“La fascination pour la vie et l’œuvre de Jean-Michel Basquiat (1960-1988) ne montre aucun signe de fléchissement. En témoignent les tee-shirts reproduisant des motifs du peintre qui s’arrachent pour 29,99 dollars [28 euros environ] chez Gap, la foule qui se presse dès qu’ouvre une exposition consacrée à son œuvre, quand il ne s’agit pas d’un tableau qui, comme cela s’est produit la semaine dernière, part aux enchères pour 85 millions de dollars [78 millions d’euros]”, remarque The New York Times, qui révèle l’existence d’une enquête du FBI portant sur 25 œuvres de l’artiste exposées depuis le mois de février au musée d’Art d’Orlando (Orlando Museum of Art, en Floride).

Le journal américain avait déjà publié, au moment de l’inauguration de l’exposition, une enquête qui interrogeait l’authenticité des œuvres en question : un ensemble de peintures présentées comme ayant été “réalisées sur des morceaux de carton ramassés par Basquiat dans des poubelles à la fin de l’année 1982, à l’époque où il vivait et travaillait à Los Angeles, dans un atelier situé en dessous de l’appartement du célèbre marchand d’art Larry Gagosian”.

Casiers chargés

D’après les actuels propriétaires des œuvres et la direction du musée d’Orlando, les tableaux – dont la taille varie entre 25 cm et 1 mètre de haut – ont été vendus par Basquiat pour 5 000 dollars (un peu plus de 4 600 euros) à un scénariste de télévision aujourd’hui décédé. Celui-ci les aurait ensuite “entreposés et oubliés dans un garde-meuble pendant trente ans” – jusqu’à ce que son contenu soit saisi en 2012 pour non-paiement du loyer de l’espace de stockage et vendu aux enchères pour 15 000 dollars.

Interrogé par The New York Times, Larry Gagosian avait qualifié, en février, cette version de “hautement improbable”. Comme l’explique le journal, elle repose “en grande partie” sur le récit des deux acheteurs de l’époque (William Force et Lee Mangin), dont les casiers montrent qu’ils ont “tous les deux purgé des peines de prison pour des affaires de drogue, sous des noms différents”.

Un problème de police

Ce passé criminel suffit-il à invalider la thèse défendue par le musée d’Orlando ? Non, rétorque l’avocat de Mangin, que cite The New York Times. Ainsi que le rapporte le journal, “le fait que les propriétaires [d’une œuvre] aient un jour eu affaire à la justice ne préjuge pas de l’authenticité ou non de celle-ci”.

Dans son article du mois de février, le quotidien citait également un expert indépendant selon lequel les caractères typographiques relevés à l’arrière de l’un des cartons supposément récupérés par Basquiat n’avaient été utilisés sur les emballages du transporteur Federal Express qu’à partir de 1994, soit six ans après la mort de l’artiste.

Des œuvres évaluées à 100 millions de dollars

Une interprétation à laquelle la direction du musée d’Art d’Orlando oppose diverses expertises et recherches allant dans le sens d’une attribution des œuvres à Jean-Michel Basquiat. Le musée, qui les expose jusqu’au 30 juin (elles devraient ensuite être montrées en Italie), n’a pas répondu aux questions du New York Times sur l’enquête en cours.

Souvent qualifié de “météorite” dans le monde de l’art, Jean-Michel Basquiat est mort d’une overdose à l’âge de 27 ans. Ses œuvres d’avant-garde figurent aujourd’hui parmi les plus chères de l’art contemporain. Comme le précise The New York Times, si leur authenticité était confirmée, les 25 peintures sur carton exposées à Orlando pourraient valoir “environ 100 millions de dollars”.