HISTORIQUELe plus vieil accusé de crimes nazis condamné à cinq ans de prison

Allemagne : Josef Schütz, le plus vieil accusé de crimes nazis, condamné à cinq ans de prison

HISTORIQUEJosef Schütz, ex-gardien de camp de concentration âgé de 101 ans, n’a exprimé aucun regret au cours des nombreuses audiences
Un drapeau nazi (photo d'illustration)
Un drapeau nazi (photo d'illustration) - Stuart Forster / Rex Fe/REX/SIPA
20 Minutes avec agences

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Le procès historique du plus vieil accusé de crimes nazis s’est achevé ce mardi en Allemagne. Josef Schütz, ex-gardien de camp de concentration âgé de 101 ans, a été condamné à 5 ans de prison pour « complicité » de milliers de meurtres, a annoncé le président du tribunal de Brandebourg-sur-la-Havel (est), Udo Lechtermann.

Il était jugé depuis octobre 2021 pour des exactions commises durant son service dans le camp de Sachsenhausen, entre 1942 et 1945. La justice reprochait à cet ancien sous-officier des Waffen SS d’être impliqué dans le meurtre de 3.518 prisonniers.

Il n’a exprimé aucun regret

Jamais au cours de la trentaine d’audiences au tribunal de Brandebourg-sur-la-Havel, plusieurs fois reportées en raison de la santé fragile de l’accusé, Josef Schütz n’aura exprimé le moindre regret. Au contraire, lundi il a encore nié toute implication, se demandant « pourquoi il était là », et affirmé que « tout est faux » à son sujet.

Josef Schütz a avancé plusieurs récits sur son passé, parfois contradictoires. « Tout est déchiré » dans ma tête, avait-il même glissé lors de l’ouverture de l’audience avant d’être interrompu par son avocat. Dernièrement, il a prétendu avoir quitté la Lituanie au début de la Seconde Guerre mondiale pour rejoindre l’Allemagne où il aurait travaillé comme ouvrier agricole durant tout le conflit : « J’ai arraché des arbres, planté des arbres », a-t-il expliqué à la barre, jurant n’avoir jamais porté d’uniforme allemand mais un « bleu de travail ».

Une version contestée par plusieurs documents historiques mentionnant notamment son nom, sa date et son lieu de naissance prouvant qu’il avait bien été affecté de fin 1942 à début 1945 à la division « Totenkopf » (Tête de mort) des Waffen-SS. Après la guerre, il a été transféré dans un camp de prisonniers en Russie et s’est ensuite installé dans le Brandebourg, région voisine de Berlin. Il a successivement été paysan, puis serrurier et n’a jamais été inquiété.

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« Complicité de meurtres systématiques »

Agé de 21 ans au début des faits reprochés, il était accusé d’avoir fusillé des prisonniers soviétiques, d'« aide et de complicité de meurtres systématiques » par gaz de type Zyklon B et de « détention de prisonniers dans des conditions hostiles ». Lors de son réquisitoire mi-mai, le procureur général Cyrill Klement avait estimé « entièrement confirmées les preuves de l’accusation », lui reprochant de ne pas seulement s’être accommodé des conditions du camp mais d’y avoir fait carrière. Il n’y a « pas de doutes sur le fait que M. Schütz travaillait à Sachsenhausen », avait-il martelé, avant de requérir une peine plus importante que le minimum de trois ans de prison pour complicité de meurtres.

Stefan Waterkamp, l’avocat de Josef Schütz, avait plaidé pour son acquittement et annoncé qu’il comptait faire appel en cas de condamnation, rendant encore plus improbable tout emprisonnement.

Une justice tardive

Entre son ouverture en 1936 et sa libération par les Soviétiques le 22 avril 1945, le camp de Sachsenhausen a vu passer quelque 200.000 prisonniers, principalement des opposants politiques, des juifs et des homosexuels. Des dizaines de milliers d’entre eux ont péri, victimes principalement d’épuisement dû au travail forcé et aux cruelles conditions de détention.

Après avoir longtemps montré peu d’empressement à juger tous les auteurs de crimes nazis, l’Allemagne élargit depuis dix ans ses investigations. Gardiens de camps et autres exécutants de la machinerie nazie peuvent être poursuivis du chef d’accusation de complicité de meurtre. Ces dernières années, quatre anciens SS ont été condamnés à ce titre.

Ce procès tardif a permis de « réaffirmer la responsabilité politique et morale des individus dans un contexte autoritaire, et dans un régime criminel, à l’heure où l’extrême droite néo-fasciste se renforce partout en Europe », avait confié avant le verdict Guillaume Mouralis, directeur de recherche au CNRS et membre du Centre Marc Bloch à Berlin.

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