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Quinze millions de Soudanais en situation de grave insécurité alimentaire - PAM

Des femmes attendent de recevoir de l'aide en espèces au Soudan.
WFP/Leni Kinzli
Des femmes attendent de recevoir de l'aide en espèces au Soudan.

Quinze millions de Soudanais en situation de grave insécurité alimentaire - PAM

Aide humanitaire

Un tiers de la population soudanaise risque d’être touché par «une grave insécurité alimentaire». Et cela ne risque pas de s’améliorer, ont alerté vendredi des agences des Nations Unies, relevant que la moitié des enfants les plus vulnérables du Soudan pourraient mourir sans une aide humanitaire.

« Au moins 15 millions de personnes, soit un tiers de la population, sont confrontées à la faim au Soudan », a déclaré lors d’une conférence de presse à Genève, Eddie Rowe, Représentant du Programme alimentaire mondial (PAM) au Soudan. Selon la dernière évaluation de la sécurité alimentaire, il s’agit d’une augmentation de 50% par rapport à l’année dernière.

Plus tôt dans l’année, le PAM a averti que jusqu’à 18 millions de personnes pourraient être confrontées à l’insécurité alimentaire d’ici septembre et des évaluations sont en cours pour confirmer si nos pires craintes se sont réalisées.

« Pour l’instant, le PAM (a) prévu qu’environ 15 millions de personnes souffriraient de la faim chaque jour depuis le début de la saison de la faim, et nous procédons actuellement à une évaluation car nos indicateurs prévoyaient que ce chiffre pourrait atteindre 18 millions à la fin de ce mois », a-t-il ajouté.

Impact des inondations, des conflits communautaires et de la guerre en Ukraine

L’escalade des problèmes récents au Soudan trouve son origine dans un coup d’État militaire d’octobre 2021 qui a entraîné un gel du financement international des opérations d’aide. Khartoum a ainsi perdu son aide internationale, soit 40% de ses recettes, en rétorsion au putsch. Une situation qui a contraint les équipes de secours de l’ONU à réduire les rations de moitié, dans certains cas.

La situation socio-politique actuelle a également affaibli les structures de soutien de l’État aux familles en difficulté, qui ont dû faire face à des hausses spectaculaires des prix des denrées alimentaires et à des violences intertribales, selon le PAM. Parallèlement, l’insécurité continue de restreindre l’accès des populations aux terres agricoles au Darfour.

« Nous sommes toujours aux prises avec une augmentation de l’incidence des conflits intertribaux, et cela s’est en fait étendu non seulement au Darfour, mais aussi à d’autres parties du pays... La guerre en Ukraine a également eu un impact significatif. Tout cela, dans le contexte d’un pays politiquement instable, a entraîné une crise humanitaire sans précédent cette année ».

De plus, depuis le mois d’août, le Soudan est frappé par de fortes pluies et des inondations qui perturbent la saison des semis et affectent la production. Près de 5.000 hectares de terres ont déjà été endommagés ou détruits.

La moitié des enfants les plus vulnérables pourraient mourir sans aide humanitaire

Dans ces conditions, la situation des enfants les plus vulnérables du Soudan est si désespérée que la moitié des jeunes les plus gravement malnutris pourraient mourir sans une intervention humanitaire urgente, a prévenu le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

« À l’heure où nous parlons, 650 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère. S’ils ne sont pas traités, la moitié d’entre eux mourront », a déclaré la Représentante de l’UNICEF au Soudan, Mandeep O'Brien, soulignant ce que les travailleurs humanitaires chevronnés ont appelé une crise sans précédent.

Dans un appel à la communauté internationale à « être solidaire des enfants du Soudan », Mmr O'Brien, a indiqué que la crise reflétait bien plus qu’un manque de nourriture, les services de santé de base, l’eau potable, l’assainissement et l’éducation faisant gravement défaut.

« La vaccination de routine, malheureusement, est en déclin au Soudan. Entre 2019 et 2021, le nombre d’enfants qui n’ont pas reçu une seule dose de vaccins vitaux a doublé », a-t-elle déclaré aux journalistes à Genève.

Des répercussions pour les réfugiés et les déplacés internes

Cette crise n’épargne pas également les réfugiés et les personnes déplacées internes, qui ont vu le coût de la vie « monter en flèche ».

« Cette situation est liée aux "répercussions de la guerre en Ukraine, aux effets persistants de la pandémie de COVID-19 et aux conditions météorologiques extrêmes résultant de la crise climatique », a affirmé Axel Bisschop, le Représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Soudan.

A noter que le Soudan accueille aujourd’hui environ 1,1 million de réfugiés. Mais depuis le début de l’année, de nouveaux affrontements intercommunautaires ainsi que l’incendie et le pillage de villages, de marchés, de maisons et de bétail dans les États du Darfour, du Kordofan et du Nil Bleu, ont déplacé plus de 177.000 personnes.

« Nous avons également environ 3,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays. Et comme l’ont souligné mes collègues ici présents, la crise humanitaire, qui se traduit en fait par une crise alimentaire, a un impact sur les communautés marginalisées et, parmi elles, sur les réfugiés et les personnes déplacées », a fait valoir Axel Bisschop.