Des soldats russes dans les rues de Mariupol le 12 avril 2022

Des soldats russes en patrouille dans les rues de Marioupol, en Ukraine, le 12 avril 2022.

afp.com/Alexander NEMENOV

"Au premier bombardement", Anatoly aurait réalisé "qu'il ne voulait pas mourir pour les fantasmes malades de Poutine". Il se serait alors rendu "sain et sauf aux forces spéciales ukrainiennes", est-il écrit, dans un court message en ligne. "Il est resté en vie, s'est nourri et a pris une douche", précise-on. Une vidéo, publiée avec le texte, est censée en attester. On y découvre un visage qui a pour seuls stigmates visibles ceux de la jeunesse.

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Depuis le 16 septembre dernier, l'Ukraine tient une hotline, sur l'application de messagerie cryptée Telegram et par téléphone, pour inciter les soldats russes à se rendre. Le service, que L'Express a pu consulter, s'appelle "Je veux vivre" et publie régulièrement des portraits de déserteurs. Dessus, les autorités ukrainiennes promettent "trois repas par jour", des "soins médicaux" et des contacts réguliers avec la Russie à ceux qui se laisseraient capturer. À mesure de l'avancée des troupes ukrainiennes sur le terrain, ils seraient de plus en plus nombreux.

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390 000 personnes ont consulté le témoignage - réel ou non - d'Anatoly, posté sur la plateforme samedi 8 octobre, jour de l'explosion du pont de Crimée, axe majeur des convois militaires russes vers l'Ukraine. La hotline est, elle, suivie par plus de 28 000 personnes. Ces chiffres seraient le signe de l'intérêt pour l'initiative. Depuis le début de la contre-offensive, amorcée en septembre, les dirigeants ukrainiens répètent que de nombreux occupants abandonnent sans se battre. Le gouvernement de Volodymyr Zelensky promet "vie et sécurité" à ceux qui rejoignent l'autre camp.

50 000 dollars pour un char en bon état

Pour illustrer les redditions, des vidéos de capture abreuvent le groupe Telegram, sans qu'il soit possible de formellement les authentifier. Sur l'une d'entre elles, publiée mercredi dernier, on peut apercevoir un char russe rouler à toute berzingue, des drapeaux blancs fixés un peu partout. Deux hommes sautent de l'engin, s'allongent et sont fouillés. Un troisième finit par sortir, tandis que l'escouade sécurise la zone. Si la scène se révèle vraie, les déserteurs pourraient même prétendre à un petit pactole. L'Ukraine s'est engagée à verser des primes si la reddition s'accompagne d'une récupération de matériel militaire, jusqu'à 50 000 dollars pour un char en bon état.

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Ces messages ont pour but de convaincre les soldats russes d'inscrire leurs coordonnées pour officialiser et de sécuriser leur reddition dans "le respect des conventions de Genève sur le traitement des prisonniers de guerre", certifie Kiev. Autre incitation : certains posts assurent que les Russes pourront mentir sur la manière dont ils ont été faits prisonnier. De quoi conserver leurs paies et éviter les geôles russes, la désertion pouvant désormais leur coûter jusqu'à dix ans de prison.

Le 29 septembre, la porte-parole du département ukrainien des prisonniers de guerre a assuré avoir reçu "plus de 2 000 appels" de soldats russes ou de leur entourage. Depuis début septembre, la Russie a perdu plus de 3 000 kilomètres carrés de territoire, alors que le maître du Kremlin a officialisé dans la semaine l'annexion de quatre régions ukrainienne. Et les soldats russes n'ont plus de visibilité sur leur date de retour au pays : la mobilisation partielle décrétée par Poutine rallonge indéfiniment la durée de leur contrat.

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