
« L’électricité est une solution pour le futur, mais pas la seule »
Entretien avec Laura Cozzi, directrice durabilité, technologie et perspectives à l’Agence internationale de l’énergie.
Depuis plusieurs années, les batteries au lithium équipent véhicules électriques, téléphones portables et une multitude d’autres dispositifs électroniques. Mais leurs performances restent en deçà des besoins. Comment les améliorer ? Tour d’horizon.
Article réservé aux abonnés numériquesDe plus en plus présentes dans notre quotidien, en particulier dans nos appareils électroniques mobiles, les batteries intéressent aussi un large éventail de domaines industriels (automobile, réseaux de distribution d’électricité, aérospatial, etc.) et équipent nombre de dispositifs médicaux et robotiques. Depuis plusieurs années, on les considère comme l’un des moyens les plus performants et les plus flexibles pour stocker de l’énergie. Ces dispositifs électrochimiques accumulateurs d’électricité et rechargeables, dont le premier (la batterie au plomb-acide) a été mis au point en 1859 par le physicien français Gaston Planté, joueront sans doute un rôle clé dans la transition énergétique de nos sociétés vers un modèle de développement à faibles émissions de dioxyde de carbone.
Parmi les technologies de batteries existantes, celle dite « lithium-ion » (Li-ion) s’est imposée et est commercialisée depuis 1991. Sa force principale réside dans sa haute densité d’énergie (l’énergie stockée par unité de volume ou de masse), deux à six fois supérieure à celles des batteries au nickel-cadmium (Ni-Cd), qui ont vu le jour en 1899, au nickel-hydrure métallique (Ni-MH), commercialisées pour la première fois en 1989, ou au plomb-acide.
Les batteries Li-ion équipent par exemple les voitures électriques, dont le marché est en forte progression, et leur procurent à ce jour une autonomie de quelque 300 à 400 kilomètres. Pour que les véhicules électriques séduisent la majorité des automobilistes, une autonomie deux fois plus grande sera nécessaire. Dans ce domaine comme dans bien d’autres, on attend donc des batteries aux performances améliorées. Aura-t-on bientôt, dans chacun des domaines concernés, des batteries satisfaisantes en termes d’autonomie, de vitesse de recharge et de fiabilité, et ce sans sacrifier les ambitions écologiques ? Quelles seront les batteries de demain ?
Avant de donner des éléments de réponse, rappelons brièvement le principe de fonctionnement des batteries et passons en revue quelques difficultés que l’on a dû surmonter avant d’aboutir aux batteries Li-ion actuelles.
Une batterie est un assemblage de plusieurs accumulateurs ou « cellules » identiques fournissant chacun une tension électrique qui dépend des propriétés électrochimiques des matériaux utilisés. Chaque cellule est constituée d’une électrode positive, la cathode, et d’une électrode négative, l’anode, les deux électrodes étant séparées par un milieu liquide ou solide, l’électrolyte, où des ions peuvent se déplacer. Lorsque les deux électrodes sont connectées à un circuit électrique externe où des électrons sont libres de circuler, les réactions électrochimiques (réversibles) au niveau des électrodes conduisent à un stockage ou à une libération de charges électriques (processus de charge ou décharge), selon le sens de circulation des électrons.
Prenons l’exemple d’une cellule Li-ion. Ses deux électrodes agissent comme des éponges à lithium. La cathode est généralement constituée d’un oxyde métallique, et l’anode de graphite (feuillets de carbone). En décharge, c’est-à-dire quand la cellule fournit de l’électricité à un appareil, les atomes de lithium liés au carbone de l’anode se dissocient en ions positifs Li+ et en électrons (selon la réaction LixC6 → x Li+ + x e– + C6) ; les électrons partent dans le circuit externe, tandis que les ions Li+ se déplacent en sens inverse à travers l’électrolyte jusqu’à la cathode ; ces ions s’insèrent dans le matériau de l’électrode et se recombinent avec les électrons provenant du circuit électrique externe (selon la réaction MO2 + x Li+ + x e– → LixMO2, où MO2 désigne l’oxyde métallique). En situation de charge, c’est l’inverse.
Une batterie est un assemblage de cellules électrochimiques, chacune comportant une cathode, un électrolyte et une anode. Quand la batterie alimente un appareil électrique (décharge), l’anode fournit des électrons (e–) au circuit externe, tandis
Les batteries sont des systèmes qui convertissent de l’énergie chimique en énergie électrique et qui sont rechargeables.
Les batteries « lithium-ion », apparues dans les années 1990 après de longues recherches, offrent une densité d’énergie élevée. Elles sont utilisées aujourd’hui dans un grand nombre d’applications.
Les scientifiques explorent plusieurs voies afin d’améliorer les performances de ces batteries ou d’autres et de diminuer leur empreinte écologique.
J.-M. Tarascon, Les batteries sont-elles la bonne option pour un développement durable ?, Comptes Rendus Géoscience, vol. 352(4-5), pp. 401-414, 2020.
J.-M. Tarascon, Na-ion versus Li-ion batteries : Complementarity rather than competitiveness, Joule, vol. 4, pp. 1616-1620, 2020.
J. Huang et al., Operando decoding of chemical and thermal events in commercial Na(Li)-ion cells via optical sensors, Nature Energy, vol. 5, pp. 674-683, 2020.
P. Allemand, Batteries à charge rapide : les limites de la physique, Contrepoints, 14 août 2020.
S. Randau et al., Benchmarking the performance of all-solid-state lithium batteries, Nature Energy, vol. 5, pp. 259-270, 2020.
O. Ramström, Lithium-ion batteries, Académie royale des sciences de Suède, 2019.
Entretien avec Laura Cozzi, directrice durabilité, technologie et perspectives à l’Agence internationale de l’énergie.
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