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Brigitte Bardot : "Un pays qui tolère l’intolérable cruauté de la corrida est un pays malade"
Brigitte Bardot

Brigitte Bardot : "Un pays qui tolère l’intolérable cruauté de la corrida est un pays malade"

Tribune

Par Brigitte Bardot

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Ce 18 octobre au Parlement européen, le député Aymeric Caron (LFI) organise une conférence de presse pour défendre l'abolition de la corrida en France et en Europe, à l'invitation du député européen Younous Omarjee (LFI). Brigitte Bardot, engagée depuis des années avec sa fondation dans la protection des animaux, appelle à soutenir la proposition de loi du député antispéciste qui sera débattue le 24 novembre prochain à l'Assemblée nationale, visant à mettre fin à la corrida en France.

« Torturer un taureau pour le plaisir, pour l'amusement, c'est beaucoup plus que torturer un animal, c'est torturer une conscience. » Ces paroles de Victor Hugo disent l’essentiel car, pour répondre à votre question, la corrida représente à mes yeux le pire de l’homme lorsqu’il est dénué d’empathie. Le plus ignoble dans cette macabre mise en scène, c’est de se divertir de la longue et douloureuse agonie d’un être sensible. Les rires et applaudissements du public sont aussi glaçants, écœurants, que les coups portés à l’animal par le torero.

La corrida espagnole, je dis bien espagnole car ce n’est en rien une tradition française, est considérée par le Code pénal comme un acte de cruauté condamné de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende sur le territoire. La non-application des sanctions dans quelques départements français est une aberration, une folie. D’ailleurs, d’après un sondage Ifop de février dernier pour ma Fondation, 87 % des Français se déclarent favorables à une condamnation de tous les actes de cruauté, sans exception pour les corridas.

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En 1951, lorsque cette exception a été introduite, nous étions dans une tout autre époque, notre rapport à l’animal était très différent, j’ai moi-même connu et accompagné cette évolution profonde de notre société. Nous ne pouvons pas nous comporter en 2022 comme si nous n’avions rien appris sur la sensibilité animale depuis 70 ans.

On ne peut pas reconnaître à l’animal le caractère d’être sensible sans remettre en cause une boucherie infâme, qui se déroule dans une arène mais serait condamnée partout ailleurs, y compris dans le pire des abattoirs. Les éleveurs de taureaux, qui bénéficient de subventions européennes dans le cadre de la PAC malgré l’opposition du Parlement européen, nous accusent de vouloir faire disparaître une race « de combat », quelle hypocrisie ! Il ne s’agit pas ici de la disparition d’une espèce ou d’une menace pour la biodiversité, mais simplement ne plus faire se reproduire des animaux voués à être torturés dans une arène ou tués dans un abattoir.

L’argument économique des villes taurines et, là aussi, une vaste hypocrisie. Outre l’argent public qui sert à maintenir sous perfusion ces spectacles archaïques, l’attrait des férias n’est pas la corrida, ce n’est pas la corrida qui fait venir le public aux fêtes de Bayonne par exemple. À Nîmes, les arènes sont déjà utilisées pour différents spectacles, elles n’ont d’ailleurs pas été construites pour organiser des corridas. Cet amphithéâtre romain, magnifique il faut bien le reconnaître, peut être un attrait touristique comme l’est le Colisée de Rome, inutile d’y verser le sang.

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Le Chili, l’Argentine, Cuba et l’Uruguay ont fait le choix d’interdire les corridas, le Mexique s’y prépare, la France ne peut pas toujours être à la traîne et le cancre de la protection animale. Mes collaborateurs rencontrent actuellement de nombreux parlementaires prêts à soutenir la proposition de loi d’Aymeric Caron, il y en a dans tous les groupes parlementaires car c’est un sujet qui rassemble une très large majorité de Français.

Je suis fière que mon pays soit un symbole des droits de l’homme dans le monde, et je serais tellement fière qu’il soit aussi la patrie des droits de l’animal. Un pays qui tolère l’intolérable cruauté de la corrida, s’en divertit, est un pays malade qui sombre dans la barbarie. J’appelle les députés à soutenir l’initiative d’Aymeric Caron, à être au rendez-vous de ce vote qui pourrait être historique pour la protection de l’animal et la dignité de l’homme.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne