union européenne (UE) en coordination avec Kiev, la résolution affirme aussi « son attachement à la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale » de l’Ukraine.

Sur les 193 Etats membres des Nations unies, 141 ont approuvé le texte, cinq – la Russie, la Biélorussie, la Corée du Nord, l’Erythrée et la Syrie – s’y sont opposés et 35 se sont abstenus – dont la Chine.

De nombreux diplomates ont qualifié le résultat de ce vote d’« historique » : même si cette résolution n’a pas de valeur contraignante, montrer l’isolement de la Russie est crucial dans la stratégie occidentale.

Les forces russes, en dépit d’une résistance ukrainienne tenace, progressent sur tous les fronts en direction de Kiev (Nord), qui compte 2,9 millions d’habitants. Elles ont notamment frappé, mardi 1er mars, la tour de télévision de Kiev. A l’ouest de la capitale, les forces russes frappent durement Jytomyr (à 140 kilomètres de Kiev) et, dans le Nord-Est, les combats ont atteint Tchernihiv (à 150 kilomètres de Kiev).

Dimanche 27 février, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé que les vingt-sept Etats membres de l’UE fermaient leur espace aérien aux avions et compagnies russes. Avant cela, vingt-trois pays de l’UE, dont la France, avaient déjà pris cette décision. En dehors de l’UE, d’autres pays ont pris la même mesure, à l’image du Royaume-Uni, de la Norvège, de la Macédoine du Nord ou de l’Islande. Hors Europe, le Canada a également annoncé la fermeture de son espace aérien à la Russie.

L’aérodrome d’Hostomel (à environ 25 kilomètres du centre de Kiev) est, depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, le théâtre de violents affrontements, l’armée de Vladimir Poutine tentant de s’emparer de cette infrastructure stratégique pour la prise de la capitale.

Par ailleurs, des images satellites prises le 28 février montrent un immense convoi militaire russe qui s’étend sur plus de 60 kilomètres au nord-ouest de Kiev. Ces images montrent des dizaines et des dizaines de véhicules alignés les uns derrière les autres sur des routes dans la campagne ukrainienne.

Le territoire biélorusse est utilisé par Moscou comme base arrière. Au début de février, les Occidentaux affirmaient que 30 000 soldats russes avaient été déployés en Biélorussie dans le cadre de manœuvres militaires.

De son côté, la Moldavie, voisine de l’Ukraine, a fermé son espace aérien dès le 24 février à tous les avions, y compris européens. Les vols en direction de la capitale, Chisinau, sont redirigés vers l’aéroport roumain de Iasi, frontalier avec la Moldavie.

Au troisième jour de l’invasion menée le 24 février par la Russie en Ukraine, de violents combats faisaient rage à Kiev. L’armée russe tentait de rejoindre la capitale par le nord et le nord-est, avec des troupes entrées en Ukraine depuis la Biélorussie voisine.

La nuit du vendredi au samedi a été extrêmement difficile. Les raids aériens russes se sont intensifiés, visant notamment les abords de la place de l’Indépendance, la place centrale, symbole de la révolution de Maïdan, en 2014. L’armée ukrainienne a annoncé avoir détruit en vol deux Iliouchine IL-76 qui étaient, selon Kiev, les fers de lance d’une opération aéroportée. D’autres unités russes sont toutefois parvenues jusqu’au centre de la capitale. Des combats ont notamment eu lieu sur l’avenue de la Victoire. Des hommes du quartier Obolon se sont rués vers les distributions de kalachnikovs destinées à la défense territoriale, des brigades de volontaires créées pour appuyer l’armée en cas de combats urbains. Sur les trottoirs, des cocktails Molotov ont été mis à la disposition des habitants qui souhaiteraient les jeter depuis leurs fenêtres sur les assaillants.

Même si beaucoup d’habitants ont fui la ville et que des milliers d’autres se sont réfugiés dans le métro par peur des bombardements, un certain esprit de résistance semblait s’être emparé de Kiev. Des unités de civils en armes, un brassard jaune autour du bras, étaient visibles dans les rues.

  • Les forces russes dans les airs

L’invasion de l’Ukraine par la Russie, déclenchée le 24 février, est une offensive de très grande ampleur qui combine, dans sa première phase, tous les moyens militaires possibles : aériens, maritimes et terrestres.

