Dionysos, le dieu virevoltant, ou comment le vin, la folie, la fête, le rire et le théâtre vinrent aux humains

Mosaïque de Dionysos dans les ruines de Corinthe en Grèce ©Getty
Mosaïque de Dionysos dans les ruines de Corinthe en Grèce ©Getty
Mosaïque de Dionysos dans les ruines de Corinthe en Grèce ©Getty
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Quand les Dieux rôdaient sur la terre, il y a très longtemps, il fallait être sur ses gardes. Cette foule de déesse et de dieux qui ont commencé à apparaître en Grèce il y a environ 3500 ans avec leur suite innombrable de demi dieux, de fils et de filles, s'accrochaient tous les jours aux humains.

Souvent, ces dieux rôdaient sans se faire voir dans la tête des femmes et des hommes, dans leur corps, leur langage, dans leurs idées. Il les faisait changer d'un coup, suscitaient les désirs ou, au contraire, étouffer toute volonté. À leur guise, les dieux pouvaient rendre fou qui ils voulaient, quand ils voulaient. Parfois, ils se contentaient de faire un croche pied et on s'étalait par terre. Il fallait surtout y voir un signe. Mais on ne savait pas bien de quoi.

Parfois, au contraire, ils faisaient courir plus vite un coureur aux Jeux olympiques et lui donnaient la victoire. Par pur caprice ou parce que prudent, le coureur avait au préalable promis à son dieux favori de lui offrir de grasses offrandes s'il gagnait. Mais parfois, les dieux le faisaient déraper dans une bouse de vache et tout s'arrêtait.

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Ces déesses et ces dieux surgissaient n'importe quand, imprévisibles, au moment ou on s'y attendait le moins, et personne ne pouvait dire à l'avance ce qu'ils allaient faire. Quand, au bord d'un chemin, sur une plage ou à l'entrée de sa maison, apparaissait un être inconnu, un étranger, personne ne pouvait dire s'il s'agissait d'une divinité ou d'un humain. Les dieux étaient les maîtres libres de prendre l'apparence qu'ils voulaient.

Un dieu était le professionnel de ses apparitions subites, inattendues et de ces disparitions pas moins brutales. C'était sa spécialité à lui, son domaine, le dieu Dionysos, le Bacchus romain, dieu du vin, de l'ivresse, du désordre, dieu de la danse, du rythme, de la frénésie, le Dieu du changement constant d'apparence, de la dissimulation. Le Dieu du théâtre. Un Dieu insaisissable, bizarre, errant.

Dionysos était chez lui, partout et nulle part. A la fois doux et consolateur, comme peut l'être le vin, et sauvage, dévoreur de chair crue, animale ou humaine.

Références

  • Hymne homérique à Dionysos (extraits) : traduction personnelle, inédite.

On trouve une traduction de l’ensemble des Hymnes homériques par Jean Humbert dans le volume dirigé par Hélène Monsacré, Tout Homère, Paris, Albin Michel-Les Belles Lettres, 2019.

  • Euripide, Les Bacchantes, traduit par Jean et Mayotte Bollack, Paris, Les Éditions de Minuit, 2005.
  • Aristophane, Les Grenouilles , texte établi par Victor Coulon, introduction, traduction, et commentaire par Pierre Judet de La Combe, Paris, Belles-Lettres, Classiques en poche, 2012.
  • Charles Baudelaire, « Les foules », dans : Le Spleen de Paris. Petits poèmes en prose  (n° XII), 1861, Paris, Poésie /Gallimard, 2006, p. 127-128.
  • Friedrich Nietzsche, La Naissance de la tragédie à partir de l’esprit de la musique (1872), plusieurs traductions françaises, dont celle de Hans Hildenbrad et Laurent Valette, Paris, Christian Bougois éditeur, « Bibliothèque 10/18 », 1991.
  • Pierre Lieutaghi, Le Livre des arbres, arbustes & arbrisseaux , nouvelle édition, Arles, Actes Sud, 2004.

Sur Dionysos :

  • Henri Jeanmaire, Dionysos. Histoire du culte de Bacchus, Paris, Payot, 1951. Rééditions.
  • Marcel Detienne, Dionysos à ciel ouvert , Paris, Hachette, Textes du XXe Siècle, 1986.
  • Maria Daraki, Dionysos , Paris, Arthaud, 1985.

Sur l’ensemble des mythes grecs :

  • Timothy Gantz, Mythes de la Grèce archaïque, traduit par Danièle Auger et Bernadette Leclercq-Neveu, Paris, Belin, 2004.

Les extraits sonores

Ext du film "Métamorphoses " de Christophe Honoré

Ext « Les Bacchantes » d'Euripide    France Culture15/02/1975

Ext. d' "UNE PARTIE DE CAMPAGNE"  de  Jean Renoir

Jean- Pierre Vernant Avec Dionysos, les grecs amènent l’Autre, ils ont compris qu’on ne peut construire une communauté d’égaux , cimentée par l’amitié sans introduire l’altérité en plein milieu/  1996

Pierre Vidal-Naquet :  DIONYSOS est  un dieu terrible qui fait surgir l’inattendu au cœur de la cité

A voix nue : grands entretiens d'hier et d'aujourd'hui  France Culture  05/12/1989

Ext du film Ah ! les belles bacchantes réalisé par Jean Loubignac

Laurent Gaudé Dionysos : "c'est un dieu subversif par rapport à la cité. Il est du côté des femmes, des esclaves et de tous ceux qui n'ont pas de place dans la ville. Aujourd'hui aussi on a des ombres dans nos villes, et elles n'ont même pas de dieu." Une journée particulière. Le 26/05/2019 sur F. Inter

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