(Stockholm) La jeunesse éternelle grâce au numérique : ABBA lance vendredi à Londres une série de concerts d’avatars numériques dernier cri, qui vont « prendre le relais » des quatre septuagénaires du groupe culte suédois.

« On a mis nos cœurs et nos âmes dans ces avatars et ils vont prendre le relais », dit à l’AFP Björn Ulvaeus, un des membres du quatuor scandinave rencontré à Stockholm en amont de la première.

Après près de quatre décennies de silence et de séparation de fait, ABBA avait sorti en novembre un nouvel album (Voyage). Les rois et reines du disco avaient aussi annoncé la construction d’une salle spéciale à Londres pour un spectacle numérique préparé depuis des années avec des experts en effets spéciaux.

Si ce sont bien les voix actuelles d’Anni-Frid, Björn, Benny, et Agnetha (acronyme « ABBA ») que l’on entendra, ce ne sont pas eux en chair et en os que l’on verra sur scène, mais quatre « ABBAtars » diffusés en hologramme, représentant les membres du groupe avec leurs visages de 1979.

Après d’autres expériences mitigées de concerts d’hologrammes d’artistes disparus ou trop fatigués, les quatre espèrent avoir cette fois trouvé la clé pour passer l’émotion.

« C’est l’un des projets les plus audacieux qui ait jamais été fait dans le secteur de la musique », estime Björn Ulvaeus, qui a composé l’essentiel des plus grands succès du groupe avec son compère Benny Andersson.

« Comment le public va l’accueillir, je n’en ai aucune idée, mais je crois qu’ils vont ressentir une puissance émotionnelle des avatars, qu’ils vont les voir comme de vrais gens », dit celui qui à 77 ans est le plus âgé des ABBA.

Les mouvements des septuagénaires ont été captés en studio pour les reproduire sur scène.

Si les avatars doivent parfois apparaître vêtus des légendaires tenues seventies emblématiques d’ABBA, ils seront aussi habillés avec des combinaisons futuristes, à en croire les bandes-annonces du concert.

Dans une salle de 3000 places dans l’est de Londres (la « ABBA Arena »), des concerts sont prévus sept jours sur sept jusqu’à début octobre.

« Je ne sais pas pour les autres, mais en ce qui me concerne, j’étais plus stressé il y a un mois qu’aujourd’hui. Maintenant je sais que nous avons fait de notre mieux », confie Björn.

« Presque quelqu’un d’autre »

Les quatre avatars ont été développés en collaboration avec une société d’effets visuels de George Lucas, réalisateur de la saga Star Wars.

Pour Björn Ulvaeus, les images d’archives omniprésentes d’ABBA l’ont préparé à se voir avec le visage de sa gloire trentenaire.

« Pour la plupart des gens, ce sera sans doute bizarre, mais je me suis vu en plus jeune presque chaque jour, toute ma vie depuis que nous nous sommes séparés », explique la star, qui lance en parallèle en Suède un spectacle musical consacré à Fifi Brindacier.

« Dans une forme ou dans une autre, en photo, à la télé, donc je suis assez habitué à “lui” […] C’est moi, mais c’est presque quelqu’un d’autre », souligne un des deux « B » de ABBA.

« Quand je vois mon avatar sur scène, ça fait comme un mélange. Comme si j’avais une vie infusée dans ce type qu’on voit à l’écran ».

Vainqueur de l’Eurovision en 1974, ABBA aura connu un succès planétaire grâce à ses chansons cultes comme Waterloo, Gimme ! Gimme ! Gimme ! (A Man after Midnight) ou bien The Winner Takes it All jusqu’à sa dissolution au début des années 80.

Mais à la surprise générale, le succès du groupe s’était poursuivi après sa séparation, alimenté ensuite par d’habiles revivals comme la série de films Mamma Mia.

Avec des centaines millions d’albums vendus partout dans le monde, ABBA a largement contribué à faire rayonner l’industrie musicale suédoise, qui est toujours aujourd’hui le troisième pays exportateur de musique après les États-Unis et le Royaume-Uni.

À Londres, les spectacteurs auront droit à une heure et demie de concert — avec une dizaine de musiciens eux bel et bien présents.

Mais revoir ABBA sur scène en vrai ou sortir un nouvel album n’est pas prévu.

« ABBA n’a pas de projet… C’est comme ça », assure Björn Ulvaeus à l’AFP.