Cancer du sein : une patiente en phase terminale guérie grâce à un essai clinique mené au Royaume-Uni

Une femme atteinte d'une forme agressive de cancer du sein à qui il restait moins d'un an à vivre a été informée qu'elle était guérie de la maladie après avoir participé pendant plusieurs mois à un essai clinique. Le but étant de tester l’efficacité d’un traitement expérimental qui repose sur de l’immunothérapie.
Alexandra Bresson
Cancer du sein : une patiente en phase terminale guérie grâce à un essai clinique mené au Royaume-Uni

Lorsque Jasmin David, une Britannique de 51 ans a découvert que son cancer du sein s'était propagé aux poumons, aux ganglions lymphatiques et à son thorax, on lui a annoncé la très mauvaise nouvelle qu'il lui restait moins d'un an à vivre. Cette mère de deux enfants auparavant en bonne santé, qui travaillait comme responsable clinique dans une maison de soins pour personnes âgées, a découvert qu'elle avait une forme agressive de cancer du sein triple négatif en novembre 2017 après avoir détecté une grosseur au-dessus du mamelon. Suite au diagnostic, elle subit ensuite six mois de chimiothérapie et une mastectomie (ablation du sein) en avril 2018, suivis de 15 cycles de radiothérapie qui l'ont débarrassée de son cancer. Mais après avoir développé une toux sèche et une douleur à la poitrine, et suite à l’annonce de sa réapparition et de sa propagation à d’autres organes, synonyme de mauvais pronostic, en décembre 2019, les médecins lui proposent alors de participer à un essai clinique de phase I (phase précoce) conduit par le Christie NHS Foundation Trust à Withington à Manchester, qui gère l'hôpital Christie.

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D’une durée de deux ans, ce dernier a consisté à tester l’efficacité d’un médicament expérimental combiné à un médicament d'immunothérapie, l'atézolizumab, administré par voie intraveineuse à recevoir toutes les 3 semaines. L’immunothérapie est un type de traitement qui utilise le système immunitaire pour lutter contre le cancer, en lui « ordonnant » d’attaquer les cellules cancéreuses. Ce traitement a pour avantage de ne pas porter atteinte aux cellules saines comme le font souvent les médicaments de chimiothérapie, ce qui signifie qu’il provoque moins d’effets secondaires. Comme le précise l’Inserm, « l’immunothérapie a pour but de réveiller le système immunitaire et de l’éduquer pour qu’il élimine les cellules cancéreuses. Cette approche se fonde sur l’utilisation de différents outils : vaccination, anticorps (protéine du système immunitaire capable de reconnaître une autre molécule afin de faciliter son élimination) monoclonaux, immunomodulateurs (médicaments qui stimule ou freine le système immunitaire) ... ». Selon la revue médicale Vidal, l’atézolizumab commercialisé sous le nom de Tecentriq peut être utilisé en France notamment pour le traitement d’un cancer du sein triple négatif localement avancé non résécable ou métastatique.

« Je pensais que c'était la fin et j'ai maintenant l'impression de renaître »

En mars 2020, sa première analyse depuis le début de l'essai clinique révèle que 80 % des lésions avaient disparu. S'adressant au Christie NHS Foundation Trust, elle déclare aujourd’hui : « quand on m'a proposé l'essai, je ne savais pas si cela fonctionnerait pour moi, mais je pensais qu'au moins je pouvais faire quelque chose pour aider les autres et utiliser mon corps pour la prochaine génération. » Les débuts sont difficiles en raison d’effets secondaires importants, notamment des maux de tête et des pics de température, qui la conduise à passer Noël à l’hôpital au plus mal. Mais heureusement, son corps commence à bien réagir au traitement quelques jours plus tard et ne montre désormais plus aucune preuve de la maladie. Après un voyage en Inde pour rendre visite à sa mère de 97 ans en avril, elle décide de prendre une retraite anticipée et « de vivre sa vie dans la gratitude envers la science médicale ». « J'ai fêté mes 50 ans en février 2020 alors que j'étais encore en plein traitement et que je ne savais pas ce que l'avenir me réservait. Il y a 2 ans et demi, je pensais que c'était la fin et j'ai maintenant l'impression de renaître. Je fêterai mes 25 ans de mariage en septembre. J'ai tellement de choses à attendre. », conclut-elle.

En juin 2021, les examens médicaux ne montrent aucune cellule cancéreuse mesurable dans son corps, confirmant le fait qu’elle n'a plus de cancer, mais ses médecins comptent cependant continuer à lui administrer ce traitement jusqu'en décembre 2023. Le Pr Fiona Thistlethwaite, oncologue médicale qui dirige l'étude, a pour sa part déclaré que « nous sommes ravis que Jasmin ait eu un si bon résultat. Nous testons continuellement de nouveaux médicaments et thérapies pour voir s'ils peuvent bénéficier à plus de personnes. » D'après l’Institut National contre le Cancer, le cancer du sein est le cancer le plus fréquemment observé chez les femmes en France, dans l'UE et aux États-Unis. Au sujet de l’immunothérapie, l’Institut Gustave Roussy estime qu’il s’agit d’une « alternative de traitement reconnue et efficace dans un certain nombre de cancers mais, dans le cancer du sein, des avancées restent à faire pour voir émerger une indication. » La Fondation pour la Recherche Médicale juge pour sa part que cette approche, associée ou non à d’autres traitements, « pourrait s’avérer efficace pour certaines patientes atteintes d’un cancer du sein triple négatif et avancé », mais qu’encore une fois des recherches sont nécessaires pour valider ces premiers résultats prometteurs.

le 06/07/2022