Moscou a d’abord cherché à supprimer les défenses antiaériennes ukrainiennes. Outre les bombardements aériens, les moyens russes ont consisté en des missiles de croisière Kalibr tirés par sa flotte en mer Noire, des Iskander sol-sol lancés depuis la Russie, la Crimée et la Biélorussie, ainsi que des munitions de lance-roquettes multiples. Les attaques ont visé, de source russe, de nombreux sites de l’armée ukrainienne sur tout le territoire : systèmes antiaériens, aéroports, centres de commandement et dépôts logistiques. Moscou a, par ailleurs, interdit tout vol dans un large rectangle sur la frontière russo-ukrainienne jusqu’au 18 mai.

  • En mer

En mer Noire, la Russie a positionné quatre sous-marins, des frégates, le puissant croiseur lance-missiles Moskva, mais aussi six bateaux d’assaut amphibies et des navires auxiliaires en appui de sa flotte face à l’Ukraine, avec pour cible la ville portuaire d’Odessa (Sud). Des corvettes lance-missiles ont été déplacées depuis la mer d’Azov. Des batteries Bastion-P antinavires ont été installées sur les côtes près de Sébastopol, en Crimée, et de Novorossïsk, dans le sud de la Russie. Moscou a, en outre, fermé la mer d’Azov, y interdisant toute navigation depuis le 23 février. Enfin, des renforts ont été acheminés en Méditerranée orientale, dont deux sous-marins d’attaque Kilo et deux groupes navals complets.

  • Sur terre

Quelque 190 000 soldats russes ont été déployés à la frontière ukrainienne et en Biélorussie. De source ukrainienne, soixante bataillons (de 30 000 à 60 000 hommes) sont entrés en Ukraine : au départ de la Biélorussie vers la capitale, Kiev (Nord) ; depuis la ville russe de Belgorod vers Kharkiv (Nord-Est) ; depuis le Donbass vers le port de Marioupol (Sud-Est) ; et depuis la Crimée vers Kherson (Sud). Ces troupes, couvertes par l’aviation, ont utilisé une grande puissance de feu – des centaines de chars d’assaut, de blindés légers et d’obusiers divers.

Lundi 21 février, Vladimir Poutine a reconnu l’indépendance des deux provinces séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine, les républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk. La décision prise par le président russe a enterré les accords de Minsk qui, depuis 2015, tentaient de mettre fin au conflit dans le Donbass. Elle a surtout ouvert la porte à un déploiement militaire russe dans cette région ukrainienne et à une offensive plus large, qui a débuté le 24 février.

Selon Vladimir Poutine, Moscou reconnaît les frontières inscrites dans les « Constitutions » des deux « républiques populaires », c’est-à-dire l’intégralité des régions administratives de Donetsk et de Louhansk – soit un territoire trois fois plus grand que celui qu’elles contrôlent actuellement. Mais, dans le texte ratifié par la Douma, la chambre basse du Parlement russe, le périmètre est plus restreint : il s’agit des frontières « existantes » des deux républiques autoproclamées, qui s’arrêtent à la ligne de front.

Depuis le renversement du président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, en février 2014, le Donbass, un bassin minier, industriel et russophone, est au centre d’un conflit armé entre des séparatistes prorusses soutenus par Moscou et le nouveau régime ukrainien. Le 11 mai 2014, les séparatistes organisent un référendum et proclament l’indépendance des « républiques populaires de Donetsk et de Louhansk ». Kiev, qui ne reconnaît pas ces dernières, intervient militairement au début de l’été 2014, mais l’avancée de l’armée ukrainienne est arrêtée par une contre-offensive appuyée par des forces russes. Les accords de Minsk, signés en septembre 2014 et février 2015, figent les positions des deux camps le long de la ligne de contact, longue de 457 kilomètres. En huit ans, la guerre dans le Donbass a fait plus de 14 000 morts, 25 000 blessés et 1,5 million de déplacés, selon l’ONU.

Les grands formats du « Monde » sur la guerre en Ukraine

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Il y a trente ans, la fin de la guerre froide avait laissé espérer une mutation de ces eaux stratégiques en espace de coopération pacifique. Mais depuis l’annexion de la Crimée, en 2014, elles sont redevenues le théâtre de démonstrations de force entre la Russie et l’OTAN.

La population de Russie est en déclin depuis la chute de l’URSS, une baisse que n’ont pas enrayée les mesures prises par Vladimir Poutine.

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