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Prix Nobel de littérature

Alice Diop : «Annie Ernaux a éclairé ce que j’avais vécu, elle l’a réparé et a transformé ma fragilité en puissance»

Grand prix du jury et le prix du premier film de fiction «Saint-Omer» à la Mostra de Venise, la cinéaste Alice Diop évoque le rapport fondamental qu’elle entretient depuis des années avec l’œuvre de l’autrice nobélisée ce jeudi.
par Didier Péron
publié le 6 octobre 2022 à 17h06

«C’est bien la première fois que je suis émue aux larmes pour l’annonce d’un prix Nobel ! J’ai lu la Place quand j’avais 20 ans, j’étais à la Sorbonne en histoire, je me sentais profondément seule, déphasée et d’un coup, ce livre m’a offert un miroir réflexif comme si l’auteure concentrait dans ses pages en m’ayant devancée dans son parcours, sa réflexion, un ensemble d’expérience très spécifique propre à ce qu’on a fini par nommer les transfuges de classe.

«Partir d’une situation de fragilité, surmonter la honte, raconter la violence subie, élever au rang de littérature des choses qui n’étaient pas destinées à entrer dans son champ comme ces pages géniales sur l’odeur d’eau de javel à la maison, tant sa mère est obsédée par le ménage, odeur que j’ai sentie, presque portée sur moi toute mon enfance, c’était bouleversant. Mon expérience de femme a été traversée par sa littérature, c’est puissant, politique, chirurgical. Elle a éclairé, nommé, ce que j’avais vécu, elle l’a réparé et a transformé ma fragilité en puissance, elle m’a permis de devenir la femme que je suis.»

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