Malte : le bruyant silence du parti travailliste face à l’assassinat d’une journaliste

Daphne Caruana Galizia a été assassinée le 16 octobre 2017 lorsqu’une bombe cachée sous sa voiture a explosé, alors qu’elle venait de quitter son domicile à Bidnija, à Malte. [EPA-EFE/CLEMENS BILAN]

Cinq ans après l’assassinat de la journaliste d’investigation maltaise Daphne Caruana Galizia, les membres du Parti populaire européen (PPE) appellent leurs homologues socialistes au Parlement à remettre en question la présence du Parti travailliste maltais dans leurs rangs.

Daphne Caruana Galizia a été assassinée le 16 octobre 2017 lorsqu’une bombe cachée sous sa voiture a explosé, alors qu’elle venait de quitter son domicile à Bidnija, à Malte.

Dans une tribune pour les médias maltais, l’eurodéputé David Casa et le leader du PPE Manfred Weber ont déclaré que Mme Caruana Galizia « disait la vérité sur le pouvoir. Elle était intrépide et, aujourd’hui, nous savons qu’elle a été assassinée pour son travail d’enquête sur la corruption au sein du gouvernement maltais ».

Ils ont également noté qu’une enquête publique indépendante avait confirmé que l’État de Malte était responsable de l’assassinat, « en violation grave de l’État de droit, qui fait partie des valeurs consacrées par l’article 2 du traité sur l’Union européenne. »

Les deux responsables politiques ont appelé le groupe socialiste au Parlement européen à remettre en question la présence du parti travailliste maltais en leur sein. Ils ont aussi reproché à la leader socialiste, Iratxe Gárcia Pérez, et au commissaire européen socialiste Frans Timmermans leur silence sur la question.

« Le groupe du PPE reste inébranlable dans sa quête de justice pour Daphne et pour mettre fin une fois pour toutes à l’impunité à Malte », écrivent-ils dans leur tribune. Et d’ajouter : « Nous continuerons à mettre cette question à l’ordre du jour du Parlement européen, comme nous le ferons la semaine prochaine, aussi longtemps qu’il le faudra, pour que justice soit rendue à Daphne. »

Corruption au plus haut niveau

Les deux frères accusés d’avoir posé la bombe qui a tué Mme Caruana Galizia ont plaidé coupable samedi (15 octobre) et ont été condamnés à 40 ans de prison chacun, avec une peine minimum de 25 ans.

Cela porte à quatre le nombre total de personnes ayant avoué leur implication dans l’assassinat : les frères DeGiorgio, leur complice Vince Muscat et l’intermédiaire Melvin Theuma. Ce dernier affirme que le meurtre a été commandité par Yorgen Fenech, un riche homme d’affaires impliqué dans un accord sur le gaz azéri qui a reçu l’approbation de l’UE.

Deux autres hommes, Robert Agius et Jamie Vella, sont accusés d’avoir fourni la bombe, mais tous deux affirment ne pas être coupables.

La famille de Mme Caruana Galizia a réagi à la nouvelle, l’un de ses fils, Paul, la qualifiant d’« éclaircie dans le brouillard ».

Les militants maintiennent toutefois que les accusés et les personnes impliquées, y compris M. Fenech, n’ont pas pu agir sans une implication politique. En effet, M. Fenech entretient des liens étroits avec certains responsables politiques anciens et actuels du parti travailliste, dont M. Muscat et ses anciens collaborateurs. 

Ils affirment également que l’État a été complice en ne faisant rien pour empêcher l’assassinat.

La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a également demandé justice au nom du Parlement, de son pays d’origine, Malte, et de sa famille.

« Il y a cinq ans, ils ont tué une femme pour dissimuler leurs crimes. Puis ils ont essayé d’étouffer l’affaire. Nous ne les avons pas laissés faire. Pour la justice. Pour Daphne. Pour nous tous », a-t-elle écrit sur Twitter.

Le Premier ministre Robert Abela, qui a succédé à Joseph Muscat, contraint de démissionner en raison de ses liens avec les personnes accusées d’être impliquées dans l’assassinat de la journaliste, insiste sur les progrès réalisés.

Il a affirmé que des « progrès tangibles » avaient été accomplis dans l’enquête jusqu’à présent, mais a admis que les efforts n’étaient pas suffisants pour panser les blessures que l’assassinat a occasionnées dans le pays.

« Le processus de réforme doit se poursuivre et se poursuivra. La réconciliation était et reste d’une importance capitale », a déclaré M. Abela au journal Times of Malta.

Le ministre slovaque des Finances promet d’éliminer les journalistes corrompus

En Slovaquie, le ministre des Finances et ancien Premier ministre Igor Matovič a réitéré ses attaques contre le journalisme indépendant, promettant qu’il s’efforcera d’éliminer les journalistes qu’il estime corrompus.

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