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Une vidéo montre des soldats azerbaïdjanais exécutant des prisonniers de guerre arméniens

Les individus responsables devraient être tenus de rendre des comptes

Image satellite montrant une région montagneuse près du lac Sev en Arménie, près de la frontière avec l’Azerbaïdjan, le 13 septembre 2022. Les nuages de fumée pourraient provenir de combats dans cette région, où des prisonniers de guerre arméniens auraient été exécutés, selon une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. © 2022 Planet Labs PBC (image satellite) / Human Rights Watch (graphique).

(Berlin, le 14 octobre 2022) – L'exécution de prisonniers de guerre arméniens, apparemment par les forces azerbaïdjanaises lors des combats entre les deux pays en septembre 2022, est un crime de guerre dont les auteurs devraient être tenus de rendre des comptes, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Human Rights Watch a analysé une vidéo publiée sur les réseaux sociaux début octobre et montrant l'exécution extrajudiciaire d'au moins sept prisonniers de guerre arméniens, apparemment par les forces azerbaïdjanaises.

Les autorités azerbaïdjanaises devraient veiller à ce que l'enquête ouverte par le Bureau du procureur de ce pays soit efficace, et permettre de traduire en justice les soldats et commandants responsables.

« Tuer des soldats qui se sont rendus est un crime de guerre odieux », a déclaré Hugh Williamson, directeur de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « L’enquête ouverte par les autorités azerbaïdjanaises devrait non seulement aboutir à la traduction en justice des individus responsables, mais aussi servir d’élément clé pour éviter la répétition de tels actes abjects. »

Les exécutions ont eu lieu lors de combats entre les forces arméniennes et azerbaïdjanaises qui ont éclaté à la mi-septembre, lorsque les forces azerbaïdjanaises ont fait des incursions en Arménie, le long de la frontière. Les combats ont été l'une des nombreuses ruptures de la trêve de 2020 négociée par la Russie, qui a mis fin aux hostilités concernant le conflit non résolu du Haut-Karabakh.

Le 2 octobre, le Bureau du procureur général d'Azerbaïdjan a déclaré que le Bureau du procureur militaire avait ouvert une « enquête approfondie » pour déterminer si la vidéo était authentique et, le cas échéant, « pour identifier les militaires qui y figuraient ». À la suite de l'enquête, « des mesures juridiques seront prises ». 

Human Rights Watch a vérifié la vidéo, d’une durée de 40 secondes, à l'aide de diverses techniques, notamment en consultant des experts en armes et en médecine, en analysant le langage entendu dans la vidéo et en utilisant des moteurs de recherche d'image spécialisés.

La première apparition en ligne de la vidéo a eu lieu sur Telegram, juste avant minuit CET le 1er octobre. Elle montre au moins 15 soldats, qui semblent être azerbaïdjanais, rassemblant un groupe de huit hommes non armés portant des uniformes militaires arméniens. Un soldat qui semble porter un uniforme azerbaïdjanais est muni d’un sac à dos avec une radio, ce qui corrobore l’hypothèse selon laquelle il s’agit de forces azerbaïdjanaises.

Dix-neuf secondes après le début de la vidéo, un soldat commence à tirer avec un fusil d'assaut de type Kalachnikov sur le groupe d'hommes non armés assis au sol. On entend le cri « Vurma ! » (« Ne tire pas » en azéri), juste après le début de la fusillade. Puis au moins deux autres soldats commencent aussi à tirer. Les tirs initiaux durent environ 12 secondes, suivis de tirs sporadiques jusqu'à la fin de la vidéo.

La fusillade semble avoir tué au moins sept hommes. Rohini Haar, médecin urgentiste spécialisée dans la santé et les droits humains, qui est professeur auxiliaire à l'école de santé publique de l'Université de Californie à Berkeley, a indiqué à Human Rights Watch que la probabilité de survie en cas de tirs d’armes automatiques et semi-automatiques, à cette courte distance, est peu élevée.

Le 2 octobre, un compte Twitter a rapporté que le lieu des exécutions était situé entre le mont Mets Ishkhanasar et la montagne Ishkhanasar, près du lac Sev, dans le sud-est de l'Arménie à la frontière avec l'Azerbaïdjan. Une enquête menée par le journal français Libération, publiée le 5 octobre, a confirmé que la vidéo avait été filmée le long de la même crête identifiée par le compte Twitter.

Human Rights Watch a analysé des images satellite de ce lieu enregistrées les 13 et 14 septembre et a utilisé une variété de techniques, y compris la modélisation 3D, la géolocalisation et la photogrammétrie, ce qui implique de prendre des mesures à l'aide de photographies pour établir exactement où la vidéo a été enregistrée. Human Rights Watch n'a pas été en mesure de vérifier de manière indépendante le lieu exact des exécutions.

Les images satellite enregistrées à 9 h 19 CET le 13 septembre montrent des nuages de fumée et des signes de brûlures dans la zone des monts Mets Ishkhanasar et Small Ishkhanasar. Vingt-quatre heures auparavant, le 12 septembre, aucun signe d'incendie n'était visible sur l'imagerie satellite. L'adjoint au maire de Goris, une ville du sud de l'Arménie située à environ 15 kilomètres du mont Mets Ishkhanasar, a fait état de combats dans la région dans l'après-midi du 13 septembre.

Le bureau de la Médiatrice arménienne a déclaré à Human Rights Watch que l'incident s'était produit le 13 septembre entre 6h00 et 7h00, heure locale. La position basse du soleil dans la vidéo indique qu'elle a été filmée soit à l'aube, soit au coucher du soleil. Le manque de neige sur les montagnes est également compatible avec la fin de l'été pour la région.

Le droit international humanitaire, qui rassemble les lois de la guerre, exige des parties à un conflit armé international qu'elles traitent les prisonniers de guerre avec humanité en toutes circonstances. La Troisième Convention de Genève régit le traitement des prisonniers de guerre, à compter du moment de leur capture.

L’Azerbaïdjan est un État partie aux Conventions de Genève, ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et à la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), qui interdisent strictement les exécutions extrajudiciaires.

Communiqué complet en anglais : en ligne ici.

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