À Odessa, radiographie d'une sale guerre
Chaque photographe ukrainien rêve de prendre une photo qui arrêtera la guerre », avait coutume de dire le photojournaliste de l’agence Reuters Maksim Levin. Alors qu’il couvrait l’invasion de son pays par la Russie, son corps a été retrouvé, fin mars, criblé de balles au nord de Kiev.
Donner à voir les bombes, les armes, les vies foudroyées, le tout à leurs risques et périls: voilà la croix portée par les reporters qui choisissent la guerre comme sujet. On ne reçoit pas l’image d’un conflit comme on reçoit n’importe quelle autre image. Ce photojournalisme est un exercice délicat, qui exige d’infinies précautions: il faut accompagner le lecteur, lui donner des clés afin qu’il comprenne la violence de ce qui apparaît sous ses yeux, sans le choquer, sans l’assigner à une position de voyeur et sans le renvoyer à son impuissance.
Pour Vanity Fair, Alex Majoli, photographe italien de l’agence Magnum, avait couvert la désolation de son pays au plus fort de la pandémie de Covid-19, en mars 2020. Avec ce même noir et blanc, insondable, renforçant la puissance et la violence des évènements, il capture dans nos pages les destins suspendus dans le chaos de la guerre en Ukraine. Une image peut-elle l’arrêter ? Peut-être pas. Mais les travaux d’Alex Majoli, comme ceux de tous ses confrères et ses consœurs qui travaillent au front, n’en sont pas moins précieux, tant ils font surgir l’humanité au cœur de l’horreur la plus brute.