Le ralliement des lycéennes au mouvement de contestation en Iran et leur courage dans la défiance d’un régime ultraconservateur ayant fait régner la terreur pendant quarante-trois ans ont pris de court les autorités du pays. Et surpris le monde par sa rareté et sa puissance.

Dans un article sur ces adolescentes désormais leadeuses du mouvement de contestation, The Guardian relate la peur, les hésitations et le courage d’une nouvelle génération déterminée à en découdre avec un pouvoir qui les a privées de toute liberté, et qui fait taire et assassiner les voix dissidentes.

Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux et relayée par la BBC, on voit ainsi des écolières tête nue crier “liberté, liberté, liberté” dans la ville de Sanandadj, dans le nord-ouest du pays, alors qu’un homme crie “mort au dictateur”.

Le Guardian explique comment la mort de Nika Shakarami, une écolière de 16 ans qui aurait été torturée et tuée par les autorités – a constitué un “tournant” pour ces adolescentes qui manifestent sans répit depuis une semaine.

Le lendemain de l’annonce de sa mort, Elnaz, une lycéenne 16 ans proche de Nika, est arrivée à l’école pour trouver un petit groupe d’amies réunies dans la cour, tête nue et criant : “Mort au dictateur” :

“J’étais en larmes quand je les ai vues. […] J’avais l’impression de trahir la mémoire de Nika en ne faisant pas plus pour exprimer ma colère. Alors j’ai ôté mon foulard et je les ai rejointes.”

Depuis, Elnaz participe à tous les rassemblements, sit-in et manifestations :

“Nous voulons que les religieux foutent le camp. Nos mères n’avaient pas Internet pour dire au monde ce qu’elles ont subi, mais nous si. Je suis ici pour Nika et pour toutes les autres sœurs iraniennes qui ont perdu la vie.”

“Je n’ai pas peur”

La mort d’une autre adolescente, Sarina Esmailzadeh, âgée de 16 ans – qui aurait également été tuée par les autorités – a d’autant plus exacerbé la colère des lycéennes et galvanisé leur mouvement, explique The Guardian.

“Elle était exactement comme Nika – intrépide, déterminée, et voulait que nous rejoignions le combat pour Mahsa”, témoigne Naznin, une adolescente de 16 ans vivant dans la ville de Rasht, dans le nord-ouest de l’Iran.

Le CHRI, basé à New York, a partagé sur Twitter une vidéo montrant Sarina Esmailzadeh dans une vidéo publiée en mai 2022, où elle expliquait regretter “être née en Iran”.

Chaque jour, des vidéos montrant des élèves à travers le pays agitant leur foulard en l’air et criant des slogans provocateurs sont devenues virales. “De nombreux Iraniens ont été surpris de voir les écolières émerger comme une force motrice de la contestation”, souligne The Guardian.

La semaine dernière, les images et vidéos d’un groupe d’écolières faisant un doigt d’honneur au portrait du chef suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, dans leur classe d’école à Karadj, à une trentaine de kilomètres de Téhéran, avaient fait le tour des réseaux sociaux. Des images diffusées notamment par The Telegraph au Royaume-Uni.

Pour Naznin, le mur de la peur est désormais tombé. Et il n’y aura point de retour en arrière, assure-t-elle. “Beaucoup de sang a été versé […] Je n’ai pas peur parce que je n’ai rien à perdre. Si je ne rejoins pas les manifestations […] nous mourrons de toute façon toutes comme Mahsa.”